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LEVINAS (vie et oeuvre)

Emmanuel Lévinas est, parmi les grands penseurs de ce siècle, celui qui a le plus médité sur la morale. C'est elle, et elle seule, qui fonde l'humanisme de l'homme. Elle ne dérive pas de la connaissance du vérité, mais d'une responsabilité envers autrui qui doit engager toute notre existence.
Philosophe d'origine lituanienne, il a vécu en France à partir de 1923. Influencé par Husserl, qu'il révèle au public français en 1930 (Théorie de l'intuition dans la phénoménologie de Husserl), il en retient pour sa part la méthode des analyses intentionnelles. Mais son contact précoce avec la tradition talmudique l'amène aussi à centrer sa méditation sur la présence (le visage) de l’autre : expérience fondamentale en dehors de laquelle il ne pourrait exister de signification. Dès lors, Levinas interprète la métaphysique comme « transcendance vers l'autre » et, dans un débat où il prend le contre-pied de Heidegger auquel il reproche d'accorder trop de poids à une relation abstraite avec l'être, la privilégie sur l'ontologie, parce qu'elle ouvrirait sur une expérience de l'infini en plaçant, avant l'ontologie, l'éthique.
Œuvres principales : De l’existence à l’existant (1947) ; En découvrant l’existence avec Husserl et Heidegger (1949) ; Totalité et infini (1962) ; Quatre Lectures talmudiques (1968) ; Humanisme de l’autre homme (1972) ; Ethique et infini (1981) ; Dieu qui vient à l’idée (1982).
VIE
Emmanuel Lévinas est né en 1905 à Kovno, en Lituanie, dans une famille juive , bourgeoise. Il apprend l'hébreu, étudie la Bible, fait ses études secondaires dans un lycée russe. C'est à l'âge de dix-huit ans qu'il entreprend de partir en France pour y suivre un enseignement de philosophie.
Emmanuel Lévinas, après avoir étudié à Strasbourg, à Fribourg (1928-1929), auprès de Husserl et de Heidegger, décide de s'installer définitivement en France et d'écrire son œuvre en français. Il est naturalisé en 1930, date à laquelle il soutient sa thèse sur Husserl. Mobilisé en 1939, fait prisonnier en 1940, il passe toute la guerre en Allemagne. En 1946, il devient directeur de l'École normale israélite orientale de Paris, puis sera successivement professeur à l'Université de Poitiers (1961), de Nanterre (1967), à la Sorbonne (1973). Il sera nommé professeur honoraire en 1976.
OEUVRES
L'éthique doit toujours prévaloir sur l'ontologie. La sacralité des rites, des mystères, ne peut jamais remplacer, ici et maintenant, l'acte de bonté. Il s'agit, et ce de façon inconditionnelle, de toujours chercher à venir au secours de l'homme.
Totalité et infini (1961)
Lévinas, dans ce livre, défend la subjectivité. Il oppose à une philosophie mettant en avant l'idée d'Être, de totalité, l'exigence morale qui consiste à vouloir la parole, c'est-à-dire la paix. Bien que l'homme soit un Être fini, il peut néanmoins concevoir l'idée d'infini. Où en trouve-t-il une incarnation? Dans le visage d'autrui. Ce visage, fragile, sans défense, me révèle «la nudité de l'ouverture du transcendant». Il m'enseigne la valeur du prochain, laquelle doit l'emporter sur mon égoïsme naturel. «C'est seulement en abordant autrui que j'assiste à moi-même», dit Lévinas.
Difficile Liberté (1963)
Il s'agit d'un recueil d'essais qui portent la marque de la catastrophe nazie. Se référant aux textes traditionnels, la Bible et le Talmud, Lévinas s'efforce de montrer que l'essentiel est de prendre conscience des devoirs qui incombent à chacun, face à autrui. Cette prise de conscience est la voie la plus sûre menant à la compréhension et l'amour de Dieu.
Autrement qu'être ou au-delà de l'Essence (1974)
