MARITAIN (Jacques)
MARITAIN (Jacques). Philosophe, homme politique et diplomate français (1882-1973). D'abord amené au spiritualisme et à la foi catholique par Bergson, il critiqua âprement ce philosophe, qu'il jugeait anti-intellectualiste et s'attacha à la philosophie thomiste, à laquelle il donna une expression nouvelle. Il s'est ensuite tourné vers les problèmes contemporains (droits de l'homme, progrès temporel, art, culture, etc.) ; c'est l'un des représentants éminents de la «philosophie chrétienne» au XXe siècle.
Philosophe français néo-thomiste. S'inspirant de la Somme théologique de saint Thomas d’Aquin, il s'efforce de se situer entre le rationalisme positiviste du début du XXe siècle et l'antiintellectualisme de Bergson. En ce qui concerne les problèmes de la connaissance, il s'appuie sur le réalisme thomiste en tenant compte des aspects physico-mathématiques de la pensée scientifique moderne. Il étudie les degrés du savoir rationnel puis le savoir supra-rationnel avec l'expérience mystique. L'humanisme chrétien qu'il défend à la lumière des pensées d'Aristote et de Thomas d'Aquin contient l'affirmation de la primauté de l'esprit, notamment dans la construction d'une démocratie nouvelle.
Œuvres principales : Distinguer pour unir (1932) ; Humanisme intégral (1936) ; Court Traité de l’existence et de l’existant (1947).
MARITAIN Jacques. Écrivain et philosophe français. Né a Paris le 18 novembre 1882, mort le 28 avril 1973 à Toulouse (Haute-Garonne). Il était issu d’une illustre famille politique. Sa mère était en effet la fille de Jules Favre, l’un des fondateurs de la IIIe République. Il fit ses études à Paris à la Faculté des Lettres et des Sciences où il obtint le grade de licencié ès sciences et de licencié ès sciences naturelles. Puis il se tourna vers la philosophie et fut un élève assidu de Bergson. Il prépara l’agrégation dans cette discipline, à laquelle il fut reçu en 1905. L’année précédente, il avait épousé Raïssa Oumanoff, une jeune juive russe, qui devait avoir sur sa vie et sur son évolution spirituelle une influence profonde et positive. En effet, Jacques Maritain, qui avait été élevé dans la tradition protestante, mais qui avait fait preuve, dans sa jeunesse, d’un agnosticisme inquiet, fit la connaissance, en même temps que sa femme et que Véra, la sœur de celle-ci, de Léon Bloy, l’illustre polémiste catholique : « Un jeune homme et sa jeune femme s’offrent tout à coup, expriment leur ambition de se rendre utiles, de devenir nos amis », écrira Léon Bloy à la date du 20 juin 1905 de son Journal. Par la fougue de sa foi intransigeante, Bloy séduit les jeunes gens en quête d’un maître spirituel et tous les trois se font baptiser le 11 juin 1906, date capitale dans la vie de Jacques Maritain et décidant de sa carrière future de philosophe catholique, moment que Léon Bloy consigne dans son Journal avec émotion : « Me voilà parrain de ces trois êtres, amis de Dieu, conquis par mes livres... Leur bonne volonté, leur amoureuse candeur sont inexprimables... C’est une de ces journées qui durent la vie éternelle. » Désormais et jusqu’à sa mort, Jacques Maritain est engage dans une fidélité constante à la tradition catholique que lui révèle, dès 1908, la lecture des œuvres de saint Thomas d’Aquin. Entre le christianisme et la philosophie, Jacques Maritain découvre un lien, une complicité dont il n’avait pas encore pris conscience et qu’il ne cessera de développer dans son enseignement et dans ses ouvrages. Il devient professeur de philosophie dans des établissements religieux, au Collège Stanislas de 1912 à 1914 et de 1915 à 1916, à l’institut catholique en 1914, et au Petit Séminaire de Versailles de 1916 à 1917. Plus tard, il enseignera à Toronto, au Canada, en 1933, et à Princeton, aux USA, de 1941 à 1942 et de 1948 à 1960, sans oublier son passage à l’Université de Columbia de 1941 à 1944. Il avait alors publié : Frontières de la poésie (1926), Distinguer pour unir ou les degrés du savoir (1932). Son itinéraire spirituel, métaphysique et philosophique, avait cependant, à cette même époque, trouvé sa synthèse dans des ouvrages dont les seuls titres montrent bien les influences subies et les refus affirmés : Art et scolastique (1920), Humanisme intégral (1936). À l’image de son maître et parrain, Léon Bloy, Jacques Maritain voit dans saint Thomas d’Aquin un apôtre des temps modernes, mais se montre en revanche très réservé sur les influences que subit le catholicisme. Il écrit alors son ouvrage Trois Réformateurs : Luther, Descartes, Rousseau (1925). A cette date, il suscite la conversion de Jean Cocteau. Jacques Maritain écrit encore Christianisme et démocratie (1945), sans renier la tradition catholique au sein d’une sorte d’existentialisme chrétien (Court Traité de l'existence et de l'existant, 1947). Ce qu’il nomme Principes d'une politique humaniste (1945) s’applique tout naturellement à l’esprit créateur de l’homme et c’est pourquoi Jacques Maritain écrit en 1955 un essai intitulé l’intuition créatrice dans l’art et la poésie, intuition qui ne saurait s’affranchir de Dieu. Ce philosophe chrétien qui ne transigeait pas sur la doctrine et dont les combats séduisirent plus d’un écrivain catholique, à commencer par François Mauriac, fut nommé ambassadeur auprès du Saint-Siège de 1945 à 1948. Mais il prit ses distances à l’égard du concile Vatican II, bien qu’il fût l’ami du pape Paul VI, son traducteur en langue italienne. En 1966, il publia un ouvrage, Le Paysan de la Garonne où il témoignait de son hostilité à l’égard des changements trop brusques survenus dans les rites de l’Église. Son dernier ouvrage, L'Église du Verbe incarné (1971), confirmait la volonté de Jacques Maritain de ne pas céder sur la tradition, essentielle à ses yeux à la survie de l’Eglise et du christianisme en général. Lui-même devait donner l’exemple de sa fidélité de plus d’un demi-siècle à l’Église catholique et de son désintérêt pour le monde temporel, dont les changements lui paraissaient pernicieux, en se retirant jusqu’à sa mort chez les Frères de Jésus, à Toulouse, sous le nom de frère Charles de Jésus.
MARITAIN Raïssa. Ecrivain français. Née le 12 septembre 1883 en Russie, morte le 4 novembre 1960 à Paris. Son influence sur son époux, Jacques Maritain, a été fort importante. C’est elle qui lui fit connaître en 1908 les œuvres de saint Thomas d’Aquin et elle assuma auprès de lui une présence mystique de très grand style, comme en témoignent ses poèmes et ses œuvres en prose. On lui doit notamment : Les Grandes Amitiés (1941), les Aventures de la grâce (1944) — ses deux ouvrages réunis en un seul volume en 1949 — et, en collaboration avec son époux De la vie d'oraison (1947), Liturgie et contemplation (posth. 1969). Son Journal a été publié après sa mort, en 1964, par les soins de Jacques Maritain.