LIBERTÉ
LIBERTÉ (lat. "libertas", "condition de l'homme libre"). Gén. La liberté au sens primitif s'oppose à l'esclavage et se définit alors négativement comme absence de contrainte extérieure. On appelle ordinairement liberté physique le fait d'agir sans entrave ou de suivre spontanément les lois correspondant à sa nature propre comme le fait une plante qui se développe sans tuteur. Appliquée à l'homme, cette expression semble inadéquate sauf à désigner strictement la possibilité matérielle de faire. Car, pour qu'un homme soit libre, il faut non seulement qu'il puisse matériellement, mais encore qu'il veuille : l'homme peut toujours s'interdire à lui-même de faire ce qu'il peut faire.
Mor. État d'un être qui se décide après réflexion, en connaissance de cause, qu'il fasse le bien ou le mal. La liberté, au sens moral, caractérise l'homme en tant qu'être responsable. Ainsi, Kant distingue la volonté libre, qui suppose que celui qui agit sait ce qu'il veut et agit conformément à des raisons qu'il approuve, et l'arbitraire, qui ne suppose pas l'existence de la raison. La liberté morale est donc autonomie, obéissance à la loi de la raison (pouvoir de se déterminer par soi-même) et non soumission aux penchants de la sensibilité». Cependant, la liberté semble ici se confondre avec la raison. Descartes, au contraire, considérait que la liberté se manifeste déjà dans tout acte de choisir, distinguant ainsi la liberté éclairée (qui sait ce qu'elle veut) de la liberté d'indifférence (définie comme l'indétermination de la volonté relativement à ses objets). On peut toujours choisir entre deux solutions alors même qu'on est indifférent. Pour Descartes, la liberté n'est donc pas toujours responsabilité, mais d'abord libre arbitre qui, en son plus bas degré, se définit comme simple puissance d'agir sans aucune raison ou sans autre cause que l'existence même de cette puissance de choisir arbitrairement.
LIBERTÉ. n. f. 1° Liberté externe : pouvoir d'agir, de n'être pas prisonnier ou entravé par des contraintes. Indépendance au sens large.
2° Liberté politique ou civique : ensemble des droits dont jouit un citoyen ; ce qu'il a légalement le droit de faire; ce qui n'est pas interdit (liberté de pensée, liberté d'association, liberté de réunion, liberté d'entreprendre, bref tout ce qu'on appelle les libertés de l'individu).
3° Liberté psychologique ou morale : capacité d'agir consciemment, en échappant aux déterminismes par la connaissance et la volonté ; capacité de choisir entre diverses possibilités, d'exercer son libre arbitre. Ce troisième sens du mot liberté pose de nombreux problèmes sur lesquels les hommes, penseurs professionnels ou non, n'ont cessé de philosopher : qu'est-ce qu'être vraiment libre ? Ne confond-on pas l'illusion d'être libre avec la liberté effective (en étant inconscients de certains déterminismes)? La vraie liberté est-elle de suivre ses désirs, ses volontés spontanées, ou de leur résister au nom d'une morale supérieure, d'un idéal du moi? La liberté est-elle une donnée de la condition humaine, ou un état que la conscience doit conquérir pour se choisir un sens, en luttant contre les déterminations naturelles ou socio-idéologiques qui conditionnent l'être humain ? «La liberté n'est pas un droit, mais un devoir» écrit précisément le philosophe Berdiaev (1874-1948). Cela donne à penser.
Pour l'opinion, la liberté apparaît comme le pouvoir de faire ce que l'on veut, l'absence de contrainte. Toutefois, cette conception est insuffisante, ne serait-ce que si l'on tient compte des imperfections de notre nature. La présence d'autrui est également une limite irréductible qui dément cette première définition simpliste. Par ailleurs, elle nous conduit à confondre liberté et désir alors que, paradoxalement, être libre implique aussi de faire le contraire de ce à quoi une inclination immédiate nous incite. Sous ce rapport par exemple, nous ne nous enfuyons pas du cabinet du dentiste alors que notre désir" premier est bien de céder à cette tentation. Pour éviter ces confusions, on peut caractériser la liberté comme la possibilité d'agir selon des choix éclairés par la connaissance et la raison. En effet, la liberté implique de poser un acte (elle s'éprouve dans l'action et pas dans la simple projection de ce que nous ferions à la place d'un autre). La liberté de cet acte sera proportionnelle à l'extension des possibles qui nous sont offerts et que la connaissance, ainsi que l'usage de notre raison, nous conduit à départager de manière autonome. En conséquence, être libre, c'est agir et penser par soi-même, en toute connaissance de cause, sans être la proie d'un penchant ou d'une puissance étrangère.
LIBERTÉ NATURELLE ET LIBERTÉ CIVILE
On appelle liberté naturelle le libre exercice de notre puissance. Or, si chacun ne peut pas faire (ne doit pas faire) tout ce qu'il peut faire (tout ce qu'il est matériellement capable de faire), c'est que le libre usage de la force conduit à l'état de guerre. La situation où tout homme exerce sa liberté naturelle sans rencontrer d'autres bornes que les forces extérieures qui s'y opposent s'appelle l'anarchie. La liberté du désir, ou licence, est une liberté toujours inquiète qui risque sans cesse d'être entravée par la puissance d'autres désirs. C'est pourquoi la vraie liberté est la liberté civile garantie par la loi qui en régit l'usage, et non la liberté menacée par les puissances qui la bornent. Elle ne peut se définir comme absence de loi, ce qui serait contradictoire avec l'existence même d'une société, mais simplement comme absence de contraintes jugées illégitimes. Ma liberté est celle de tout être raisonnable : elle est celle du citoyen, et s'exerce dans le cadre des lois qui ont pour but de défendre les droits universels. La limitation de la liberté naturelle est ainsi la condition d'exercice de la liberté civile des hommes Vitalisme en société.
Libertés politiques
Ensemble des libertés garanties par l'autorité politique à l'individu. On y distingue des libertés négatives (correspondant à la non-ingérence d'autrui dans une sphère de droits inaliénables) et des libertés positives (correspondant à la capacité de participer pleinement à l'autodétermination de la communauté politique).