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indice

L’indice (ou signe) est évidemment une espèce générale de lieu ; mais on peut plus précisément le considérer comme une catégorie des preuves techniques. Quintilien note que les signes se rapprochent des preuves extra-techniques ; mais ils s’en distinguent en ce qu’ils sont proprement déterminés par l’orateur. Certains sont nécessaires ou sûrs, d’autres douteux. Pour les premiers, c’est ce qui arrive lorsqu’il est absolument nécessaire qu’une chose soit, ou qu ’elle ait été, ou bien au contraire qu ’elle ne soit pas, et qu ’elle n ’ait pas été. Par exemple, il faut nécessairement qu ’une femme qui a accouché ait eu des relations sexuelles avec un homme [l’exemple est antérieur à l’époque des techniques de procréation avancées], ce qui est du temps passé; et qu ’il y ait des vagues sur la mer, quand il fait un grand vent, ce qui est du temps présent; et que meure celui qui est blessé au cœur, ce qui est du temps futur. De même, il est impossible de faire la moisson où l’on n’a pas semé; et qu’une personne soit à Rome, dans le même moment qu’elle est à Athènes; et qu’un homme ait été dangereusement blessé d’un coup d’épée, sans en avoir ni cicatrice ni aucune marque. Certains signes sont réciproques, c’est-à-dire que la présence de l’un entraîne obligatoirement la présence de l’autre, et réciproquement ; certains signes n’entraînent aucune relation de liaison nécessaire avec aucun autre. L’autre classe de signes renferme donc ceux qui ne sont pas nécessaires, les signes douteux. Ils ne suffisent pas pour lever le doute; mais, joints à d’autres preuves, ils ne laissent pas d’avoir beaucoup de force. Ils consistent en une certaine chose qui sert à en désigner une autre : par exemple, du sang répandu qui fait découvrir un meurtrier. Cependant, comme ce sang peut provenir d’une victime que l’on aura égorgée en ce lieu, ou d’un saignement de nez, on ne conclura pas qu ’un homme a commis un meurtre, parce qu ’il a ses habits ensanglantés. Il est donc obligatoire de lier ces sortes de signes à une argumentation plus globale. En général, ces signes sont sujets à interprétation variable selon les deux parties, surtout lorsqu’ils sont pris isolément : d’où l’intérêt, également variable, de les situer dans tout un ensemble plus vaste pour faire apparaître leur plus plausible valeur : par exemple, l’enflure et les taches sur le corps peuvent être regardées comme des marques d’empoisonnement, et aussi bien comme des marques d’allergie ou d’indigestion. Cette seconde catégorie de signes est à utiliser avec la plus extrême prudence, comme avec la plus retorse astuce, selon la position que l’on occupe. En effet, par connexion de proche en proche, on peut aboutir à mettre en relation de dépendance des éléments qui n’en ont réellement aucune entre eux. On risque d’atteindre ainsi deux limites : l’artifice et l’arbitraire absolus dans l’établissement de relations sans fondement, les confins parfois flous et ambigus du météorologique ou du symptomatique et de l’astrologie. Comme on voit, la question précisément rhétorique du signe débouche assez vite sur des enjeux anthropologiques de grande envergure.

=> Orateur; preuve, argument, lieu; réfutation.

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