LYCURGUE
LYCURGUE. 1. Fils de Dry as et roi des Edoniens, en Thrace. Lorsque le tout jeune Dionysos vint chercher refuge dans le pays, avec ses nourrices, Lycurgue le repoussa, chassant le dieu et ses suivantes avec un aiguillon et les accusant de répandre des croyances immorales. Dionysos sauta alors dans la mer, où Thétis le recueillit et les Néréides l’abritèrent. Lycurgue captura aussi les nourrices de Dionysos, ou les Ménades de son cortège, mais il en fut bien puni. D’après Homère, Zeus le rendit aveugle et lui réserva une fin rapide. Selon d’autres traditions, il fut frappé de folie, tandis que les femmes emprisonnées étaient miraculeusement délivrées ; Dionysos revint et enivra Lycurgue, si bien que celui-ci ne reconnut pas sa propre mère et tenta de la violer. Lorsqu’il comprit qui elle était, il alla dans la campagne et se mit à abattre tout le vignoble avec une hache. Il tua en même temps son fils, Dryas, prenant les jambes de l’enfant pour des pieds de vigne. A la suite de ces crimes, la Thrace fut frappée de famine et un oracle indiqua que le seul moyen d’en délivrer le pays était de mettre Lycurgue à mort. Celui-ci fut alors lié et conduit sur le mont Pangée, où des chevaux sauvages le dévorèrent. Dans d’autres versions, il met lui-même fin à ses jours; ou encore, il tue sa femme et son fils, puis Dionysos le châtie en l’exposant aux panthères du mont Rhodope.
2. Roi de Némée.
3. Roi d’Arcadie et fils d’Aléos. Lorsque ses frères, Céphée et Amphidamos, prirent la mer sur l'Argo, Lycurgue resta en Arcadie et succéda à leur père sur le trône. Lycurgue tua, dans un défilé, le roi Areithoos, dont l’énorme massue de fer ne put le sauver. Il donna par la suite l’armure d’Areithoos à son écuyer, Ereuthalion. Comme le fils de Lycurgue, Ancée, avait été tué par le sanglier de Calydon, ce fut son neveu Echémos, le fils de Céphée, qui lui succéda. Lycurgue passe quelquefois pour lé père de Iasos, lui-même père d’Atalante.
Lycurgue, législateur de Sparte. La personnalité autant que l’œuvre qu’on lui attribue, et même son existence, sont très discutées Certains voient en lui un homme qui a existé et qui a donné une partie des lois de Sparte, ou auquel on en a simplement donné la paternité ; d’autres pensent que c’était un prêtre ; beaucoup doutent de son existence et en font un héros ou une divinité. Ce qui semble acquis c’est que, s’il a eu une existence réelle, Lycurgue n’a jamais pu être le créateur d’une constitution qui ne fut appliquée que plusieurs siècles après sa mort. C’est sans doute après quelques hésitations que les réformateurs qui, à l’instigation de l’éphore Chilon au début du vie s. av. J.-C., imposèrent à Sparte sa nouvelle constitution, placèrent celle-ci sous le nom de Lycurgue, après l’avoir d’abord attribuée aux deux premiers rois de Sparte et à Apollon. C’est d’ailleurs auprès de l’oracle de ce dieu, à Delphes, que Lycurgue alla, selon la légende, chercher une sanction de sa réforme. Ainsi, selon la tradition la mieux établie, il vécut au IXe s. av. J.-C. Il appartenait à la branche royale des Proclides et était fils de Prytanis, ou plutôt d’Eunomus, qui eut un fils, Polydecte, d’une première femme, et Lycurgue d’un second mariage avec Dianassa. Polydecte fut roi et, à sa mort, sa femme, qui était enceinte, proposa à Lycurgue de faire périr l’enfant afin que lui-même soit roi. On découvre là la légende qui veut montrer la vertu de Lycurgue : celui-ci fait semblant d’accepter pour que la reine ne tue pas l’enfant et, dès qu’il naît, il le présente à l’assemblée pour le déclarer roi, lui-même se contentant d’assumer la régence. Afin de ne pas être accusé de vouloir faire mourir le jeune roi, il part pour la Crète, où il rencontre Thalétas de Gortyne et étudie les lois de Minos avec ce poète législateur. De là, il se rend naturellement en Égypte (comme Solon, Pythagore, Platon...), puis il va en Ionie, où il découvre les poésies d’Homère et les fait connaître aux Grecs. De retour dans sa patrie, où il a aussi amené Thalétas, il trouve ses concitoyens en proie à la discorde et qui lui demandent des lois. Il va consulter à plusieurs reprises l’oracle de Delphes et, enfin, celui-ci l’ayant assuré qu’il établirait à Sparte le meilleur des gouvernements, il donne à sa cité sa nouvelle constitution, qu’il aurait empruntée en partie aux « tables de Minos ». Sous prétexte d’aller consulter l’oracle, il fait jurer aux Spartiates qu’ils conserveront ses lois jusqu’à son retour et, après avoir fait confirmer la perfection de ses lois par l’oracle, il se laisse mourir de faim. Les Spartiates lui vouaient un culte.
