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Illusions perdues d'Honoré de BALZAC

Illusions perdues d'Honoré de BALZAC, 1837-1843, Le Livre de poche.

• Ce gros roman en trois parties est une des pièces maîtresses de la Comédie humaine (Scènes de la vie de province). Il est bâti sur les destinées parallèles de deux amis aux caractères contrastés et dont la complémentarité et les rapports avec la personnalité de Balzac sont intéressants.

• La première partie, Les Deux poètes (1837), présente les héros à l’aube de leurs illusions, à Angoulême, en 1821. David Séchard vient de prendre la succession de son père, ancien ouvrier illettré, qui lui a cédé à des conditions usuraires l’imprimerie que la Révolution lui a permis d’acquérir. Peu apte aux affaires, David rêve de recherches sur les techniques de la papeterie. Balzac a voulu peindre en lui le génie méconnu, les souffrances de l’inventeur(cf. la troisième partie). Il lui a prêté son propre physique puissant, les formes que donne la nature aux êtres destinés à de grandes luttes éclatantes ou secrètes et les plus hautes qualités d'intelligence et de cœur, le feu continu d’un unique amour, la sagacité du penseur, l'ardente mélancolie d’un esprit qui pouvait embrasser les deux extrémités de l’horizon. Son ami Lucien Chardon contraste avec lui par sa gracieuse élégance de Bacchus indien, mais aussi par son caractère gascon, hardi, brave, aventureux, qui s’exagère le bien et amoindrit le mal, qui ne recule point devant une faute s’il y a profit, et qui se moque du vice s'il s'en fait un marchepied. Poète, il passe à Angoulême pour le second enfant du siècle, et l’ambition le dévore ; mais son père, maintenant décédé, n’était qu’un modeste pharmacien du faubourg de l’Houmeau, et sa mère, dernière survivante de la vieille famille de Rubempré, garde les malades, tandis que sa sœur Ève travaille chez une blanchisseuse en attendant d’épouser David. Lucien abusera souvent du dévouement de ses proches qui l’admirent trop : Je serai le bœuf, il sera l'aigle, pense David. Ses talents valent à Lucien d’être invité chez Mme de Bargeton, la reine d’Angoulême, une femme de trente-six ans, intelligente et belle, dont les brillantes qualités et les richesses cachées sont en train de se transformer en ridicules, par la faute de la vie de province. Elle attend d’être libérée du vieux mari auprès de qui elle s’ennuie. Lucien Chardon, qui, sur ses conseils, se fait appeler de Rubempré, supplante si bien auprès d'elle le baron Sixte du Châtelet, «vieux beau» de quarante-six ans, directeur des contributions indirectes, qu'en septembre 1821, Mme de Bargeton part pour Paris en enlevant son poète.

• La deuxième partie, Un Grand homme de province à Paris (1839), peint Lucien dans le difficile apprentissage de la capitale où Mme de Bargeton l’abandonne, revenant au baron du Châtelet. Il peine d'abord obscurément dans la misère, parmi de jeunes écrivains débutants, puis se tourne vers le journalisme et s’y fait une célébrité. Lié avec le dandy Rastignac qui tient le haut du pavé de la fashion (Le Père Goriot), il se laisse griser par la vie parisienne et se brûle à ses feux en une saison. Moins d’un an après son arrivée, il fuit Paris, couvert de dettes, au lendemain de la mort de l’actrice Coralie, sa maîtresse, ayant en outre compromis par ses indélicatesses la situation financière de David.

• La troisième partie, Les Souffrances de l’inventeur (1843), montre comment David Séchard est victime à la fois de son idéalisme et de ses concurrents, les frères Cointet, qui le dépouillent de ses biens et du profit de ses inventions. Lucien, mesurant sa faiblesse et sa responsabilité dans ce drame, est sur le point de se jeter dans la Charente quand il rencontre l’abbé Carlos Herrera, nouvelle incarnation de Vautrin (Le Père Goriot), qui lui propose un pacte d’association d'homme à démon, d'enfant à diplomate, selon le code de l’ambition. Il reprend son vol pour Paris, tandis que David, abandonnant ses travaux, se retire à la campagne près de Mansle.

• La première et la deuxième partie sont extrêmement brillantes (peinture de l’aristocratie d’Angoulême, satire de la vie parisienne, des milieux de la presse et de la librairie). Si la troisième est alourdie par de longues considérations juridiques et financières, elle est cependant utile à l’équilibre de l’œuvre. La peinture de la destinée de Lucien s'achève dans Splendeurs et misères des courtisanes.

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