LA CONSCIENCE - L'INCONSCIENT (panorama de la notion)
Descartes : la conscience est transparente à elle-même
Selon Descartes, «il n’y a rien qui soit entièrement en notre pouvoir que nos pensées» ("Lettre à Reneri pour Pollot", avril ou mai 1638). Autrement dit, la pensée est un domaine dans lequel le moi est maître chez lui.
Il est, par conséquent, impensable que nous puissions éprouver un désir sans en être conscients : «car il est certain que nous ne saurions vouloir aucune chose que nous n’apercevions par même moyen que nous la voulons» (Descartes, "Traité des Passions", article 19 - 1649).
L'.âme et le corps sont conçus par Descartes comme deux substances distinctes (cf. "Principes de la philosophie", I, § 53 - 1644). L’attribut principal de l’âme, celui sans lequel on ne peut pas concevoir une âme ou un esprit, est de penser. «Je ne doute point, écrit Descartes, que l’esprit aussitôt qu’il est infus dans le corps d’un enfant, ne commence à penser, et que dès lors il ne sache qu’il pense, encore qu’il ne se ressouvienne pas après de ce qu’il a pensé» ("Réponses aux quatrièmes objections sur les Méditations", 1641). L’âme pense toujours ; le foetus lui-même pense, dans le ventre de sa mère, et éprouve déjà, quoique confusément, une conscience de lui- même : certes, il n’y poursuit pas des méditations métaphysiques (!), et ses pensées sont fort confuses, car «attachées à la matière» ; mais il pense néanmoins. Car là où il y a une âme, il y a nécessairement pensée et conscience de soi.
Freud : il faut voir dans l'inconscient le fond de toute vie psychique
Conscience, inconscient, refoulement
«Nous assimilons donc le système de l’inconscient, écrit Freud, à une grande antichambre, dans laquelle les tendances psychiques se pressent, tels des êtres vivants. A cette antichambre est attenante une autre pièce, plus étroite, une sorte de salon, dans lequel séjourne la conscience. Mais à l’entrée de l’antichambre, dans le salon veille un gardien qui inspecte chaque tendance psychique, lui impose la censure et l’empêche d’entrer au salon si elle lui déplaît. [...] Lorsque, après avoir pénétré jusqu’au seuil, elles sont renvoyées par le gardien, c’est quelles sont incapables de devenir conscientes : nous disons alors qu’elles sont refoulées» ("Introduction à la psychanalyse", 1916).
La tâche de la psychanalyse :
ramener à la conscience les désirs inconscients
«Que veut le psychanalyste ?», demande Freud. — «Ramener à la surface de la conscience tout ce qui en a été refoulé», répond-il aussitôt ( Cinq leçons sur la psychanalyse, 1910). Ainsi, «l’interprétation des rêves, quand elle n’est pas rendue trop pénible par les résistances du malade, conduit-elle à découvrir les désirs cachés et refoulés, ainsi que les complexes qu’ils entretiennent» (ibid).
L’importance des impressions de l’enfance
Par le rêve, c’est l’enfant qui continue à vivre dans l’homme. Même les désirs devenus inutiles (par exemple, ceux qui sont liés au complexe d’Œdipe) subsistent chez l’homme mûr. Aussi peuvent-ils prêter leur puissance à la formation de symptômes morbides chez le sujet adulte.
C’est qu’inversement, «dans les trois ou quatre premières années de la vie se fixent des impressions et s’établissent des modes de réaction au monde extérieur, qu’aucun événement ultérieur ne peut plus dépouiller de leur force» ( "Un souvenir d'enfance de Léonard de Vinci", 1910).
Sartre : inconscient ou mauvaise foi ?
Contre la «mythologie chosiste de la psychanalyse»
«Freud a scindé en deux la masse psychique. Je suis moi, mais je ne suis pas ça», écrit Sartre dans "l’Être et le Néant" (1943). Aussi, plutôt que de parler d’inconscient, vaut-il mieux déclarer, selon Sartre, que c’est «la conscience [...] qui s’affecte elle-même de mauvaise foi» (ibid).La «mauvaise foi» repose sur une intention première, sur un projet de mauvaise foi. L’homme est de mauvaise foi quand il fuit sa propre liberté et choisit d’être lâche. Il lui faut alors se mentir à lui-même et feindre l’inéluctabilité du choix qu’il adopte.
Le lâche, celui que Sartre nomme le «salaud», réclame, en quelque sorte, le statut de chose. Mais, en réalité, «l’homme, étant condamné à être libre, porte le poids du monde tout entier sur ses épaules. [...] Rien d’étranger n’a décidé de ce que nous ressentons, de ce que nous vivons ou de ce que nous sommes» (ibid).
Résumé : En considérant que l’existence d’une «substance pensante» (= l’âme) constitue la première vérité indubitable de la philosophie, Descartes a affirmé la souveraineté de l’esprit sur la moindre de ses productions et identifié la pensée avec la conscience. Selon Freud, à l’inverse, il est indispensable de cesser de surestimer la conscience pour bien comprendre la vie psychique : l’inconscient constitue d’après lui le fond de toute vie psychique. •
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