La Reine morte d'Henry de MONTHERLANT, 1942

• C'est avec cette pièce en trois actes et en prose que Montherlant, déjà connu comme romancier et essayiste, s'est imposé à l'attention comme dramaturge. L'action, inspirée d'une oeuvre espagnole du xviie siècle, se déroule au Portugal au xive siècle. • Le vieux roi Ferrante désire, pour le salut de son royaume, faire épouser la fière infante de Navarre à son fils Pedro dont il redoute la médiocrité, mais celui-ci aime une dame de la cour, la douce Inès de Castro, et aspire seulement au bonheur privé (I,3). Découvrant que son fils a déjà contracté un mariage secret avec Inès, Ferrante le jette en prison, cherche à faire annuler le mariage, et enfin prête l'oreille à son ministre Égas Coelho qui l'incite à faire assassiner Inès. La pièce montre comment cet homme intelligent, mais au coeur amer et sec, en viendra à cette extrémité. Bien qu'il éprouve de la sympathie pour Inès au point de lui confier son dégoût du pouvoir, il cédera à sa haine de la vie et à sa peur de paraître faible. Inès, qui est simple et généreuse, refuse de se défier de Ferrante. Pensant l'émouvoir, elle lui annonce qu'elle attend un enfant (III, 6) ; c'est cette confidence qui le décide à poster les assassins : Acte inutile, acte funeste. Mais ma volonté m'aspire, et je commets la faute, sachant que c'en est une (III, 7). Au moment où il justifie publiquement sa décision par la raison d'État, la mort le frappe, lui laissant le temps d'un aveu lucide : J'ai fini de mentir (III, 8). Tout le monde se détourne de lui pour entourer le corps d'Inès. Pedro la couronne reine. • La signification de ce drame tient tout entière dans la chute d'un homme faible sous ses airs de grandeur, et en qui le sens de l'humain est perverti par le pouvoir, l'orgueil et la solitude.