Les individus soumis à l'État - Hegel
Dans les Principes de la philosophie du Droit, Hegel définit l'État comme unité réelle d'une nation. L'État ne résulte pas de la libre association des individus. Au contraire, ceux-ci ne sont libres que s'ils sont soumis à l'autorité d'un État qui seul confère un sens à leur existence.
Problématique
Le but de l'Etat n'est pas de défendre les intérêts individuels. Au contraire, les individus n'existent que par l'Etat. Seule compte en effet l'existence objective et universelle. Or, l'universel n'est accessible que par l'État.
Enjeux
La rationalité de l'Etat réside dans l'union des libertés subjectives qui se déploient dans la liberté objective de l'Etat. Les conditions historiques concrètes des Etats ne nous apprennent rien sur l'essence du concept d'Etat qui seule compte.
Les individus soumis à l'État
Si l'on confond l'État avec la société civile et si on lui donne pour destination la tâche de veiller à la sûreté, d'assurer la protection de la propriété privée et de la liberté personnelle, c'est l'intérêt des individus comme tels qui est le but final en vue duquel ils se sont unis et il s'ensuit qu'il est laissé au bon vouloir de chacun de devenir membre de l'État. Mais l'État a un tout autre rapport avec l'individu ; étant donné que l'État est Esprit objectif, l'individu ne peut avoir lui-même de vérité, une existence objective et une vie éthique que s'il est membre de l'État. L'union en tant que telle est elle-même le véritable contenu et le véritable but, car les individus ont pour destination de mener une vie universelle ; les autres formes de leur satisfaction, de leur activité et de leur conduite ont cet élément substantiel et universel pour point de départ et pour résultat. Considérée abstraitement, la rationalité consiste en général dans l'union intime de l'universalité et de la singularité. Considérée concrètement, comme c'est le cas ici, elle consiste, quant à son contenu, dans l'unité de la liberté objective, c'est-à-dire de la volonté substantielle générale et de la liberté subjective, en tant que savoir individuel et volonté cherchant à réaliser ses buts particuliers - et pour cette raison, quant à sa forme, elle consiste dans une façon d'agir se déterminant selon des lois et des principes pensés, c'est-à-dire universels. - Cette Idée est l'être éternel et nécessaire en soi et pour soi de l'Esprit. On peut sans doute se poser plusieurs questions au sujet de l'État : par exemple, celle des origines historiques de l'État en général ou de tel ou tel État particulier, de ses droits et de ses déterminations. [...] Mais ce sont là des questions qui ne concernent pas l'idée de l'État elle-même. [...] La recherche philosophique n'a affaire qu'à ce qui est intérieur à toutes ces manifestations phénoménales, au concept pensé.
- universel : caractéristique commune à tous les éléments d'un ensemble, et qui seule leur donne un sens.
- société civile : l'ensemble des individus qui vivent sous l'autorité de l'État. Elle est le système dans lequel se déploient la production et la consommation des biens, où toutes les activités sont en situation d'influences réciproques et donc de contradiction.
- État : il est la "raison réalisée". "De même que la société civile ordonne les activités individuelles et familiales, l'Etat, comme rationalité en acte, organise la société civile. [...] Produit de l'histoire, il présente l'ordre de l'Esprit dans son actualité". F. Châtelet, article sur Hegel dans Histoire de la Philosophie, 1973.
- esprit : approximativement, on peut dire que l'esprit est la réalité dans ses aspects logiques (esprit objectif) ou son reflet dans la pensée humaine (esprit subjectif). L'histoire du monde, de la nature et de la conscience humaine sont des figures de l'évolution de l'Esprit.