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Maine de Biran: Attention

Attention

• « J’appelle attention ce degré de l’effort supérieur à celui qui constitue l’état de veille des divers sens externes et les rend simplement aptes à percevoir ou à représenter confusément les objets qui viennent les frapper. Le degré supérieur dont il s’agit est déterminé par une volonté positive et expresse qui s’applique à rendre plus distincte une perception d’abord confuse » (E, 352). A cette confusion s’oppose donc la clarté représentative de l’attention.

•• L’attention est un effort de la volonté appliquée aux « sensations représentatives déjà coordonnées dans l’espace et le temps » qu’elle s’attache à distinguer, éclaircir, ordonner. « Le pouvoir de l’attention consiste donc à fixer les organes mobiles à volonté, comme l’ouïe, le toucher, sur l’objet présent » et à rendre son intuition plus claire (E, 354). Chacun fait facilement la différence entre sentir et odorer (odorat actif), goûter et savourer (goût actif), plus encore entre voir et regarder (vision active), écouter et entendre (audition active), sentir passivement (tact) et toucher activement : comment aurions-nous seulement l’idée claire d’un corps étranger hors de nous comme de l’espace qui le constitue sans le toucher actif ? Celui-ci nous signale l’existence d’une force étrangère par « la représentation d’étendue tactile associée au surcroît d’inertie ou de résistance invincible que l’individu ne peut ni attribuer à ses organes, ni sentir comme le résultat direct de son effort » (E, 375). Se fixer sur l’objet, telle est la tâche de l’attention dont le travail est uniquement de mieux représenter l’objet présent. Etre fixé par l’objet voilà le résultat de l’attention car le sujet ne s’y aperçoit plus que dans le résultat perceptif de son acte : « Accoutumés et nécessités par notre nature d’êtres sentants à diriger sur eux {les objets extérieurs) toute notre attention, nous finissons par leur attribuer ce qui nous appartient en propre, et même jusqu’à l’action qui nous les soumet » (E, 234).

••• L’attention est la faculté symétrique de la réflexion. A l’occasion d’une perception quelconque, la réflexion ramène le sujet à l’acte qui la crée tandis que l’attention fait que le sujet s’oublie dans le résultat perceptif. Il entre donc nécessairement de la passivité dans l’attention : elle réside dans l’oubli de l’activité du sujet. A la présence objective et représentable de l’objet fait face la durée irreprésentable et subjective, mais première, du sujet. A l’oubli du sujet répond la mémoire de ses actes en quoi consiste sa personnalité.

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