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Jung (Carl, Gustav) (1875-1961)

Psychiatre suisse, assistant de Bleuler à l’hôpital du Burghölzli. Il rencontre Freud en 1906. Très rapidement il devient l’un des élèves principaux de Freud et sera le premier président de l’Association Psychanalytique Internationale lors de sa création en 1910. Mais des différends théoriques apparaîtront, en particulier autour de la notion de libido qui pour Jung ne peut se réduire à la sexualité. Petit à petit, il rejette les autres avancées freudiennes, comme la sexualité infantile, l’Œdipe, l’étiologie sexuelle de la névrose. La notion d’inconscient qu’il développe n’est plus freudienne. Il distingue un inconscient individuel et un inconscient collectif dans lequel se trouvent des archétypes communs à l’humanité. Ses travaux l’orienteront de plus en plus vers la religion et la mystique. Il quitte le mouvement freudien en 1914. Il créera une théorie intitulée «psychologie analytique».




JUNG Carl Gustav. Psychologue et psychiatre suisse. Né le 26 juillet 1875 à Kesswil (canton de Thurgovie), mort le 6 juin 1961 à Küsnacht (près de Zurich). Sa personnalité et ses travaux ont profondément marqué notre époque, même si spécialistes ou grand public ne voient pas très bien la nature et la qualité de ces marques. En effet, pour beaucoup, il apparaît comme l'anti-Freud; pour d'autres comme celui qui, dépassant les limites de sa discipline, s'est aventuré dans des domaines qui, soit ne relevaient pas de sa compétence, soit n'étaient pas à prendre en considération, voire au sérieux. Pour d'autres encore, il demeure franchement insaisissable, donc nié. A l'opposé, certains voient en lui le vrai successeur de Freud, justement dans la mesure où il a osé le dépasser en n'acceptant pas le dogmatisme du père de la psychanalyse; ou bien considèrent que ses incursions d'apparence extra-psychologique dans des secteurs tels que la théologie, l'alchimie, l'ethnologie ou l'astrologie, ont permis à la science de progresser sur son terrain propre autant que dans ses percées prospectives qui ont débouché, par exemple, sur la parapsychologie. Il est remarquable toutefois de constater que la ligne de partage des opinions semble séparer d'un côté les pays germaniques et anglo-saxons, de l'autre les pays latins et en particulier la France. Quant à l'aspect insaisissable de sa personnalité, Jung s'est expliqué lui-même : pour certains êtres, il n'existe pas de catégorie dans laquelle ils puissent entrer; ils doivent alors se créer la leur propre, singulière. S'il s'agit donc d'un homme de science ou d'un artiste, son oeuvre sera puissamment originale, ce qui est le cas. En outre, Jung ne fait rien pour dissiper l'équivoque à son sujet. Il écrit au contraire : « Le langage avec lequel je m'exprime doit être équivoque, voire à double sens, s'il veut tenir compte de la nature de la psyché et de son double aspect. C'est consciemment et à dessein que je recherche l'expression à double sens car, correspondant à la nature de l'être, elle est préférable à l'expression univoque... » Jung fit toutes ses études à Bâle, au Collège et au Gymnase d'abord, puis sa médecine à l'Université. Son examen d'Etat obtenu, il fut nommé en 1900 assistant au Burghözli, asile cantonal d'aliénés et clinique universitaire du canton de Zurich. En 1902, il passe sa thèse de doctorat en médecine sur le sujet : « Contribution à la psychologie et pathologie des phénomènes dits occultes. » En 1902-1903, un séjour à la Salpêtrière à Paris lui permet de suivre l'enseignement de Pierre Janet. Il revient ensuite au Burghözli comme médecin volontaire et effectue ses premiers travaux sur les associations d'idées et élabore sa théorie des complexes. En 1905, il est nommé médecin-chef de l'établissement tandis que, « privat-docent », il donne des cours à la Faculté de Médecine de Zurich. Une anecdote illustre bien la curiosité instinctive et empirique de Jung pendant ses années d'exercice au Burghözli, de même que la liberté d'investigation qui ne le quitta jamais, d'où tout préjugé est absent : « Mes collègues me paraissaient aussi intéressants que les malades; c'est pourquoi, dans les années qui suivirent, j'ai établi une statistique, aussi secrète qu'instructive, sur les conditions héréditaires de mes collègues suisses, tant pour mon édification personnelle que pour comprendre la réaction psychiatrique. » En 1907, Jung publie le résultat de ses recherches : Psychologie de la démence précoce. C'est également à cette époque qu'a lieu sa rencontre avec Freud, à Vienne. Le fameux entretien, qui dura treize heures, mérite d'être placé dans son contexte véritable, c'est-à-dire que la hiérarchie de connaissance et d'expérience des deux savants doit être rééquilibrée par rapport à une relation erronée qui voudrait que l'un avait tout à apprendre de l'autre et ce dernier tout à enseigner au premier. On imagine d'ailleurs assez mal le maître passant tant de temps avec un futur disciple, pour l'heure simple novice en la matière... Jung avait déjà à son actif un passé lourd d'expérimentations, de découvertes et de publications, qu'il