Abd el-Kader
Publié le 16/05/2020
Extrait du document
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Abd el-Kader Abd el-Kader était le fils d'un marabout de la tribu des Hachem, Mahieddine, qui vivait dans la région de Mascara.
Ils revenaient tousdeux d'un long pèlerinage en Orient lorsque les Français s'emparèrent d'Alger.
Mahieddine prêcha contre eux la guerre sainte, mais il étaittrop âgé pour diriger efficacement la lutte.
Abd el-Kader s'était distingué par sa bravoure ; trois tribus l'acclamèrent du titre de sultan ennovembre 1830.
Abd el-Kader n'avait pas encore vingt-quatre ans, mais il apparaissait déjà comme un entraîneur d'hommes.
Élégant, beau cavalier, il étaitd'une foi ardente qui n'excluait cependant pas la prudence ni la diplomatie.
Indifférent aux richesses, il était pénétré avant tout de lamission qui lui revenait de chasser du pays les infidèles.
Il se contenta d'abord du titre d'émir avant de prendre celui de commandeur descroyants et commença d'étendre son influence sur les tribus d'alentour.
Mais il échoua devant Mostaganem et Tlemcen que sa garnisonturque refusa de livrer.
Un accord avec le général Desmichels qui commandait à Oran lui permit de mieux asseoir son autorité dansl'intérieur.
Maître du beylik de l'Ouest, Abd el-Kader pénétra bientôt dans le Titteri en profitant de la faiblesse du gouverneur Drouet d'Erlon.
Il serendit maître de Médéa et de Miliana sans susciter de riposte.
Mais à l'ouest il eut maille à partir avec le général Trézel, successeur deDesmichels à Oran.
Trézel ayant pris sous sa protection des tribus qui refusaient de reconnaître l'autorité de l'émir, ce fut la rupture.
Battusur l'oued Sig, Abd el-Kader réussit à surprendre au défilé de la Macta les troupes françaises qui regagnaient Arzew en leur faisant subir delourdes pertes (juin 1835).
Pour venger cet échec, le gouvernement français envoya des renforts et donna pour successeur à Drouet d'Erlon le maréchal Clauzel P1387 , partisan de la conquête.
Mascara et Tlemcen furent occupées, puis évacuées.
Abd el-Kader réussit à rétablir une situation un instant compromise et reprit l'offensive le printemps suivant.
L'échec de Clauzel P1387 devant Constantine devait lui faire la partie belle.
Pour agir librement à l'est, la France avait besoin de la neutralité d'Abd el-Kader.
Le ministre de la Guerre dépêcha le général Bugeaud P1273 avec mission de traiter.
La convention de la Tafna, hâtivement négociée (30 mai 1837), reconnut à l'émir la possession du beylik de l'Ouest à l'exception d'Oran, Arzew et Mostaganem, ainsi que le Titteri et le sud de la provinced'Alger.
Bugeaud P1273 s'était contenté de vagues assurances concernant la souveraineté de la France, la liberté du commerce et la situation de la province de Constantine.
L'incohérence de la politique française assurait ainsi le triomphe diplomatique d'Abd el-Kader.
Il allait mettre la trêve à profit pour réduireles tribus rétives et organiser un État doté d'une administration régulière.
“ Mais la constitution d'un empire n'était pour lui que le moyend'arriver au but qu'il s'était proposé : l'expulsion des chrétiens.
” Après avoir soumis les tribus du sud oranais et du Titteri, il brisa la confrérie rivale des Tijâniyya, mais il ne put entraîner le ralliement des Kabyles.
En 1839, sa puissance était à son apogée : son empire s'étendait de Tlemcen à la Medjana, plus de la moitié de l'ancienneRégence.
Le pays était partagé en huit khalifaliks confiés à des hommes sûrs, comme Bou Hamidi à Tlemcen ou son beau-frère Mustaphaben Thami à Mascara, chargés de maintenir l'ordre et de percevoir les impôts.
Tagdempt devenait une sorte de capitale ; on y battaitmonnaie ; une fabrique d'armes y était installée.
Abd el-Kader mettait sur pied une armée régulière de dix mille hommes en attendant lemoment de reprendre les hostilités.
L'occasion lui en fut fournie par l'expédition aux Portes de Fer qu'il considéra comme une violation du traité de la Tafna.
En novembre1839, il proclama de nouveau la guerre sainte et se jeta sur la Mitidja.
Les fermes furent incendiées, les colons massacrés.
L'arméefrançaise dut évacuer les postes qu'elle avait imprudemment disséminés dans le pays.
Abd el-Kader cependant allait trouver un adversaire à sa mesure, le général Bugeaud P1273 , nommé gouverneur général, qui revenait en Algérie avec l'intention bien arrêtée d'en finir avec lui. Bugeaud P1273 disposait des moyens qui avaient si longtemps manqué à ses prédécesseurs, près de quatre-vingt mille hommes bien équipés.
