LA HARPE Jean-François de
LA HARPE Jean-François de. Littérateur français. Né et mort à Paris (20 novembre 1739-11 février 1803). Fils d’un gentilhomme suisse au service de la France, il fut orphelin de bonne heure et recueilli par les sœurs de la charité de la paroisse Saint-André-des-Arts. Admis ensuite comme boursier au collège d’Harcourt, il y fit de brillantes études. D’un naturel assez frondeur, il commit un jour l’imprudence de chansonner l’un de ses maîtres, et dut payer cher cet écart : incarcéré à Bicêtre, puis en d’autres lieux du même genre, il fut contraint d’y passer plusieurs mois sans jamais obtenir la moindre atténuation à sa peine. S’étant cru de bonne heure la vocation d’un poète, il débuta dans les lettres à l’âge de vingt ans par un médiocre recueil de vers intitulé Héroïdes (1759). Trois années plus tard, il donna un second recueil de la même veine : Héroïdes et poésies fugitives (1762). Désireux d’aborder le théâtre, il fit jouer ensuite Warwick (1763), tragédie qui plut à Voltaire. Dès ce jour, il se fit l’élève de ce dernier et chercha tellement à l’imiter qu’il s’attira le surnom de « Singe de Voltaire ». Sans plus attendre, il donna trois autres tragédies qui, toutes, furent de retentissants échecs : Timoléon (1764), Pharamond (1765) et Gustave Wasa (166). Etant allé se consoler à Ferney, il reçut de Voltaire l’accueil le plus amical et, qui mieux est, le conseil de changer son fusil d’épaule, autrement dit de se consacrer à la critique littéraire. Rentré dans la capitale au début de 1768, il se fit admettre au Mercure, y écrivit plusieurs articles de longue haleine, et acquit assez rapidement l’audience des lettrés. Bien qu’il se fît beaucoup d’ennemis par son sectarisme, il s’imposait de plus en plus par des morceaux de bravoure, comme son Eloge d’Henri IV (1770), son Eloge de Fénelon (1771) et son Eloge de Racine (1772). Couronné déjà huit fois par l’Académie Française, il y fut enfin reçu en 1776. Il lui prit envie alors de retourner au théâtre. Au cours des dix années suivantes, il y fit jouer plusieurs tragédies : Menzicoff (1776), Les Barmécides (1778), Jeanne de Naples (1781), Philoctète (1783), Coriolan (1784) et Virginie (1780). Sauf pour Philoctète, il n’obtint qu’un succès d’estime. C’est à partir de 1786 que La Harpe allait réellement donner sa mesure en faisant son cours de littérature dans l’espèce d’établissement fibre que Pilâtre du Rozier venait de fonder à Paris sous le nom de « Lycée », pour l’enseignement des lettres et des sciences. Du jour au lendemain, La Harpe devint la coqueluche de la haute société parisienne. Quand survint la révolution de 1789, il ne s’en fit pas moins le farouche partisan, allant même jusqu’à se coiffer du bonnet rouge pour réciter en public certaine ode à la liberté dont il était l’auteur. Ayant été ensuite arrêté comme suspect (1794), il prit en horreur la Révolution, fit retour sur lui-même et sortit de prison tout confit en dévotion. Ayant repris ses cours au Lycée, il fut proscrit au 18 fructidor, parvint à se cacher à Corbeil et revint à Paris après le 18 brumaire. En 1801, il eut l’imprudence de publier la Correspondance littéraire, recueil de lettres qu’il avait adressées de 1774 à 1791 au grand-duc Paul de Russie, le futur empereur Paul Ier, et qui étaient pleines de jugements assez sévères à l’égard de ses contemporains. De ce fait même, il fut un objet de scandale jusqu’à sa mort. Outre les ouvrages déjà cites, La Harpe traduisit la Vie des Douze Césars de Suétone, Les Lusiades de Camöens, etc. Mais il est surtout célèbre par ses cours professés au Lycée qu’il publia d’ailleurs sous le titre de : Le Lycée (1787-1799).