Algérie 2004-2005: La face sombre de la « normalisation »
Publié le 10/09/2020
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Algérie 2004-2005
La face sombre de la « normalisation »
La démission, fin juillet (officiellement pour raisons de santé), du chef
d’État-Major, le général Mohammed El Amari, et les remaniements à la tête de
l’armée auxquels le président Abdelaziz Bouteflika, réélu en avril 2004, a
procédé à cette occasion, en sa qualité de ministre de la Défense, ont davantage
relevé de recompositions au sein du pouvoir que d’une véritable rupture :
l’armée, depuis l’interruption des élections législatives par le coup d’État de
1992, a continué d’exercer le pouvoir réel et de dicter sa politique au
gouvernement.
Ainsi, les généraux Mohammed Mediène et Smaïl Amari, chefs des
services spéciaux, et Larbi Belkheïr (directeur du cabinet du président)
sont-ils restés en place.
Cette orientation a été confirmée en janvier 2005 par
la création d’un poste de ministre délégué à la Défense auprès du président,
présentée comme préparant le retour de ce ministère sous l’autorité du chef de
l’exécutif, alors qu’il s’agissait de réduire le pouvoir civil sur l’armée.
Le
choix pour ce poste du général Abdelmalek Guenaïzia (jusqu’alors ambassadeur en
Suisse), dont le nom n’était pas associé aux violations des droits humains
perpétrées depuis 1992 – date à laquelle il avait démissionné de l’État-Major,
non pour s’opposer au coup d’État, mais en raison de conflits de pouvoir –, a
surtout répondu à la nécessité pour l’armée d’améliorer son image à l’étranger
et de se doter d’un émissaire présentable dans le dialogue avec l'OTAN
(Organisation du traité de l’Atlantique nord), la coopération antiterroriste
avec l’Union européenne (UE), le rapprochement avec d’autres armées (États-Unis,
France...).
Un projet d’amnistie valant impunité
Cette continuité s’est exprimée en premier lieu dans la politique de «
réconciliation nationale » engagée par A.
Bouteflika pour « tourner la page » de
la « sale guerre » (plus de 150 000 morts, près de 2 millions de déplacés, des
dizaines de milliers de torturés, 20 000 disparus et des centaines de milliers
d’exilés).
Aux ONG (organisations non gouvernementales) des droits humains qui
réclamaient la vérité et la justice, la réponse des autorités, par la voix de
Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion
et de protection des droits de l’homme installée par A.
Bouteflika en 2001, a
d’abord consisté à minimiser par tous les moyens – y compris la « dissimulation
» de charnier et le détournement de l’utilisation des tests ADN – les
disparitions du fait de l’État (le Premier ministre, qui avait reconnu 10 000
cas, s’est ensuite rétracté).
Comme il était impossible de nier l’organisation à
large échelle par les forces de sécurité de « disparitions forcées », la
commission a proposé une indemnisation aux familles pour « clore le dossier ».
Les autorités ont aussi verrouillé toute possibilité d’enquêter sur la réalité
et les actions des groupes armés ou de faire la vérité sur les crimes qui leur
sont attribués : début août, à l’issue de procès expéditifs, des condamnations
pouvant aller jusqu’à la peine de mort furent prononcées contre des personnes
accusées d’avoir participé en 1997 aux tueries de Raïs et Bentalha sans aucune
investigation sérieuse, en l’absence de la partie civile et alors que les
inculpés affirmaient avoir avoué sous la torture.
L’annonce, début novembre
2004, par A.
Bouteflika de son intention de faire approuver par référendum un
projet de loi d’amnistie (sans processus de vérité et de justice) fut
interprétée dans l’opposition et les ONG des droits de l’homme comme une
tentative de garantir l’impunité aux responsables de crimes.
Pour Ali Yahia
Abdenour, président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme
(LADDH), l’amnistie ne pouvait en aucun cas concerner les crimes les plus graves
et devait être soumise à des conditions préalables : levée de l’état d’urgence,.
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