Kant: Critique
Critique
• Kant conçoit son entreprise comme une critique de la raison pure, visant à déterminer la légitimité des prétentions de celle-ci tant dans le domaine théorique que dans le domaine pratique. •• La critique est conçue comme un tribunal où la raison est à la fois juge et partie. Elle est l’activité de la raison qui, accédant à la conscience de soi, s’assigne à elle-même des limites. Aussi convient-il de distinguer entre des bornes imposées à la raison par une instance extérieure et relevant d’une censure^ et des limites qui ouvrent à la raison l’horizon de son pouvoir légitime. ••• La métaphysique est conçue comme un champ de bataille où s’affrontent dogmatiques et sceptiques. En tant que prétention à une connaissance du supra-sensible par purs concepts, le rationalisme dogmatique transgresse les limites de l’expérience et rend possible l’empirisme sceptique, lorsque la raison découvre la vanité de la démarche dogmatique. La structure du champ de bataille métaphysique est ainsi un cercle vicieux où dogmatisme et scepticisme ne cessent de s’affronter, chacun des partis renaissant des cendres de son adversaire. La critique, qui se donne comme un projet de paix perpétuelle en philosophie, vise à mettre un terme à ce conflit en évaluant le pouvoir de la raison, en décidant de la légitimité de son usage et en lui interdisant de s’aventurer au-delà du champ de l’expérience, tout en assurant la possibilité d’une connaissance a priori et en réfutant l’empirisme. La critique n’est qu’une propédeutique à la métaphysique constituée comme science, se contentant de tracer le plan de la philosophie transcendantale. Elle n’a donc qu’une utilité négative, visant à clarifier et non à étendre le pouvoir de la raison. Toutefois, Kant lui reconnaît une utilité positive car, en limitant le savoir théorique de la raison, elle l’ouvre sur son champ pratique. Tel est le sens de la fameuse formule : « J’ai aboli le savoir pour faire place à la croyance ». Avant Fichte et Marx, Kant découvre le primat de la pratique, le fait qu’il est des problèmes, et au premier chef celui de la liberté humaine, qui n’ont pas de solution théorique, mais seulement pratique.
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