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métalepse

La métalepse est une variété de métonymie (c’est donc un trope). La tradition a en effet, assez curieusement d’ailleurs, affecté une dénomination spécifique à l’un des rapports sémantiques possibles, parmi d’autres qui restent dépourvus de toute appellation contrôlée, dans le mécanisme général de la métonymie. Il s’agit ici d’une manipulation sur le jeu avant-après, antécédent-conséquent, préalable-résultat. C’est en cela que la métalepse s’apparente à l’articulation souvent désignée de sens prégnant. On qualifie un terme d’une indication (sous la forme d’un verbe, d’un adjectif, ou d’un complément caractérisant quelconque) qui «en réalité» ne lui est légitimement affectable qu’à un stade ultérieur (ou antérieur) du processus.

Soit les deux vers de Valéry (Fragments du Narcisse) :

Mon cœur jette aux échos l’éclat des noms divins! et Et quels événements étinceler dans l’œil!

Dans le premier vers, on a au moins deux métalepses (sans préjudice d’autres tropes mêlés, essentiellement une métonymie de l’organe pour le sentiment et une métonymie-synecdoque de la partie pour le tout). On traduira donc approximativement ainsi : «moi, poussé par l’intensité de mes sentiments, je vais jeter» des noms divins « dont la profération suscitera ensuite en écho un bruit éclatant ». Semblablement, c’est bien sûr la réaction à des événements forcément immédiatement précédents qui produit après coup un reflet dans l’œil, à titre de résultat d’une réalité autre qui, elle, n’étincelle pas.

Une limite de la métalepse peut être illustrée dans le début du Bateau ivre :

Je ne me sentis plus guidé par les haleurs : Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles, Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.

Il est certain qu’il faut comprendre nus au sens d’/après les avoir mis nus/. La métalepse strictement rhétorique sur l’adjectif épithète, qui implique l’escamotage de la succession chronologique, s’assortit ici d’une métalepse proprement narrative, qui implique l’escamotage d’une séquence dramatique. Où l’on voit la force et la richesse de la figure.

=> Figure, microstructurale, trope, métonymie, synecdoque.

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