Afrique du Sud 1987-1988
Publié le 10/09/2020
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Afrique du Sud 1987-1988
Nouveau tour de vis
Le choix de la fermeté effectué en 1986 par le pouvoir blanc d'Afrique du Sud à
l'égard de la "révolte des ghettos" s'est maintenu et accentué en 1987 et début
1988, au point de réduire considérablement les possibilités d'expression de
l'opposition extraparlementaire à l'apartheid.
Cette politique du président
Pieter Botha répond au double impératif de reprendre le contrôle politique des
ghettos noirs, mais aussi de damer le pion à l'extrême droite, toujours sur une
pente ascendante au sein de l'électorat blanc.
L'état d'urgence réimposé en juin 1986 a été renouvelé un an plus tard, et ne
donne aucun signe de devoir être levé.
Il a permis, par son cortège de
détentions, de bannissements, de censure et d'interdictions de rassemblement, de
rétablir une apparence d'ordre dans des cités noires en révolte permanente
depuis septembre 1984.
Le seul signe, éphémère, de détente, est intervenu avec
la libération sans conditions, le 5 novembre 1987, de Govan Mbeki,
soixante-dix-sept ans, l'un des chefs historiques de l'ANC (Congrès national
africain), condamné à la prison à vie en même temps que Nelson Mandela un quart
de siècle plus tôt.
Ceux qui y ont vu un signe encourageant ont vite été déçus:
Mbeki a été banni, et Mandela est resté en prison...
Museler l'opposition
Le coup de grâce pour les militants anti-apartheid est tombé le 24 février 1988:
dix-sept organisations d'opposition se sont vues empêchées de se livrer à la
moindre activité sans l'autorisation du ministre de la Loi et l'Ordre...
Parmi
les victimes, figurent le Front démocratique uni (UDF), première force
anti-apartheid légale, proche de l'ANC (clandestin), et l'Organisation du peuple
d'Azanie (AZAPO), favorable à la Conscience noire.
Quant au Congrès des
syndicats sud-africains (COSATU), principale confédération du pays, il s'est vu
intimer l'ordre de ne plus "se mêler de politique", et de se cantonner aux
affaires strictement syndicales.
Quelques jours plus tard, le président Pieter Botha interdisait aussi le journal
New Nation, publié par l'Église catholique.
D'autres journaux proches de
l'opposition figuraient eux aussi dans le collimateur de Prétoria, dont le revue
Outlook du Cap, et l'hebdomadaire de Johannesburg Weekly Mail.
Avec ce nouveau tour de vis, il s'agissait notamment, pour Prétoria, d'éliminer
politiquement les éléments les plus "radicaux" de l'opposition noire, afin de
permettre l'émergence d'une force "modérée".
Le gouvernement a ainsi organisé
des élections municipales le 26 octobre 1988, afin de redonner vie à des
institutions sérieusement mises à mal lors de la révolte de 1984.
Les
conseillers municipaux noirs, dénoncés comme des "collaborateurs" du pouvoir
blanc, ont constitué l'une des cibles privilégiées des émeutiers.
L'UDF et les autres groupes anti-apartheid s'apprêtaient à faire campagne pour
boycotter ces élections municipales, bien qu'un débat interne ait été lancé sur
l'opportunité d'y participer afin de prendre le contrôle des municipalités
noires.
Le gouvernement a tranché dans le vif, en éliminant ces groupes de la
scène politique.
Il reste que la participation à ces scrutins ne sera sans doute
guère élevée, comme cela avait déjà été le cas en 1977/1978, au lendemain d'une
vague répressive similaire.
Le poids du COSATU
La mesure prise à l'encontre du COSATU est significative du poids croissant de
la centrale syndicale.
Sans l'attaquer de façon aussi frontale que les autres
mouvements, le pouvoir pose des jalons pour mieux la contrôler.
Le COSATU s'est,
il est vrai, un peu plus aligné sur l'opposition, en adoptant en 1987 la "Charte
de la liberté", principal texte de référence de l'ANC, comme son propre.
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