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mysticisme

MYSTICISME, MYSTIQUE

♦ Le mysticisme est une attitude ou une doctrine selon lesquelles il existe un ordre de réalités surnaturelles qui ne peuvent être atteintes que par une intuition étrangère à l’expérience sensible et à la connaissance rationnelle. C’est aussi l’état psychique de celui qui a le sentiment d’entrer directement en rapport avec Dieu. Aussi Bergson, remarquant qu’« il ne dit rien, absolument rien, à celui qui n’en a pas éprouvé quelque chose », conçoit-il le mysticisme comme l’« incandescence » à partir de quoi peut éventuellement se figer une doctrine religieuse. Il semble d’ailleurs que les mystiques partagent une volonté de s’exclure de l’organisation temporelle et de l’institution religieuse pour mieux affirmer le caractère infini d’un désir que Dieu seul peut contenter. On a pu remarquer (M. de Certeau) que l’expérience mystique se multiplie particulièrement dans les périodes de crise - économique et culturelle -, favorables à un individualisme où chacun cherche par lui-même sa propre voie de salut : elle affirmerait que la seule Loi acceptable est celle de Dieu. Par extension et de manière péjorative, le mysticisme est une doctrine ou une croyance irrationnelle qui, refusant l’intelligence et l’observation, se fonde sur le sentiment et l’imagination.

♦ L’adjectif mystique correspond à tout ce qui concerne le mysticisme, et plus particulièrement à un type de pensée, la « pensée mystique » qui, chez Lévy-Bruhl, est propre aux sociétés primitives et fondée sur « la croyance à des forces, des influences, des actions imperceptibles aux sens et cependant réelles ».

♦ La mystique désigne, outre l’ardent attachement à une idéologie, une partie de la théologie qui étudie la spiritualité mystique, c’est-à-dire les techniques d’ordre spirituel qui permettent une approche des phénomènes surnaturels échappant à l’appréhension rationnelle. Johannes Eckhart (1260-1327) définissait la théologie mystique comme « l’intelligence claire et savoureuse des choses qui sont crues d’après l’Évangile ».

mysticisme

Doctrine ou croyance selon laquelle l'homme peut s'unir à Dieu par une contemplation qui peut aller jusqu'à l'extase.

Commentaire Le terme vient du grec muein, « initier ». Autant dire que le mysticisme est un produit de l'initiation, de la compréhension des mystères sacrés de la nature, de la vie, de l'être. Il débouche sur un dépassement de soi, un sentiment d'appartenance à une entité supérieure et transcendante. Il détermine une vie où le sentiment prime, élève vers l'infini, négligeant les appels de la raison et du concret. Le terme s'applique aussi à d'autres champs que la religion : il existe un mysticisme scientifique, fondé sur une foi aveugle dans les progrès de la science, un mysticisme romantique où l'artiste, guidé par sa seule intuition, communique avec la Beauté ou l'idéal... Certains penseurs ont déploré que le mysticisme détourne de la vie concrète au profit d'un idéal asocial et conduise, dans certains cas, à l'intolérance.

Citations Le sens de la poésie a beaucoup de points communs avec le sens du mysticisme. C'est le sens du particulier, du personnel, de l'inconnu, du mystérieux, de la révélation... (Friedrich Novalis, Fragments.) Monsieur de Lamartine a fait sans doute de beaux vers ; mais il veut toujours paraître avoir rêvé sur une autre planète que la nôtre. Pourquoi s'attacher à ne rien dire comme tout le monde, faire des idées les plus communes des énigmes inintelligibles, les envelopper pour déguiser leur nullité de nuages métaphysiques, de vapeurs mystiques et de vapeurs mélancoliques, qui ne laissent plus voir que le vide de la pensée quand un rayon de bon sens les dissipe ? (Paul Claudel, Journal, tome I, avril 1920.) Dans des domaines fort proches, celui de la mystique et de la poésie, la nuit joue un rôle primordial, l'expérience mystique et l'expérience poétique y trouvent la plupart du temps source et inspiration, et régulièrement reviennent s'y régénérer. (Michel Maffesoli, l'Ombre de Dionysos.)

MYSTICISME, n. m. (du latin mysticus, issu du grec musti-kos, «relatif au mystère»).

1° Croyance religieuse ou philosophique en la possibilité d’une union intime et directe de l’être humain avec la divinité. Recherche de cette union par la prière, par la méditation ou la souffrance, par l’extase où l’âme fusionne avec Dieu (le mot extase, en grec, signifie «être hors de soi»). Le mysticisme chrétien. Le mysticisme bouddhiste, à la recherche du nirvâna. Sans qu’il y ait nécessairement recherche d’extase, on peut parler de mysticisme à propos des croyants dont la foi est intense, intuitive, exigeante, et qui recherchent l’exaltation intérieure. D’où parfois l’emploi péjoratif du mot (synonyme de foi aveugle, irrationnelle, illuminée).

2° Attitude générale, en matière de croyance ou de doctrine philosophique (ou politique), qui se fonde sur une adhésion intuitive, sur le sentiment plutôt que sur la raison. Cette attitude sacralise ce en quoi elle croit, même s’il s’agit d’une aspiration athée. Par exemple, le mysticisme révolutionnaire consiste à croire avec exaltation que la révolution assurera immédiatement le bonheur des hommes enfin libérés. On a pu parler, de même, de mysticisme scientifique à propos du scientisme.

MYSTICISME nom masc. — Doctrine, attitude ou pratique qui vise à l’union totale et directe de l’homme et de la divinité. ÉTYM. : du latin mysticus. En principe, le mysticisme est toujours religieux. Il est cette aventure qu’ont rapportée des saints comme Thérèse d’Avila ou Jean de la Croix, qui consiste, par la prière, la méditation, voire la souffrance, à ouvrir totalement son âme à Dieu pour se perdre en lui et jouir de manière extatique de cette fusion. Le mysticisme est loin cependant d’être le monopole du christianisme. L’islam, mais surtout les religions orientales comme l’hindouisme ou le boudhisme ont développé depuis longtemps et sans doute de manière plus vertigineuse cette exploration intérieure qui aboutit à une forme parfaite de plénitude. Outre le mysticisme laïc qui consiste de manière peu convaincante à substituer à Dieu une valeur comme la révolution ou l’histoire et qui n’a pas grand-chose à voir avec les exemples précédents, on peut imaginer un mysticisme athée qui est par exemple celui de Georges Bataille. Dans L’Expérience intérieure ou Le Coupable, celui-ci décrit toute une série d’états limites de la conscience qui s’apparentent à ceux que connaissent les mystiques, mais qui diffèrent radicalement de ceux-ci dans la mesure où ils ne débouchent que sur le vide absolu, sans aucune des certitudes que confère la religion.

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