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MOREAS Jean Papadiamantopoulos dit Jean

MOREAS Jean Papadiamantopoulos dit Jean 1856-1910

Fils d’un magistrat grec, c’est à Athènes qu’il apprend le français, avant de venir s’installer en France (à 26 ans), puis de se faire naturaliser. Il mourra à Saint-Mandé. Proche, un temps, du symbolisme, il s’oriente à terme, après une tentative de rapprochement avec la manière rhétorique du XVIe siècle (Le Pèlerin passionné, 1891-92), vers une poésie classique où le souci de la forme (alexandrin, rime) et la rhétorique brident une imagination constamment muselée: Les Sylves (1894-96), Stances (1899-1901).

Ioannis Papadiamantopoulos, dit Jean Moréas, né en 1856 à Athènes, est issu d'une famille d'aristocrates grecs. Élevé dans la culture française, il rencontre les poètes d'avant-garde alors qu'il fait son droit à Paris. Après des séjours en Allemagne, en Italie et en Grèce, il décide de ne vivre qu'à Paris. Sa fortune personnelle lui permet de se consacrer à la poésie. Au nom du symbolisme, qui marque ses deux premiers recueils, Les Syrtes (1884) et Les Cantilènes (1886), ce Méditerranéen quelque peu tapageur déclare la guerre aux parnassiens et gagne la bataille dans une France fin de siècle. Amoureux de la langue française, capable de parler comme Rutebeuf ou Rabelais devant ses admirateurs, ce passionné de rhétorique écrit aussi Les Stances (1901), œuvre poignante de mélancolie sur la difficulté de vieillir solitaire.

MORÉAS Jean (pseud. de Jean Papadiamantopoulos). Poète grec d’expression française. Né à Athènes le 15 avril 1856, mort à Saint-Mandé (Val-de-Marne) le 30 avril 1910. Issu de deux grandes familles grecques (un de ses aïeux était mort héroïquement au siège de Missolonghi), il était le fils d’un jurisconsulte renommé. Ayant reçu une éducation toute française, passionné de nos poètes dès son adolescence, il arriva à Paris vers 1875 pour y faire ses études de droit, mais fréquenta les cafés et les cercles littéraires du Quartier Latin, en particulier les fameux « Hydropathes », beaucoup plus assidûment que les cours de la faculté. Aussi lorsqu’il dut rentrer à Athènes en 1878, il ne tarda guère à se sentir exilé dans sa propre patrie et revint vite se fixer sur les bords de la Seine, non sans avoir accompli d’abord un long voyage à travers l’Allemagne. A peine avait-il fait ses débuts dans de petites revues, qu’il était déjà un personnage chez les poètes de la rive gauche, auxquels il en imposait par son élégance exotique, son allure conquérante, sa faconde colorée de Méridional. Déjà il rêvait d’être chef d’école, bien que ses premiers recueils, Les Syrtes (1884), Les Cantilènes (1886), ne brillassent guère que par une débauche inouïe des termes les plus rares. Cependant, insurgé contre la tyrannie formelle que faisait alors régner le Parnasse, Moréas publia dans le supplément du Figaro, le 18 septembre 1886, un manifeste de style assez confus mais qui fut cependant retentissant, car il formulait la nouvelle esthétique du mouvement symboliste : on y souhaitait, en particulier, que la poésie, en utilisant d’« impollués vocables » et en renonçant aux froides descriptions parnassiennes, se consacrât à la recherche d’images suggestives et à la découverte, par-delà les objets, de l’« idée primordiale ». Le symbolisme de Moréas n’en était pas moins radicalement différent de celui de Mallarmé; il y avait chez ce Grec une instinctive répugnance pour l’obscur, qui s’exprime bien dans sa proclamation de 1889 : « Répudions l’inintelligible, ce charlatan ! » Apres avoir donné sa charte au symbolisme, Moréas fut donc un des premiers à s’éloigner de ce mouvement, dans lequel il ne voulut plus voir bientôt qu’un phénomène de transition, dont la seule utilité avait été de libérer la poésie de la sécheresse parnassienne et de préparer un retour, par-delà le romantisme lui-même, à la vraie tradition classique française. La restauration de cette tradition, tel fut l’idéal de l’« école romane », fondée en 1891 par Moréas et par son jeune disciple Charles Maurras, avec Maurice du Plessys, Raymond de La Tailhède et Ernest Raynaud. Mais Moréas qui, dès ses premières œuvres, avait montré une grande complaisance pour de purs exercices de rhétorique poétique, eut longtemps encore le tort de traiter le français comme une langue morte. Grisé par les poètes du XVIe siècle, il cherchait moins, dans son Pèlerin passionné (1891), à les continuer qu’à les imiter, avec, il est vrai, une virtuosité magistrale de « poète grammairien », pour reprendre l’expression de Barrés. Il lui fallut encore plusieurs années pour épurer la langue archaïque et encombrée dont il venait de se servir et pour atteindre enfin, dans Les Stances (1899), à un véritable classicisme, que son expérience symboliste préservait heureusement des pièges de l’académisme explicatif et didactique. Dans ce dernier recueil, d’une poésie toute païenne d’inspiration, sans mots rares, ni rythmes compliqués, ni métaphysique subtile, apparaît l’âme vraie de Moréas, très différente assurément de l’image assez vaine que pouvait donner de lui l’habitué du café vachette, plastronnant chaque soir au milieu de disciples émerveillés. Les Stances ne furent cependant qu’une belle œuvre sans lendemain et, contrairement aux espérances du doctrinaire du groupe, Charles Maurras, l’« école romane » ne reste qu’un épisode secondaire de la vie littéraire française à la fin du XIXe siècle. Peut-être est-ce déjà cette constatation désabusée qui inspirait à Moréas, quelques jours avant sa mort, cette ultime confidence, faite à Maurice Barrés : « Classiques, romantiques : tout cela, c’est des bêtises ! » Ajoutons qu’on doit encore à Moréas une Iphigénie en Tauride représentée en 1903, un Voyage en Grèce (1897-1898) et de nombreux articles de critique poétique. ♦ «En définitive, M. Jean Moréas est plutôt un auteur difficile. Du moins il n 'est point banal, cet Athénien mignard, épris d'archaïsmes et de nouveautés, qui combine étrangement dans ses vers le pédantisme élégant de la Renaissance, le joli mauvais goût du style rocaille et le vague inquiétant de la poésie décadente. » Anatole France. ♦ « Vous êtes un des seuls aujourd’hui qui idéalisez chaque vers dans sa perfection propre. Tous, comme je l’aime, sont arrêtés, même les plus fugaces; le rythme jamais enfreint. Très chantants, quoique si nets; d’une voix contenue, bizarre et suave. Avec leur allure, leur coloris, comme ils se groupent bien en poème composé suivant le double art pictural et musical, moderne ! Et pas l’ombre de farce ou de chic : un dandysme de goût fort pur. » Mallarmé, lettre à J. M., 1885. Moréas, en un certain sens, est un anachronisme. Il date d’avant notre temps par l’illusion qu’il se fait et le rêve qu’il se construit aux heures propices. Mais il est bien d’aujourd’hui si l’on étudie en lui le raffiné du mot chanteur, du rythme restauré et savant... » É. Verhaeren.

 

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