MAISTRE (comte Joseph de)
MAISTRE (comte Joseph de), homme politique, écrivain et philosophe français (Chambéry 1753-Turin 1821). Il fit des études de droit à Turin, fut membre du Sénat de Savoie (1774). On le retrouve ministre de Sardaigne à Pétersbourg, où il se lia avec Alexandre Ier. Il y composa ses grands ouvrages, dont l'Essai sur le principe générateur des constitutions politiques (1808), Examen de la philosophie de Bacon (1826). Il fut, avec Bonald, l'adversaire le plus passionné de la Révolution française et du XVIIIe siècle. A la raison chère aux philosophes et aux idéologues, il oppose le sens commun, la foi, l'intuition de la conscience intellectuelle. Sa philosophie de l'histoire, fondée sur la volonté divine, la Providence, se rapproche de celle de Bossuet. On lui doit en outre une précieuse et spirituelle Correspondance, publiée de 1884 à 1886.
MAISTRE Joseph, comte de. Ecrivain et philosophe français. Né à Chambéry (Savoie) le 1er avril 1753, mort à Turin le 20 février 1821. Son père était président du sénat de Pavie. Ayant reçu une savante instruction, Joseph entre, dès l’âge de vingt ans, dans la magistrature. Elevé dans le christianisme et n’ayant probablement jamais cessé d’être chrétien, on le voit pourtant, dans sa jeunesse, céder au prestige de la philosophie du siècle, et même, en dépit des condamnations pontificales, rester pendant quinze ans adepte de la franc-maçonnerie — Mémoire sur la franc-maçonnerie (1782). Il entre bientôt en relation avec les illuministes de Lyon, et particulièrement avec le « philosophe inconnu », Claude de Saint-Martin, qui aura certainement une influence sur sa conception providentialiste de la Révolution. Maistre salue un instant les débuts de celle-ci. Il en est déjà désabusé lorsqu’en 1793 l’invasion de la Savoie par les armées de la Convention le force à se retirer à Lausanne, où il va jouer un rôle d’observateur politique de son souverain, auquel il reste fidèle. C’est là qu’il fait ses débuts de polémiste contre-révolutionnaire avec les Lettres d’un royaliste savoisien à ses compatriotes (1793), l'Etude sur la souveraineté (1794-96), et qu’en 1797 il publie anonymement ses Considérations sur la France. En 1803, le roi Charles-Emmanuel l’envoie comme ambassadeur en Russie; il y souffrira, toujours avec une admirable dignité, de la ladrerie de son souverain et surtout de la solitude, car les siens sont restés en Europe. En marge de ses occupations diplomatiques, il fournit un immense travail dont il ne publie encore, en 1810, que l'Essai sur le principe générateur des constitutions politiques . Après la chute de Napoléon, Maistre, trop compromis avec les jésuites qu’on venait d’expulser en Russie, doit rentrer à Turin. Nommé ministre d’Etat, il entretient de nombreux rapports avec l’opinion ultra-royaliste française, en particulier avec de Bonald et le jeune abbé de Lamennais. Déçu par la Restauration, effrayé des progrès du libéralisme, il fait paraître en 1819 Du pape, écrit en Russie, où il désigne le Saint-Siège comme la souveraineté par excellence, seule capable d’arrêter la Révolution et de modérer l’arbitraire des princes; le même esprit lui dicte, en 1821, son traité De l’Eglise gallicane. Les Soirées de Saint-Pétersbourg, synthèse, sous forme d’entretiens, de sa philosophie de la Providence, ne paraîtront que quelques mois après sa mort, provoquée par une paralysie lente. En 1822 parurent les Lettres à un gentilhomme russe sur l’inquisition espagnole. « Il faut absolument tuer l’esprit du XVIIIe siècle », écrit Joseph de Maistre. Aussi, avec une belle hardiesse, oppose-t-il, au rationalisme des « lumières », la réalité de l’ordre surnaturel, dans sa figure la plus totale : le gouvernement universel de la Providence. Ainsi la Révolution : en ses aspects immédiats, elle est destructive, nuisible, « satanique » dit Maistre, et il faut la combattre. Pourtant, plus profondément, elle obéit à un plan providentiel; la preuve en est qu’elle ne peut s’expliquer humainement, les hommes qui paraissent la mener, si falots sous leurs attitudes et leur verbiage, étant bien plutôt menés par elle, par un chef d’orchestre clandestin : Dieu. C’est Dieu qui, en paraissant mettre tout à bas, édifie à longue échéance en rappelant la France, par ce châtiment nécessaire, à sa mission chrétienne. Quelles furent les erreurs de la France ? La légèreté, le relâchement des mœurs de la fin de l’Ancien Régime, certes; mais plus encore d’avoir voulu une constitution écrite, ce qui suppose qu’une constitution peut être valable pour tous les temps et pour tous les hommes, sans considération de leur milieu et de leur passé collectif. Le meilleur pour la France est donc de revenir à la monarchie traditionnelle. Mais celle-ci n’aura de force qu’autant que, rejetant le gallicanisme, elle s’unira à Rome, clef de voûte de tout l’édifice politique et religieux. Comme Bossuet, Maistre ne propose donc d’autre contrepoids à l’absolutisme que la religion; mais, contre Bossuet, il affirme le droit effectif du Souverain Pontife à modérer les souverains, à les déposer éventuellement et, en fait, à diriger politiquement l’Europe. Dans l’immédiat, Maistre a sans doute échoué. Mais, en appuyant sur la fragilité de la construction issue de la Révolution, il obligeait ses adversaires eux-mêmes à entreprendre une tâche positive — et Comte s’est souvenu de Maistre, qu'il admirait. Premier critique d’envergure des idées de 89, Maistre est aussi l’initiateur de l’école contre-révolutionnaire, du premier Lamennais à Veuillot, Léon Bloy et Maurras. C’est enfin un écrivain de premier plan qui a su donner à sa doctrine de style médiéval, à sa sévère logique scolastique, le brillant de la raillerie et de l’esprit, l’attrait d’un paradoxe irrésistible. Ennemi de Voltaire, il lui devait quelque chose au moins : le style.