L'homme libre, l'homme responsable, l'homme qui saisit en sa chair et en son esprit ce que signifie la notion d'humanité , est cet homme qui a compris que le «moi» véritable consiste en ceci: «ne pas pouvoir se dérober». Ma responsabilité envers et pour autrui est totale. L'homme est essence, l'Être ensemble c'est pourquoi il lui faut comprendre qu'il est essentiellement «l'Être à part de l'autre de l'Être». Seul je ne suis rien. C'est l'autre qui me prouve que j'existe que je suis ce que je suis. Cette évidence première conduit Lévinas à considérer que le rapport à au doit être le fondement l'éthique, en tant qu'elle s'ouvre sur ce qu'il y a de plus infini en l'homme c'est-à-dire lui-même. En tant qu'être de conscience l'homme est en soi une totalité, qui, comprenant l'essence même de la moral touche du doigt l'infini celui qu'il perçoit dans le visage d'autrui.
Lévinas sera à la fois le témoin de la révolution communiste et des exactions commises par les nazis. Sa famille, demeurée en Lituanie, sera presque entièrement exterminée par les Allemands. C'est grâce à un certain nombre de soutiens que son épouse pourra échapper aux autorités françaises de Vichy, ainsi qu'aux lois antisémites établies par l'occupant.
Comme bien d'autres penseurs, Emmanuel Lévinas sera obligé de reconsidérer nombre de questions relatives à la nature humaine, au progrès de l'homme, à la morale. Le désastre de la Deuxième Guerre mondiale a mis un terme définitif au bel optimisme des penseurs du siècle des Lumières. D'où cette volonté de la part de Lévinas de se préoccuper essentiellement d'éthique. Elle doit être, à ses yeux, une sainteté qui n'a pas besoin de sacralité pour s'affirmer.
APPORTS
En un siècle qui a eu tendance à oublier la morale au profit de l'individualisme, qui a divinisé l'argent, Emmanuel Lévinas nous rappelle que l'humanité de l'homme est la valeur la plus essentielle.
Un engagement essentiellement humaniste. L'oeuvre de Lévinas est une oeuvre humaniste. Bien des philosophes, par le passé, se sont laissés enfermer dans leur propre système. Lévinas reste proche d'autrui. Il sait que nul être humain ne peut réellement sortir de cette relation à l'autre. Voilà son principal apport: il nous offre une façon concrète de concevoir les rapports humains. Sartre n'a pas pu accomplir une telle prouesse, lui qui ne dit rien, ou peu de choses, sur l'action morale.
Actualité-postérité. Lévinas n'a pas connu la gloire de penseurs tels que Sartre, Raymond Aron. Mais il faut se méfier de la puissance des médias. Elle est devenue le plus souvent trompeuse. Si l'existentialisme sartrien semble ne plus avoir de portée, la réflexion de Lévinas, quant à elle, n'est pas une pure abstraction, mais offre nombre d'outils à l'homme d'aujourd'hui, qui entend vivre sa vie d'homme, c'est-à-dire sa vie d'être humain.
LEVINAS (Emmanuel), philosophe français (Kaunas, Lituanie, 1905). De ses premiers travaux sur la phénoménologie de Husserl (la Théorie de l'intuition dans la phénoménologie de Husserl, 1930), Levinas retient les principes de la « méthode » phénoménologique, qui sont éminemment : 1° une « description » des actes de l'esprit, de son « intentionalité » et de ses affections (de sa « sensibilité ») ; 2° une réflexion à partir du sujet. C'est Levinas qui a révélé en France la philosophie de Heidegger (En découvrant l'existence avec Husserl et Heidegger, 1949). Sa propre philosophie de l'existence, qui est une réflexion sur la plénitude du monde (De l'existence à l'existant, 1947; le Temps et l'autre, 1948), se fonde sur une éthique dont l'expérience fondamentale est celle du regard et du visage d'autrui (Totalité et infini, 1961). On lui doit en outre une série d'essais sur le judaïsme, exposés dans Difficile Liberté (1963).


Philosophe français (1905-1995). • Auteur d’une œuvre dense et rigoureuse, Emmanuel Levinas pose les principes d’une éthique fondée sur la relation à autrui, à travers l’expérience fondamentale du visage. • L’autre, en effet, c’est d’abord un visage qui me transporte au-delà de moi-même, dans l’infini. Or, ce visage est aussi, dans son extrême vulnérabilité, un impératif éthique qui m’interdit toute violence et me contraint, antérieurement à toute reconnaissance, à la responsabilité. Principales œuvres : En découvrant l’existence avec Husserl et Heidegger (1949), Totalité et Infini (1961), Humanisme de l’autre homme (1972), Éthique et Infini (1982).

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