La recherche des centres d’intérêt

Vous venez de terminer la première étape de votre travail qui vous a permis, à partir d'uine approche synthétique de la page, d'en percevoir globalement l'intérêt. Vous pouvez maintenant répondre aux questions d'observation ; celles-ci vous permettent d'entamer une analyse plus approfondie et de rassembler les éléments d'explication qui constitueront le commentaire composé. Celui-ci étant par définition l'étude d'un texte littéraire fondée sur ses aspects les plus frappants, vous allez regrouper vos constatations et vos remarques autour de deux ou trois centres d'intérêt, qui serviront de grilles à de nouvelle : lectures, comparables dans leur démarche à celle, de l'explication linéaire, mais plus «spécialisées » car elles ne concerneront qu'un aspect de la page proprosée.

A - QU’EST-CE QU’UN CENTRE D’INTÉRÊT?

L’habitude s’est établie d’appeler «centres d’intérêt» les thèmes qui parcourent et structurent un texte ; bien que l’expression soit assez générale parce qu elle revêt, suivant le contexte, des sens très différents, on peut la retenir par commodité pour désigner une catégorie à la fois sémantique et formelle présente tout au long du texte et ayant son unité propre. Ainsi le thème de «la merveilleuse promenade» dégage plusieurs centres d’intérêt: l'accession de François Seurel au statut de protagoniste, le mélange poétique de réalité et de mystère, le caractère symbolique de la quête. Étant donné la diversité des textes proposés au Baccalauréat, ces grands centres d'intérêt autour desquels se regrouperont vos remarques sont très variables. Mais vous vous apercevrez très vite que l’on en retrouve fréquemment un certain nombre, soit tributaires du genre (récit, discours, poésie, théâtre), soit plus généraux. En voici quelques-uns : -un élément narratif: portait d'un ou de plusieurs personnages (le peuple, description d’un paysage (la Sologne) ; - un sentiment ou une idée que l’auteur présente directement ou suggère par des moyens détournés (la «barbarie» populaire dans le texte 1 ou l’intuition d’une réalité secrète dans le texte 3) ; - la tonalité d’ensemble (l’atmosphère d’angoisse dans le poème d’Aragon, texte 2); - la composition, souvent révélatrice, comme dans le même texte, ou elle souligne le passage d’une forme d’inspiration à l’autre, ou bien comme dans le texte 1, où elle reprend au fond les mêmes éléments dans un ordre significatif; - l’art de l’écrivain, qu’il n’est pas question de séparer arbitrairement du reste mais sur lequel il convient parfois de mettre l’accent : ce serait par exemple le cas de l’extrait d’Alain-Fournier (texte 3), où l’écriture poétique mime à sa manière le paradis naguère entrevu par Augustin Meaulnes.

B - COMMENT DÉTERMINER LES CENTRES D’INTÉRÊT?

Pour trouver ces centres d’intérêt vous disposez de trois moyens : -l’approche du texte, à l’aide des deux premières lectures, qui vous permet de trouver par induction (c’est-à-dire en remontant, par raisonnement ou par intuition, du particulier au général) les thèmes majeurs qui s’imposent à votre esprit (par exemple le pessimisme de la narration dans le texte 1 ou le caractère musical de l’évocation dans le texte 2) et qui englobent la totalité du sens et de l’intérêt de la page; - l’examen minutieux du texte à l’aide de la 3e lecture qui vous permet d’étudier la situation et les caractéristiques du texte : sa nature, sa structure, les thèmes, le niveau de langue, le lexique, les figures de style, la tonalité; - les questions d’observation qui proposent des premières pistes de réflexion et permettent par leur approfondissement d’élargir l’analyse à d’autres aspects du texte. Par exemple, dans un sujet sur l’incipit du Dernier Jour d'un condamné, de Victor Hugo, la première question est : «Sur quelles oppositions le texte est-il bâti ? » Il s’agit donc ici de repérer les oppositions structurantes de ce début de roman ; la première est temporelle et s’articule autour du présent / imparfait et des adverbes «Autrefois» / «maintenant»; la seconde opposition joue sur la différence de situation du narrateur ; «J’étais libre » /«je suis captif». La réponse à la question d’observation peut s’arrêter à ce relevé, mais cette dimension antithétique, fréquente chez Hugo, vous suggère d’explorer plus avant cette piste et de découvrir ainsi tout un réseau d’oppositions secondaires («lumière» / «nuit», «corps» / «esprit»); celles-ci devront être étudiées dans le commentaire composé. Si, d’autre part, vous n’arrivez pas, même aidé par votre approche du texte et par les questions d’observation, à trouver des axes de recherche, essayez d’aller du plus simple au plus compliqué, en vous interrogeant sur la signification de ce que le lecteur le moins averti peut découvrir (Pourquoi Flaubert accorde-t-il une telle place au sac des Tuileries? Pourquoi le narrateur se rappelle-t-il de façon aussi détaillée sa recherche du domaine mystérieux?), et plus encore sur l’utilisation des techniques propres au genre (Qui «voit» dans le texte 1 ? Pourquoi ce retour à une versification à peu de chose près classique dans le texte 2?).

C - COMMENT EXPLOITER LES CENTRES D’INTÉRÊT?

Une fois définis les centres d’intérêt majeurs, reprenez l’ensemble du texte en vous appuyant tour à tour sur chacun d’eux. On parle souvent à ce propos de coups de projecteur, de meilleurs angles de prise de vue ou encore, pour rester dans le domaine métaphorique*, de coups de filet successifs. Quoi qu’il en soit, une fois que vous aurez, par exemple, mis en lumière dans «la merveilleuse promenade» (texte 3) la transfiguration de la réalité, il vous faudra relire le texte et relever dans l’ordre où ils apparaissent tous les éléments propres à illustrer cette idée. Vous noterez ces remarques, aussi diverses que celles d’une explication suivie, mais à l’intérieur d’un cadre précis, en les accompagnant des mots, des tournures et des phrases qui vous les auront inspirées. Vous aurez intérêt, dans la mesure du possible, à procéder à des regroupements à l’intérieur de chaque thème : ainsi celui de la Belle aux cheveux d’or (texte 2) suggère tout naturellement la sensualité. Le secret du commentaire composé réside dans ce perpétuel va-et-vient entre l’analyse et la synthèse. Enfin n’oubliez pas que les centres d’intérêt déterminés au départ ne sont pas forcément définitifs. L’étude analytique conduit souvent à les changer s’ils se révèlent inefficaces ou à les modifier s’ils ne sont pas en prise directe sur le texte. Ainsi qui aborderait le conte de Maupassant «Le Vieux» (texte 7) comme une illustration de l’objectivité réaliste achopperait très vite sur les aspects caricaturaux de la description que fait l’écrivain du monde paysan.