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LA « NOVLANGUE » DANS 1984 D'ORWELL (1903 - 1950).



« Appendice » sur la « Novlangue » : lien ci-dessus à partir de 10 h 54' 35'' ?



1) « 1984 » d'Orwell : dénonciation des totalitarismes d'extrême gauche et d'extrême droite.

Roman d'anticipation publié en 1949. Roman se déroulant dans le futur du passé cad en 1984. Dystopie. Etat totalitaire d'Océania (ministère de la Vérité, de l'Abondance, de l'Amour, de la Victoire, de la Paix). Propagande d'Etat. Pari unique ANGSOC dirigé par un mystérieux leader à la fois rassurant et sévère : « Big Brother », figure quasi-divine pour une société sans religion. Personne n'a jamais vu BB qui n'existe qu'à travers ses représentations (affiches, statues, messages, etc.) mais « Big Brother is watching you ». Culte de la personnalité. Contrôle permanent de l'Etat. Critique à la fois du communisme et du capitalisme = 2 fascismes selon Orwell.


3 classes sociales d'Océania :
Océania est en guerre perpétuelle contre Eastasia et Eurasia :


Source: https://fr.wikipedia.org/wiki/Eurasia_(1984)#/media/Fichier:1984_fictious_world_map.png


Système de surveillance généralisée (caméra, « télécrans », dénonciation). ». Télécrans à la fois émetteurs (de la propagande du Parti) et capteurs (ils enregistrent en permanence tout ce qui se passe). L'Histoire est constamment réécrite : « mutabilité de l'histoire ». Monde sans mémoire, sans histoire. Falsification du passé, réécriture des articles de journaux pour les rendre conformes au message du Parti. Propagande d'Etat, complet renversement de valeurs : « War is peace », « Freedom is slavery », « Ignorance is strength », « 2 + 2 = 5 », « le noir est blanc » = « double pensée », pouvoir penser en même temps deux pensées contradictoires (négation du principe logique de non-contradiction). De même, le ministère de la Paix (« Minipax ») fait la guerre, le ministère de la Vérité (« Miniver » en Novlangue) créé les mensonges d'Etat, le ministère de l'Amour s'occupe de la torture des opposants, et le ministère de l'Abondance organise la famine de la population.
Contre le « sens commun » (= « common decency » - Orwell). La « Novlangue » et la « Double-pensée » étouffent la capacité des citoyens à raisonner.
Caractéristique de l'Angsoc (parti unique) : désintégration du noyau familial, dénonciation des parents par les enfants. Embrigadement de la jeunesse. Surveillance généralisée. Inhibition de l'amour dans le couple au profit du devoir. Recherche du pouvoir pour le pouvoir. Élimination des opposants politiques. Idéologie, propagande d'Etat. Police de la pensée. Culte de la personnalité. Monopole des médias. Planification économique <= toutes les caractéristiques de l'Etat totalitaire selon Raymond Aron dans « Démocratie et Totalitarisme ».
Définition du totalitarisme : https://databac.fr/totalitaire-totalitarisme/

A ces caractéristiques de l’Etat totalitaire, Orwell ajoute la désignation d’un bouc-émissaire cad une personne qui reçoit les projections négatives des autres membres du groupe. Elle est tenue pour responsable de la frustration du groupe. B.B. institue les « deux minutes de Haine » pendant lesquelles la foule en délire est poussée à insulter un traître, Goldstein, dont on ne saura jamais vraiment s'il est vraiment réel ou juste imaginaire: la société trouve son unité en déversant sa violence vers un ennemi commun. Les « deux minutes de Haine » ont un effet purificateur, cathartique ; en sacrifiant la victime bouc-émissaire, la communauté expulse sa violence et se réconcilie avec elle-même.


2) Résumé du livre



3) LA « Novlangue » : autorité du langage et langage de l'autorité

« Quelle belle chose que la destruction des mots ».
« La révolution sera terminée quand la langue sera parfaite »


