PASCAL : LE MOI, PERSONNE ET PERSONNAGE
PASCAL : LE MOI, PERSONNE ET PERSONNAGE
Le mot personne vient du latin “persona”, le masque de théâtre. Dire que je suis une personne, est-ce pour autant dire que je me confonds avec les rôles ou personnages que je joue ou parais jouer dans mon existence sociale ? Pascal montre comment ma personne est indépendante de son paraître, bien qu'on ait toujours tendance à la réduire à lui. « Qu’est-ce que le moi ? Un homme qui se met à la fenêtre pour voir les passants, si je passe par là, puis-je dire qu’il s’est mis là pour me voir ? Non ; car il ne pense pas à moi en particulier. Mais celui qui aime quelqu’un à cause de sa beauté, l’aime-t-il ? Non : car la petite vérole, qui tuera la beauté sans tuer la personne, fera qu’il ne l’aimera plus. Et si on m’aime pour mon jugement, pour ma mémoire, m’aime-t-on, moi ? Non, car je puis perdre ces qualités sans me perdre moi-même. Où est donc ce moi, s’il n'est ni dans le corps, ni dans l’âme ? Et comment aimer le corps ou l’âme, sinon pour ces qualités, qui ne sont point ce qui fait le moi, puisqu'elles sont périssables ? Car aimerait-on la substance de l’âme d’une personne abstraitement, et quelques qualités qui y fussent ? Cela ne se peut, et serait injuste. On n'aime donc jamais personne, mais seulement des qualités.»
Pascal, Pensées, Brunschvicg 323.
ordre des idées
* Projet de Pascal : définir le moi véritable, la personne authentique, par l'examen critique de plusieurs perspectives possibles.
1) Première perspective : la personne réduite au personnage anonyme (un passant). — Critique : cette personne n'est pas un moi, qui ne peut être qu'unique.
2) Deuxième perspective : est-ce une personne que j'aime lorsque j'aime sa beauté (son apparence physique) ? — Critique : la maladie peut détruire la beauté de la personne sans détruire la personne. Celle-ci ne disparaît pas avec laperte d'une qualité (qui ne définit donc que la “personne” extérieure, sociale, le personnage).
3) Troisième perspective : est-ce la personne que j'aime en aimant ses qualités intellectuelles (son être psychologique) ? — Critique analogue à la précédente. Ma personne ne se confond pas avec ses attributs.
4) Conclusions : — Le moi personnel n'est donc ni l'être physique ni l'être psychologique, dans la mesure où, eux anéantis, ma personne n'est pas nécessairement anéantie. — L'amour ne porte que sur les attributs d'un personne (ses qualités physiques ou intellectuelles), non sur la personne proprement dite. (Ainsi, la personne essentielle est au-delà de celle qu'on peut percevoir et qui dépend de sa relation aux autres, qu'on pourrait nommer personnalité psychologique ou sociale. Au sens strict, la personne serait alors le sujet singulier, unique, ce moi que toi tu n'es pas, bien que toi, tu sois aussi une personne, comme moi un moi, mais un moi radicalement autre que le mien).
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