Lycurgue, orateur (Athènes v. 396-323 av. J.-C.). Disciple de Platon et élève d’Isocrate, il participa activement au gouvernement. Adversaire des Macédoniens, il se rangeait aux côtés de Démosthène, mais avec plus de modération. Sa vertu, son honnêteté et son habileté lui valurent l’estime de ses concitoyens et même de ses adversaires, à tel point que, tandis qu’Alexandre le Grand soumettait l’Asie, le régent Antipatros lui laissa le gouvernement d’Athènes. Il avait le titre de trésorier du revenu public (tamias tês koinés prosodou), sorte de surintendance des finances, qui lui permit de remplir le trésor, de reconstruire la flotte et d’élaborer un vaste programme de construction. D’autre part, il réorganisa la jeunesse, officialisa l'institution de l’éphébie et se présenta comme un utile censeur des mœurs.
LYCURGUE. Homme d'Etat et orateur grec. Il naquit à Athènes quelques années avant Démosthène, probablement vers l’an 390 av. J.-C. Il appartenait à une très ancienne et très illustre famille, celle des Etéoboutades qui faisait remonter son origine au dieu Poséidon. Son père se nommait Lycophron mais nous ne savons rien de lui. Lycurgue fut d’abord élève de Platon, puis d'Isocrate. Si l’influence platonicienne se discerne difficilement dans son œuvre, celle de l’enseignement d'Isocrate, même si l’on se refuse à le reconnaître dans son inspiration élevée et dans sa morale sévère, est évidente dans son éloquence. L’école platonicienne renforça peut-être en lui l’admiration pour la Sparte oligarchique, admiration traditionnelle dans l’aristocratie athénienne : il approuvait pleinement et appliquait l’idéal Spartiate de l’asservissement de l’individu à l’Etat ; dans sa vie même, par sa discipline morale, il observait des règles d’une sévérité toute lacédémonienne. Au cours de la lutte contre la Macédoine, il soutint et aida le parti des patriotes, qui n’admettaient aucun compromis avec l’ennemi ; et quand, après la funeste bataille de Chéronée (338 av. J.-C.), Athènes rassembla toutes ses énergies pour résister jusqu’à l’extrême limite, Lycurgue fut l’âme de cette œuvre de résurrection. Elu à la charge de ministère des Finances et des Travaux publics, il releva les finances de l’Etat, que l’effort de guerre et la politique démagogique de son prédécesseur avaient terriblement appauvries. Il accomplit un travail admirable pendant les douze années qu’il assuma cette charge, veillant aux besoins immédiats de la cité mais pourvoyant également à son embellissement; il donna des soins particuliers au culte et à l’art dramatique qui dépendait de sa charge. Aucune disposition naturelle ne le portait vers l’éloquence qu’il ne commença à exercer qu’après la bataille de Chéronée et son élévation à son nouveau poste ; il ne possédait pas le don de l’improvisation, ressemblant en cela à Démosthène dont il partageait l’idéal. Une volonté tenace associée à un grand esprit de sacrifice, une application acharnée, un sens du devoir intransigeant, un patriotisme ardent, un impérieux besoin de dénoncer ceux qui portaient préjudice à la patrie, en firent un orateur : orateur judiciaire assumant surtout la partie de l’accusateur, inflexible, ce qui fit dire de lui ce qu’on disait de Dracon, qu’il trempait son roseau non dans l’encre mais dans le sang. Il n’y a pas lieu de s’étonner si, parmi les dix têtes réclamées aux Athéniens par Alexandre dès son accession au trône, après la destruction de Thèbes, celle de Lycurgue était comprise. Cette honte fut épargnée à Athènes grâce à l’intervention de Phocion et à la clémence du vainqueur. Les ennemis pourtant ne manquaient pas à Lycurgue dans Athènes même. Plusieurs fois traîné en justice, il fut toujours absous. Malade et se sentant mourir, il se fit transporter dans le temple de Cybèle et de là au siège du Sénat pour rendre compte de son administration, réussissant à réfuter les calomnies de son accusateur, Ménésaichmos, son successeur à la direction des Finances. Ramené chez lui, il ferma les yeux paisiblement (324 av. J.