♦ « On ne peut plus méconnaître en lui un philosophe politique de premier ordre, un de ceux qui, en nous éclairant sur l’esprit d’organisation des anciennes sociétés, donnent le plus à penser sur la destinée et l’organisation future des sociétés modernes. » Sainte-Beuve. ♦ « Il a eu, le premier, l’idée d’une physique politique et sociale. » Auguste Comte. ♦ « Un Voltaire retourné... » Edmond Scherer.
Maistre, Joseph, comte de (Chambéry 1753-Turin 1821); théoricien et homme politique sarde.
M. suit l’enseignement des jésuites avant de faire carrière dans la magistrature savoyarde. Il entre en 1787 au sénat de Savoie sur les traces de son père qui en fut président. Après l’invasion de la Savoie par les armées révolutionnaires en 1792, il s’exile en Suisse où il fréquente le salon de Mme de Staël, en Sardaigne et enfin, à partir de 1803, à Saint-Pétersbourg où il représente son prince pendant quatorze ans. Les ouvrages publiés durant cet exil (en 1796, Considérations sur la France, en 1814, Essai sur le principe générateur des constitutions politiques, les Soirées de Saint-Pétersbourg et De la souveraineté n’ayant eu qu’une édition posthume), critiques polémiques des principes de la « satanique » Révolution française et de la philosophie des Lumières, fondent sa réputation d’essayiste contre-révolutionnaire et de théoricien de la réaction traditionaliste, dont il est avec Bonald le principal représentant. Il rentre à Turin en 1817 avec le titre de ministre d’Etat et de président de la Cour de justice du royaume de Piémont-Sardaigne. Le défenseur de l’absolutisme se fait alors, dans ses ouvrages tardifs, Du Pape (1819), De l'Eglise gallicane (1821) et les Lettres sur L'inquisition espagnole, l’apologète du catholicisme ultramontain.
Bibliographie : R. Triomphe, Joseph de Maistre : étude sur la vie et la doctrine d’un matérialiste mystique, Genève, 1968.
Homme politique sarde et écrivain français. Après avoir publié des pamphlets antirévolutionnaires destinés au grand public, il révéla son génie de penseur et d'écrivain dans ses Considérations sur la Révolution française (1796), où il montrait dans la Révolution un événement catastrophique et providentiel qui débordait toutes les perspectives humaines. Envoyé extraordinaire de la Sardaigne à Saint- Pétersbourg en 1802, il resta pendant quinze ans en Russie, où il composa ses grands ouvrages : Essai sur le principe générateur des constitutions politiques (1809, publié en 1814) et Les Soirées de Saint-Pétersbourg ou Entretiens sur le gouvernement temporel de la Providence (publié en 1821). Rappelé au Piémont en 1817, il y rédigea son livre Du pape (1819), une apologie de la théocratie pontificale, au spirituel comme au temporel, qui fit de lui un des grands inspirateurs de l'ultramontanisme du XIXe s.
MAISTRE, Joseph, comte de (Chambéry, 1753-Turin, 1821). Homme politique, écrivain et philosophe français. Favorable à la monarchie et défenseur de l'autorité pontificale, il fut le théoricien catholique de la Restauration, influençant particulièrement les ultras royalistes. Adversaire résolu de la Révolution, il émigra successivement en Suisse, en Sardaigne puis à Saint-Pétersbourg, où il fut le ministre plénipotentiaire du roi Charles-Emmanuel IV de Sardaigne. Ses principaux livres furent Considérations sur la France (1796) où étaient annoncés le retour du roi et la régénération morale de la France et Du pape (1819) où l'auteur défendait l'autorité spirituelle du Saint-Siège. Voir Bonald (Louis de).