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Mamardachvili

Mamardachvili

(Merab, 1930-1990.) Philosophe d’origine géorgienne. Professeur à l’université de Moscou, il est victime de diverses mesures d'intimidation de la part du régime soviétique, et ce n'est qu'avec la « perestroïka » de M. Gorbatchev qu’il retrouve notamment le droit de se rendre à l’étranger. Il est pourtant sincèrement marxiste, mais précisément hostile aux simplifications, ce qui définit sa propre « dissidence », et il consacre volontiers ses cours à Descartes (du Cogito, il déduit que s'occuper de philosophie, c'est aussi faire de la politique), Kant ou Proust.

♦ Philosophe de la conscience, c'est de l'intérieur qu’il médite sur le phénomène totalitaire, pour penser dans une confrontation active l'héritage des Lumières et la nature du pouvoir. Ses cours attirent ceux qui tentent d'échapper simultanément aux dogmes officiels et au nationalisme. Affirmant que les fondements de la pensée moderne sont Marx, Nietzsche et Freud (ce qui, dans les années soixante-dix, résonne tout autrement à Moscou qu’en Sorbonne), il entend faire saisir l'écart existant entre les concepts philosophiques et la réalité soviétique, pour appeler à une modification - qu'il prévoit très longue - de cette dernière, en même temps qu'à une renaissance de la pensée en Russie. Ce qui, depuis Lénine s'y affirme comme version « définitive » de la pensée n’est en effet rien de plus à ses yeux qu'une non-pensée, qui a interrompu une lignée comprenant Soloviev, Berdiaev ou Chestov. Indépendamment de ses thèses personnelles et de ses travaux d’épistémologie, la figure de Mamardachvili confirme qu'au xxe siècle, la philosophie peut demeurer, selon ses termes, plus « un destin » qu'« une profession ».

Œuvres : La Pensée empêchée (1991) ; Méditations cartésiennes (1997).