-C.) échappant ainsi a la douleur d’assister à la ruine de sa patrie et à l’écroulement de son idéal. Il reçut les honneurs publics et fut enterré aux frais de l’Etat dans le Céramique, parmi les citoyens ayant mérité de la patrie. Le même accusateur qui l’avait contraint presque mourant à venir rendre des comptes, après sa mort traîna ses fils en justice, prétextant qu’il avait trouvé dans le trésor public un déficit dont l’administration précédente était responsable ; il les fit condamner à une amende; ne pouvant pas la payer ils furent jetés en prison. Démosthène et Hypéride, compagnons de lutte de Lycurgue, intervinrent en leur faveur et les firent libérer. Lorsqu’en 307 av. J.-C., la cité fut libérée de la domination de Démétrios de Phalère grâce à Poliorcète et retrouva un gouvernement démocratique, un hommage fut rendu à la mémoire de Lycurgue; l’orateur Stratoclés fit voter par le peuple un décret, qui nous est parvenu, rendant hommage à ses vertus civiques et envisageant de lui élever une statue de bronze sur l’agora, d’accorder à son fils aîné et aux aînés des générations suivantes leur entretien au Prytanée aux frais de l’Etat, d’inscrire sur des stèles de marbre exposées ensuite au public, toutes les lois et tous les décrets élaborés par lui. Lycurgue avait composé quinze discours, postérieurs tous à la bataille de Chéronée, des apologies de sa propre administration, des discours ayant trait à des questions religieuses et des accusations publiques, qui présentaient un grand intérêt du point de vue politique. Les œuvres de Lycurgue ne sont connues que par des mentions. Il ne nous est parvenu que le discours Contre Léocrate .
Lycurgue (v. 750 av. J.-C.) ; législateur légendaire de Sparte.
Avec Solon, L. est le plus célèbre des législateurs grecs. Pourtant dès l’Antiquité, on mettait en doute son existence : la biographie de Plutarque souligne les contradictions de la tradition en ce qui concerne la durée de la vie et l’action de cet homme auquel on attribue depuis le début du Ve siècle (Hérodote est le premier à le mentionner) la « constitution » originale de l'État lacédémonien. Du dieu Apollon consulté à Delphes, L. avait reçu la rhètra (loi), un oracle qui définit les cadres de fonctionnement de la cité (répartition des citoyens en tribus et obai (cantons ? unités militaires ?), fixe les pouvoirs des deux rois, de la Gerousia (conseil des Anciens) et des « Pairs » (homoioi, citoyens Spartiates adultes). En outre, Plutarque attribue à L. un nouveau partage des terres pour effacer toute inégalité entre Spartiates. Cet ensemble de réformes qui aurait mis fin à de mauvaises lois est complété par L. : il bannit de la cité la monnaie d’or et d’argent, impose à tous une vie austère symbolisée par l’obligation du repas pris en commun, réglemente l’éducation - l'agôgè - du jeune Spartiate (fille et garçon) et son mariage. Sa personnalité divise les historiens : les uns le situent à la fin du IXe siècle ; d’autres au VIe siècle ; d’autres encore voient en lui un personnage légendaire qui porte le nom d’un « dieu-loup » ou d’un dieu « chasse-loup ». En réalité, cette organisation résulte d’une longue évolution interne - amorcée dès la deuxième moitié du viie siècle - à laquelle se sont ajoutées tardivement des considérations touchant la cité égalitaire idéale qu’incarne Sparte. Bibliographie : P. Roussel, Sparte, 1960.
♦ « Personne parmi les Grecs n’ignore que vous avez accordé à Lycurgue, de son vivant, une considération qui allait à l’extrême; de toutes les accusations portées contre lui par ses envieux, jamais vous n’en avez trouvé une seule justifiée; et vous aviez en lui une telle confiance, vous l’estimiez, entre tous, si dévoué au peuple, que souvent vous jugiez de la justice d’une cause sur la parole seule de Lycurgue et ce garant vous suffisait. » Lettre attribuée à Démosthème. ♦ «L’éloquence de Lycurgue use partout de l’amplification, elle a de l’élévation, de la gravité; c’est foncièrement celle d’un justicier, ami de la vérité et de la franchise; elle est dépourvue d’élégance et de channe, mais impérieuse. » Denys d’Halicamasse. ♦ « C’est un homme d’un autre âge, hanté par le souvenir d’un passé depuis longtemps aboli qu’il a la vaine ambition de restaurer, en un mot un représentant attardé de la vieille aristocratie athénienne. » F. Durrbach.
LYCURGUE. Législateur légendaire de Sparte dont on ne sait rien de précis, pas même les dates de sa vie. Dans la tradition la plus courante, d'origine royale, il aurait vécu à la fin du ixe siècle av. J.-C. Créateur de la plupart des institutions de Sparte, il aurait fait jurer à ses concitoyens de ne rien changer à ses lois.