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JACOB Max

JACOB Max 1876-1945
Né à Quimper — qu'il mettra en scène, avec quelle virtuosité! dans Le Terrain Bouchaballe, un roman paru en 1922 — il fait d'excellentes études qu'il poursuit à Paris, jusqu'au moment où il . décide d'être peintre. En attendant c'est les petits métiers: professeur de piano, clerc de notaire, employé de commerce. Il s'est un peu frotté à la critique d'art, rencontre (en 1901) Picasso, André Salmon, Apollinaire. Il devient vite un haut personnage de la bohème montmartroise, publie des contes pour enfants (Histoire de Roi Kaboul 1er et du Marmiton Gauvain, 1903; Le Géant de Soleil, 1904), campe au Bateau Lavoir, rue Carignan, où, en 1909, le Christ lui apparaît. C'est la conversion qui, après une seconde apparition et divers ouvrages d'inspiration religieuse, l'amène à se faire baptiser. Il faut noter au passage que la période est féconde en illuminations: Claudel, (en 1886) Miloscz (1914), Valéry (1892) et que la conversion est bien portée: Jammes, Cocteau... Toujours est-il que Jacob publie, en 1917 et à compte d’auteur, Le Cornet à Dés, un recueil de poèmes en prose, forme un peu oubliée qu’il contribue à remettre à l’honneur. Le rythme de sa production s’accélère: gouaches et dessins, romans et fantaisies, poèmes (Le Laboratoire central, 1921; Les Pénitents en Maillot rose, 1925; Ballades, 1938). En 1921, il se retire près de l’abbaye de Saint-Benoit-sur-Loire. Il revient vivre à Paris en 1928 mais retourne à Saint-Benoît peu après pour n’en plus bouger. C’est là que la Gestapo l’arrête comme juif, le 24 février 1944. Il mourra quelques jours plus tard, le 5 mars, au camp de Drancy. Derniers Poèmes en Vers et en Prose paraîtra cette même année 1944, Le Cornet à Dés II, en 1955. L’œuvre de Max Jacob n’a sûrement pas aujourd’hui la considération qu’elle mérite. Il en serait peut-être satisfait, lui qui n’a jamais voulu se prendre au sérieux. Il a pourtant influencé plusieurs générations de poètes qui venaient prendre des «leçons de poésie» au pied de la basilique — et inauguré plusieurs des procédés chers aux surréalistes. C’est qu’il est difficile à suivre, tantôt cocasse, tantôt mystique, parfois simplement sincère et ému, d’autres fois savant, brillant, virtuose, jongleur de mots, manieur de dérision. Toujours est-il que sa poésie, qui a cherché «l’accord des mots, de leur image et de leur appel mutuel et constant», demeure l’une des plus significatives du siècle.
JACOB Max
1876-1944
Poète, né à Quimper. Le grand public n’a commencé à entendre parler de Max Jacob qu’à la Libération, lorsqu’on apprit qu’il était mort au camp de Drancy le 5 mars 1944, quelques jours après son arrestation par la Gestapo. Connu des lettrés dès avant la guerre de 1914, il n’avait pas cherché à augmenter ce cercle étroit d’admirateurs. D’abord peintre (il le restera toujours; et, longtemps, vivra de ses tableaux), puis critique d’art, ami et défenseur des premiers cubistes, il sera de plus, en poésie, un des principaux initiateurs du surréalisme. Initiateur, et non pas simplement précurseur; car pour l’essentiel sa propre voie, royale, magistrale, se poursuivra dans une tout autre direction. Âme profondément religieuse - et sujette aux crises mystiques, même aux apparitions - Max Jacob est d’autre part un écrivain breton (et non pas au sens régionaliste, mais au sens le plus riche et le plus profond du terme). Au demeurant ces deux amours sincères, véritables sources d’inspiration de son œuvre, ont été, tout au long de sa carrière, mises en cause, sinon dénoncées comme de pures et simples impostures. On a tenu pour manifestation d’un zèle patriotique excessif son recueil de poèmes qu’il avait pris la peine de récrire en langue bretonne (La Côte, 1909) ; on riait sous cape, alors, de ses prétentions à la nationalité « celte » (et, par exemple, de son pseudonyme : Morven le Gaélique). Quant à la sincérité de sa foi, n’a-t-il pas lui-même contribué à en faire douter par telle de ses boutades (Vive le pain azyme-boum-boum!) ou encore par tels de ses titres (Les Œuvres burlesques et mystiques de frère Matorel, Défense de Tartuffe, etc.). Après ce qu’on appelle une existence « dissolue », il s’était fait baptiser en 1915 ; mais il poursuivra sa vie mondaine. En 1917, il publie Le Cornet à dés, recueil de poèmes en prose, son chef-d’œuvre ; la préface de ce livre est une défense et illustration du véritable poème, qu’il veut libre (dans sa forme) mais « situé » (dans son caractère, son atmosphère, son ton). Puis il se retire à l’abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire (de 1921 à 1926) où il refuse de sacrifier, au nom de la méditation, sa quête poétique. (Mais, y a-t-il, d’abord, antinomie ? pas pour Max Jacob, à coup sûr.) Paraissent successivement les recueils du Laboratoire central (1921), Les Pénitents en maillot rose (1925), puis, après son retour à Paris, Rivage (1931) et, pour finir, alors qu’il est retourné depuis deux ans à Saint-Benoît, les Ballades qui sont une nouvelle réussite majeure dans le genre difficile entre tous du poème en prose (1938). Ces retours « dans le siècle » suivis de nouvelles retraites, ces éclipses suivies d’illuminations soudaines, ont pu surprendre ; et plus encore, sans doute, l’alternance dans son œuvre d’un vigilant esprit critique avec l’extrême abandon de l’âme croyante à l’enthousiasme, au repentir (par exemple dans Les Visions infernales de 1924). Il arrive même que d’une ligne à l’autre le pathétique se détourne sans crier gare en direction de la fantaisie la plus drolatique, voire la plus discutable (par exemple sur le coq-à-l’âne, le calembour). Réflexe de pudeur; automoquerie d’un qui a peur d’être moqué. En fait, Max Jacob a toujours senti qu’il.n’était accepté nulle part : ni par sa chère province rêveuse et poétique, où il était né cependant ; ni par l’Église qu’il avait choisie, par élan, et avec le sentiment d’une éclatante vocation. La Défense de Tartuffe (1919), où il raconte sa première illumination (onze ans auparavant) et, depuis, son itinéraire spirituel, est un livre bouleversant, par son ton même : ambigu, parfois, et presque pénible. En dépit d’une intelligence aiguë, Max Jacob était resté, pour l’essentiel, léger comme un oiseau, démuni comme un enfant, et de plus ombrageux, indécis, irrationnel. Ses deux premiers livres sont d’ailleurs écrits pour l’enfance, qu’il comprenait si bien (Le Roi Kaboul et le marmiton Gauvain, 1903 ; Le Géant du Soleil, 1904), et une grande partie de son œuvre, au total - même ses chansons bretonnes les plus effrayantes - reste très proche de ce que les psychologues appellent l’« esprit d’enfance » : La Petite Servante, Sourie et Mou-ric, etc. De nombreux inédits ont été rassemblés : les Derniers poèmes en vers et en prose, Le Cornet à dés II, le « cycle » de Morven le Gaélique et en 1970 une anthologie (qui reprend un titre de 1938), Ballades ; sans oublier les Conseils à un jeune poète publiés en 1945, au lendemain de sa mort au camp de Drancy.