Kant: Sublime

• Ce sentiment est éprouvé devant ce qui excède toute forme, présentant la nature comme immensité (sublime mathématique) ou force (sublime dynamique). •• L’imagination, illimitée dans sa capacité d'appréhension successive, est alors confrontée à la limitation de sa compréhension simultanée. Elle affronte ainsi la raison qui unifie dans un tout le monde sensible. À l’accord des facultés éprouvé dans le beau se substitue un désaccord entre la force de l’imagination et l’exigence de la raison. Le sublime est un mode de présentation immédiat et négatif du supra-sensible. Il en résulte un plaisir négatif, car l’harmonie se réalise dans une douleur qui rend possible le plaisir, du fait que la raison et l’imagination ne peuvent s’accorder que dans une tension. ••• À une esthétique du beau, qui est une esthétique classique de la forme, vient s’ajouter une esthétique romantique de l’infini et de l’informe. Présentant le supra-sensible dans l’infinité ou le déchaînement de la nature, le sublime est un sentiment qui nous fait saisir à la fois l’impuissance de notre imagination à donner une représentation adéquate à l’idée de la raison, ainsi que le caractère supra-sensible de notre destination. Il est possible que des choses soient belles sans être sublimes et réciproquement. Kant ouvre ainsi la possibilité d’une esthétique intégrant la laideur ou l’informe. Ce ne sont pas les objets de la nature qui sont sublimes en eux-mêmes, mais les Idées qu’ils éveillent en nous : ni le ciel étoilé, ni le spectacle des éléments déchaînés ne sont en eux-mêmes sublimes, le sublime étant en nous dans l’accord discordant de la raison et de l’imagination, où l’homme se mesure avec la nature afin d’y découvrir sa propre supériorité. C’est pourquoi le sentiment du sublime symbolise le respect que nous avons pour la loi morale et pour notre propre destination supra-sensible.