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PASCAL, Pensées (posthume), pensées 147, éd. Brunschvicg

Repérez les étapes du texte suivant :

"Nous ne nous contentons pas de la vie que nous avons en nous et en notre pro­pre être : nous voulons vivre dans l'idée des autres d'une vie imaginaire, et nous nous efforçons pour cela de paraître. Nous travaillons incessamment à embellir et conserver note être imaginaire, et négligeons le véritable. Et si nous avons la tran­quillité, ou la générosité, ou la fidélité, nous nous empressons de le faire savoir, afin d'attacher ces vertus-là à notre autre être, et les détacherions plutôt de nous pour les joindre à l'autre; et nous serions de bon cœur poltrons pour en acquérir la réputation d'être vaillants. Grande marque du néant de notre propre être, de n'être pas satisfait de l'un sans l'autre, et d'échanger souvent l'un pour l'autre! Car qui ne mourrait pour conserver son honneur, celui-là serait infâme."

1. Pascal commence par dissocier le moi en deux: il existe un« moi vérita­ble» (moi, tel que je me connais intérieurement) et un « moi imaginaire » (moi, tel que je me donne à voir à autrui). La distinction de «l'être» et du « paraître », ou celle du « moi privé » et du« moi social» peuvent éclairer le sens de celle faite ici par Pascal. 2. Pascal décrit alors un véritable processus d'aliénation : nous préférons donner aux autres l'apparence de qualités que nous n'avons pas, plutôt que de travailler à les avoir. Nous préférons notre moi imaginaire à notre moi réel. Nous serions même prêts à être le contraire de ce que nous vou­lons paraître, si cela nous aidait à le faire paraître (exemple : nous serions prêts à être poltron si cela nous permettait de paraître courageux). 3. Conclusion : le besoin de reconnaissance n'est donc pas une condition d'une meilleure connaissance de soi (Pascal défend ici une thèse complètement contraire à celle de Sartre ou du romancier Michel Tournier, mais au contraire un appauvrissement: dans cette quête d'une reconnaissance de l'autre, nous faisons l'aveu de notre inauthenticité et de notre «néant».

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