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MIRACLES ET «MISTÈRES» AU MOYEN ÂGE

MIRACLES ET «MISTÈRES» AU MOYEN ÂGE


Né à l’église et dans l’enceinte même de l’église, dès le IXe siècle, le théâtre ne conquerra son autonomie, en France, qu’assez tard au cours du Moyen Âge. Lorsque la messe, qui est déjà une sorte de drame liturgique en latin, sera devenu inintelligible pour le peuple, les prêtres s’aviseront de faire représenter devant l’autel, en « langue vulgaire », des scènes assez brèves, liées aux fêtes successives de l’année (Noël et Pâques particulièrement). Puis, vers le XIIe siècle, ces premiers jeux dramatiques tendent à faire intervenir déjà quelques épisodes profanes ; aussi bien les tréteaux sortent-ils de l’église pour s’adosser désormais au grand portail, cependant que prêtres réguliers et séculiers cèdent la place, le plus souvent, à des confréries laïques. À ces «jeux » (Jeu d'Adam, anonyme, XIIe siècle ;Jeu de saint Nicolas de Jean Bodel d’Arras, début du XIIIe siècle, en l’honneur du patron des écoliers), succéderont dès le XIVe siècle des miracles (tel Le Miracle de Théophile, adapté par Rutebeuf) en général terminés par une apparition de la Vierge.
Au XVe siècle, le théâtre religieux va prendre une extension rapide et surprenante avec la vogue des mystères (ou mieux : « mistères », du latin ministerium, office) qui mettent en scène les épisodes de l’Ancien et surtout du Nouveau Testament. Joués par les « Confréries de la Passion » (celle de Paris détiendra le premier et - longtemps - le seul théâtre permanent), les « mistères » nécessitent parfois plusieurs jours de représentations, avec la collaboration de la ville tout entière. Ces spectacles reposent en général sur une même matière, mais sans cesse renouvelée : la passion du Christ. Les deux plus justement célèbres de ces Passions sont celle, émouvante, d’Arnoul Gréban (1450) et celle de Jean Michel (1486) qui fait largement appel aux épisodes comiques ou pittoresques et mêle, parfois trop volontiers, le profane au divin. C’est de l’abus d’un tel mélange, alors jugé blasphématoire sur le plan moral, et plus encore discordant sur le plan esthétique, que mourra le théâtre des Confréries de la Passion ; celle de Paris (qui d’ailleurs abandonne de plus en plus les thèmes religieux) survivra pourtant à la Renaissance et ne sera officiellement supprimée qu’en 1676 par ordre du roi Louis XIV.


■ Œuvres - En poche : G. Cohen, La Grande Clarté du Moyen Âge (coll. Idées). - Autres : Anthologie du drame liturgique en France au Moyen Âge, textes et trad. en français moderne, éd. par G. Cohen (Le Cerf, 1955).

■ Critique - G. Cohen, Etudes d'histoire du théâtre en France au Moyen Âge et à la Renaissance (Gallimard, 1956). - H. Rey-Flaud, Le Cercle magique. Essai sur le théâtre en rond au Moyen Âge (Gallimard, 1973).


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