s'agisse de ses observations sur les associations verbales normales et pathologiques ou du bilan de ses recherches sur les complexes et la démence précoce. En fait, on voit apparaître en filigrane les fondations de son propre système, autonome, axé sur la réintroduction de l'esprit comme dimension fondamentale de l'être, qui aura pour principale originalité de ne pas représenter précisément un système, mais une sorte de champ ouvert, défriché certes, aux investigations de ses successeurs. Il ne s'agit pas de minimiser l'apport de Freud, qui fut énorme, parce qu'il était lui aussi un génie et l'aîné de l'autre. Mais peu à peu, s'établit entre eux ce qui fut une collaboration fructueuse, à un point tel que Freud n'hésita pas à déclarer : « Je suis plus que jamais convaincu qu'il est l'homme de demain. » Si bien que lorsque fut fondée la Société internationale de psychanalyse en 1911, ce fut Jung qui en devint le président. Mais l'éblouissement réciproque des deux hommes ne tarda pas à tourner en un véritable drame humain. Jung se fit de plus en plus réticent face à la rigidité dogmatique de son aîné et Freud de plus en plus méfiant vis-à-vis de l'orientation prise par les recherches de Jung. En 1912, celui-ci publie Métamorphoses et symboles de la libido , bien que sachant par avance qu'un des chapitres du livre lui « coûterait l'amitié de Freud ». La rupture fut effectivement consommée entre ces deux êtres qui s'estimaient tant. Jung se retrouva isolé, suivi dans son « schisme » par ses collègues Riklin et Maeder. Isolé mais libre, Jung, bien que passant aux yeux de ses détracteurs pour un « mystique », va désormais voler de ses propres ailes. Il entre dans la période de sa vie qu'il appellera plus tard « confrontation avec l'inconscient », véritable exploration intérieure, qui ne fut pas sans danger, mais qui préluda à la genèse de la part véritablement importante de son oeuvre. « Les connaissances qui m'importaient, ou que je recherchais — écrit-il — ne faisaient pas encore partie du patrimoine de la science d'alors. » Et d'ajouter : « Il m'a fallu pour ainsi dire quarante-cinq ans afin d'élaborer et d'inscrire dans le cadre de mon oeuvre scientifique les éléments que j'ai vécus et notés à cette époque de ma vie. » Avec le temps vont se préciser et s'imposer des notions qui, malgré des résistances d'école ou de milieu, sous la forme d'un vocabulaire personnel, acquerront droit de langage — et de cité : notion d'« inconscient collectif », véritable assise commune et archaïque de la psyché, notion d'« archétype » qui « dérive de l'observation, souvent repétée, que les mythes et les contes de la littérature universelle renferment les thèmes bien définis qui reparaissent partout et toujours... », notion d'« individuation », expression employée « pour désigner le processus par lequel un être vivant devient un in-dividu psychologique, c'est-à-dire une unité autonome et indivisible, une totalité », notion du « Soi », archétype central, totalité de l'homme, « non seulement le centre, mais aussi la circonférence complète qui embrasse à la fois conscient et inconscient... », etc. Et à toutes les étapes de ses découvertes, dont Jung tire des conclusions lumineuses mais prudentes, exprimées comme des hypothèses, il ne cesse d'affirmer sa nature d'homme de science, de médecin, sous la formule simple (en complète opposition avec ce qu'on lui reproche) : « Je suis un empiriste. » En 1921-1926, Jung effectue plusieurs voyages d'études en Afrique du Nord, auprès d'indiens Pueblos, en Arizona, au Nouveau-Mexique, chez les Peaux-Rouges et au Kenya. En 1935, est fondée à Zurich la « Schweizerische Gesellschaft für praktische Psychologie und ihre Grenzgebiete », présidée par Jung et réunissant médecins et psychologues de diverses tendances. En 1944, est créée à Bâle à son intention une chaire de « médecine psychologique ». En 1948 est fondé à Zurich l'institut Jung, et en 1958 la Société Internationale de Psychologie Analytique ( pour se démarquer de la Psychanalyse, Jung adoptera successivement le terme de psychologie complexe, puis la désignation susnommée) dont le Dr R. Cahen assumera la présidence pour la section française. De cette oeuvre immense, qui restera un monument de ce siècle, tant par le courant auquel elle a donné naissance que par le nombre d'écrits d'expression allemande que son auteur a laissé, il faut citer les ouvrages suivants, la plupart traduits en français par le Dr Cahen et Yves Le Lay : Types psychologiques (1921), Psychologie et Education [1926], Problèmes de l'âme moderne [1929], Dialectique du moi et de l'inconscient [1933], L'Homme à la découverte de son âme [1934], Psychologie et Religion [1940], Paracelse [1942], Psychologie de l'inconscient [1943], Psychologie et Alchimie [1944], Psychologie du transfert [1946], Symbolique de l'esprit [1946], L'Energétique psychique [1948], Réponse à Job [1952], Métamorphoses de l'âme et ses symboles (1952), Des racines de la conscience [1954], Présent et avenir [1957], Un mythe moderne [1957], Le Secret de la fleur d'or [1957], Ma Vie [1962].

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