Retournant contre l'émir la tactique qui lui avait si bien réussi jusqu'alors, à un adversaire insaisissable, il opposa la mobilité de ses troupes allégées de leurs bagages.
Les colonnes françaises portèrent la guerre chez l'ennemi, détruisant les douars,enlevant les grains et les troupeaux afin de contraindre les tribus à la soumission P001M1 .
Bugeaud P1273 se tourna d'abord vers l'Oranie.
Il détruisit Tagdempt, occupa Mascara (mai 1841), puis Saïda, tandis qu'une autre colonne détruisait Boghari et Taza.
Après avoir enlevé les villes, Bugeaud P1273 dirigea ses attaques contre les contingents réguliers de l'émir et les tribus soumises à son autorité.
L'année 1842 fut celle du “ jeu de barres ” entre les lieutenants de Bugeaud P1273 et les khalifes d'Abd el-Kader.
La région de Mascara fut systématiquement dévastée ; celle de Tlemcen subit bientôt le même sort.
Pourchassés par les colonnes de Lamoricière et de Bedeau, Ben Thami et Bou Hamidi voyaient se multiplier les défections.
Abd el-Kader lui-même n'était pas épargné.
Battu à deux reprises par Bedeau, il n'avait dû son salut qu'à la fuite.
A l'automne de 1842, ils'installa dans le massif de l'Ouarsenis d'où il lançait des expéditions punitives contre les tribus ralliées à la France.
Mais il en futdébusqué en décembre.
Privé de refuge, sans cesse harcelé par les colonnes françaises, il en était réduit désormais à se déplacerconstamment.
Il lui fallait assurer la sécurité de sa smalah quelque trente mille personnes, parents, amis ou fidèles avec sonadministration, son trésor et ses troupeaux.
L'émir lui fit passer l'hiver sur les hauts plateaux.
Mais cette capitale ambulante était difficile à dissimuler.
Alors qu'elle faisait route vers le djebel Amour, elle fut surprise près de Taguinepar une petite colonne emmenée par le duc d'Aumale.
Chargeant avec une belle audace, six cents cavaliers portèrent l'effroi et laconfusion à l'intérieur du camp, rendant toute résistance impossible (16 mai 1843).
Trois mille prisonniers et un riche butin tombèrentainsi aux mains des Français.
La prise de sa smalah porta un coup terrible au prestige d'Abd el-Kader.
Les tribus du sud firent leur soumission.
L'émir continua la lutte cependant, mais les mailles du filet se resserraient surlui.
A trois reprises au cours de l'été, son camp fut surpris et enlevé par des colonnes françaises.
A l'automne de 1843, il fut contraint de se réfugier au Maroc.
Il réussit à entraîner dans la lutte lesultan Abdur-Rahman P1006 , mais la défaite de l'Isly contraignit celui-ci à traiter.
Abd el-Kader fut sacrifié au maintien de la paix.
Son rôle politique n'était pas terminé cependant.
Il reparut en Algérie à la faveur de l'insurrection de Bou Maza et remporta le succès de Sidi Brahim.
Pourchassé par dix-huit colonnes, il réussit encore à s'échapper et à regagner le Maroc oriental.
Il en futchassé par les méhallas du sultan et fit sa reddition P001C au général de Lamoricière P1955 , le 23 décembre 1847.
Celui-ci s'était engagé à obtenir son transfert en Orient.
Mais les protestations des colons amenèrent le gouvernement à différerl'exécution de cette promesse.
Abd el-Kader fut interné à Pau, puis à Amboise.
Ce fut le prince-président qui lui rendit la liberté en octobre1852.
L'émir quitta la France pour s'installer à Brousse, puis à Damas, où il se fixa définitivement en 1855.
Fidèle à la parole qu'il avait donnée, Abd el-Kader vécut désormais dans l'étude et la prière.
Il devait cependant sortir de sa retraite en juillet 1860 pour porter secours aux chrétiens de Damas.
Samaison devint un asile et douze mille personnes furent sauvées par lui du massacre.
Napoléon III P244 lui conféra le grand cordon de la Légion d'honneur KW126 et porta sa pension à cent cinquante mille francs.
Dix ans plus tard, Abd el-Kader écrivit aux chefs de l'insurrection du Constantinois pour les engager à se soumettre.
Mais il était déjà bien oublié et sa lettre n'eut aucuneffet.
Abd el-Kader mourut le 25 mai 1883, à l'âge de soixante-quinze ans, laissant seize enfants qui, pour la plupart, devinrent sujetsottomans.
Malgré l'hommage que lui avaient rendu les Français, sa légende s'était estompée et il devait s'écouler plus d'une générationavant que l'Algérie ne retrouve en lui le héros de la résistance nationale..
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