Marx: La religion ou l'opium du peuple
MARX: La religion ou l'opium du peuple
L'aliénation religieuse est le produit de la pauvreté réelle des hommes
Marx reconnaît avec Feuerbach que la critique de la religion est la présupposition de toute critique, mais il reproche à ce dernier de concevoir l'homme comme « une essence abstraite, blottie hors du monde ». L'homme, c'est avant tout « le monde de l'homme », « l'État », « la société ». Dans la Critique de la philosophie du droit de Hegel, Marx montre que la religion est « la conscience inversée du monde », parce que le monde de l'homme, l'État, la société sont eux-mêmes « un monde à l'envers ». Si la religion est « la réalisation fantastique de l'être humain », c'est parce que « l'être humain ne possède pas de vraie réalité ». Autrement dit, l'aliénation religieuse est le produit de la pauvreté effective de l'homme : « La détresse religieuse est, pour une part, l'expression de la détresse réelle et, pour une autre, la protestation contre la détresse réelle. La religion est le soupir de la créature opprimée, l'âme d'un monde sans coeur, comme elle est l'esprit de conditions sociales d'où l'esprit est exclu. Elle est l'opium du peuple. » Aliéné économiquement, exploité socialement, l'homme réalise de manière fantastique son essence dans un monde imaginaire.
Seule la transformation révolutionnaire de la société pourra mettre fin à l'illusion religieuse
C'est pourquoi lutter contre la religion, c'est « indirectement lutter contre ce monde-là dont la religion est l'arôme spirituel ». Supprimer l'illusion religieuse, c'est donc exiger le bonheur réel. Dépouiller « les chaînes des fleurs imaginaires », c'est du même coup inviter l'homme à rejeter « les chaînes » et cueillir « les fleurs vivantes ». Plus fondamentalement, détruire les illusions de l'homme, c'est le rendre à sa vraie réalité « pour qu'il pense, agisse, façonne sa réalité comme un homme sans illusions parvenu à l'âge de raison, pour qu'il gravite autour de lui-même, c'est-à-dire de son soleil réel ». C'est donc d'une véritable « révolution copernicienne » qu'il s'agit : passer de la religion, « soleil illusoire qui gravite autour de l'homme » à l'homme qui gravite « autour de lui-même ». Pour Marx, il s'agit donc d'aller plus loin que la simple critique de la religion : il faut aller jusqu'à la transformation révolutionnaire de la société...