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Le modèle de développement asiatique s'oppose aux recettes néo-libérales

Le modèle de développement asiatique s'oppose aux recettes néo-libérales   La croissance quasi-miraculeuse de certains pays d'Asie orientale (Corée du Sud, Taïwan, Singapour, et plus récemment Thaïlande - bien qu'ébranlée très sévèrement par une crise financière et monétaire en 1997 -, Indonésie, Fédération de Malaisie et quelques autres) attire depuis de nombreuses années l'attention de ceux qui s'intéressent au développement économique. Il est impossible d'étudier la réussite économique de ces "nouveaux tigres" d'Asie sans être frappé par le contraste qui existe entre la politique économique qu'ils appliquent et les recettes néo-libérales que le FMI (Fonds monétaire international) et la Banque mondiale essaient d'imposer à tous les pays en développement. Cela fut particulièrement mis en lumière lors du séminaire de Tokyo sur les stratégies de croissance, organisé conjointement par le FMI et L'Institut des politiques budgétaires et monétaire du ministère des Finances du Japon, en mai 1997. D'après la publication bimensuelle du FMI (FMI Bulletin) du 30 juin 1997 qui résume dans un article de première page les débats qui ont eu lieu, les hauts fonctionnaires japonais présents à ce séminaire ont été unanimes à soutenir que "les stratégies de développement fondées sur le marché ne sont pas la meilleure solution pour de nombreuses économies en développement". "Pourquoi le FMI ne recommande-t-il pas d'appliquer des politiques industrielles interventionnistes comme celles qui semblent avoir si bien réussi en Asie?" ont demandé, rapporte le FMI Bulletin, de hauts responsables et d'éminents universitaires japonais. Ils ont été appuyés par des hauts fonctionnaires malaisiens (la Malaisie jouissant d'un taux de croissance d'environ 9 % par an depuis plus d'une décennie) selon lesquels "nombre de pays d'Asie orientale [...] sont parvenus à rétablir la situation économique [...] en privilégiant une politique industrielle interventionniste (accompagnée d'une) libéralisation progressive des marchés". On constate une évolution similaire dans le dernier Rapport de la Banque mondiale intitulé précisément Le rôle de l'État dans un monde changeant. Ainsi, dans l'introduction, les rédacteurs rejettent-ils la théorie de l'"État minimal", constatant que ce point de vue extrême est en contradiction avec "ce que l'expérience des réussites en matière de développement économique nous enseigne, que ce soit l'expérience des économies développées au siècle dernier ou celle des "miracles" de croissance de l'après-guerre en Asie orientale". Les commentaires de l'OCDE vont dans le même sens (d'une reconnaissance à contrecoeur de l'efficacité des modèles interventionnistes de développement appliqués en Asie); ils apparaissent dans une rubrique nouvelle intitulée "Économies dynamiques d'Asie et Chine" qui semble désormais devoir faire partie de la publication semestrielle Perspectives économiques de l'OCDE. Dans la livraison de juin 1997 de cette publication (qui nous avait habitués à des éloges dithyrambiques du laisser-faire, et à des condamnations sans nuance de toute mesure interventionniste), les experts de l'OCDE décrivent sans le moindre reproche - les mesures de sélectivité et d'encadrement du crédit prises depuis un an pour réduire l'inflation dans plusieurs de ces économies si vigoureuses. Il n'est pas inutile de rappeler que lorsqu'on fait appel uniquement à la hausse des taux d'intérêt pour ralentir une économie qui s'emballe et qui risque une inflation excessive, il s'ensuit une série d'effets secondaires qu'il est parfaitement légitime de vouloir éviter. Il se produit habituellement une entrée plus ou moins massive de capitaux flottants (qui viennent profiter des taux d'intérêt plus élevés); cela provoque une hausse du taux de change qui peut détériorer la compétitivité des exportations. Ensuite, par une hausse des taux d'intérêt, on oriente le crédit bancaire vers ceux qui acceptent de payer les taux d'intérêt les plus élevés. Or, l'on sait que ces derniers sont souvent des spéculateurs et pas nécessairement ceux qui ont les projets d'investissement les plus utiles pour l'économie nationale. C'est pour éviter tous ces effets indésirables liés à l'utilisation des taux d'intérêt comme arme exclusive contre la surchauffe que, selon l'OCDE, "le resserrement de la politique monétaire s'est fait [dans ces pays] essentiellement par un relèvement des taux d'intérêt conjugué à des mesures de contrôle direct. Parmi ces dernières, les plus importantes ont été l'augmentation des réserves obligatoires sur les comptes des non-résidents et les restrictions des prêts pour des projets non prioritaires".

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