« Novlangue » ou « Néoparler » = langue du futur, «la langue officielle de l'Océania»
Peut-on avoir une idée sans être capable de la dire par des mots ? Penser une opinion, c'est pouvoir exprimer cette opinion au moins « dans sa tête ».
Dans « 1984 », la « novlangue » est encore l'affaire de spécialistes et coexiste avec «l'ancilangue», la langue traditionnelle, celle des prolétaires.
« NOVLANGUE » => Langue officielle du parti. Langue comme outil d'endoctrinement. Entreprise de simplification et de raccourcissement du langage = « Nous détruisons chaque jour des mots, des vingtaines de mots, des centaines de mots. Nous taillons le langage jusqu'à l'os. ». Restreindre la capacité de réflexion et d'expression des individus. Le langage est donc corrigé selon 3 modalités : la création de mots orthodoxes, la suppression des mots subversifs et l'abolition de la polysémie du langage. Globalement, le langage est réduit à sa fonction utilitaire.
Exemple : « bon » ; « inbon » pour « mauvais » ; « plusbon » (« excellent », « splendide » ) ; « double-plus bon » (délicieux, succulent). « En résumé, la notion complète du bon et du mauvais sera couverte par six mots seulement, en réalité un seul mot. » (partie I, chapitre 5).

« Double-plus-inbon » = dégoutant.
« plus-colore » = coloré.
« in-colore » = pâle.
« in-clair » = sombre.
« plus-clair » = transparent.

But de la « Novlangue » : « Ne voyez-vous pas que le véritable but de la novlangue est de restreindre les limites de la pensée ? A la fin, nous rendrons littéralement impossible le crime par la pensée car il n'y aura plus de mots pour l'exprimer. ». De moins en moins de mots et le champ de la conscience de plus en plus restreint.
Des dissidents pouvaient dire « Big Brother est inbon » mais ne pouvaient pas argumenter leur opinion.
La suprême orthodoxie est l'inconscience.
S'il y a une police de la pensée en 1984, c'est parce qu'il est encore possible de penser des opinions dissidentes à la ligne du parti.
Le langage ordinaire (« ancilangue » ou « oldspeak ») est dissident. Car il offre trop de liberté à la pensée. But de « Big Brother » est de tarir la source de la dissidence dans le langage. Quand le langage ne permettra plus l'expression d'une pensée dissidente, le « crime de la pensée » deviendra impensable donc informulable. Le pire crime est « le crime par la pensée ». La pensée est criminelle. Le pouvoir doit entraver les corps mais aussi les esprits. Les mots « liberté », « égalité », « démocratie » deviennent en Novlangue des « crimepensée » : « tous les mots groupés autour des concepts de liberté et d'égalité étaient contenus dans le seul mot penséecrime. » (p. 429). « D'innombrables mots comme : honneur, justice, moralité, internationalisme, démocratie, science, religion, avaient simplement cessé d'exister. Quelques mots-couvertures les englobaient et les supprimaient. Ainsi tous les mots groupés autour des concepts de liberté et d'égalité étaient contenus dans le seul mot ''crimepensée'' […] Une plus grande précision était dangereuse. » => impossibilité de distinguer les mots liberté = égalité = justice = moralité. Or le sens des mots réside dans ce qui les différencient.
Les anciens mots de « rationalisme », « objectivité » deviennent en novlangue « anci-pensée ».
Les anciens mots de « sexualité », « plaisir », « amour », « homosexualité » deviennent en Novlangue = « crimesexe ». Inquisition de la pensée.
Le « biensexe » désigne le rapport hétérosexuel sans plaisir et à but procréatif…
Le meilleur moyen de contrôler la pensée d'un groupe, c'est de contrôler son langage.
Les idées dissidentes contre l'ANGSOC ne peuvent s'exprimer que sous forme vague : « Big Brother est inbon ».
Un langage pauvre, c'est une pensée pauvre. Moins le choix des mots est grand, plus la pensée est pauvre : « Comparé au nôtre [ = l'anglais classique], le vocabulaire novlangue était minuscule. On imaginait constamment de nouveaux moyens de le réduire. Il différait, en vérité, de presque tous les autres en ceci qu'il s'appauvrissait chaque année au lieu de s'enrichir. Chaque réduction était un gain puisque, moins le choix est étendu, moindre est la tentation de réfléchir. »

Exemple de « novlangue » contemporaine :
Ne dites plus « licenciement économique » mais « plan de sauvegarde de l'emploi ». Ne parlez plus de « violences policières » mais de « maintien de l'ordre ». Ne parlez plus de « mensonges politiques » mais de « faits alternatifs ». Ne dites plus « pensée contestataires » mais dites « complotisme », etc.

Conclusion :

Orwell nous montre que le pouvoir sur les hommes est déjà un pouvoir sur les mots. Dominez les mots et vous dominerez les hommes. "1984", roman noir qui nous délivre un message par l'absurde, en négatif. Il suffit d'inverser la dystopie pour savoir ce dont une société a besoin pour vivre à savoir: la liberté, la pensée, la mémoire et la fraternité.

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