Husserl: La Crise des sciences européennes et la phénoménologie transcendantale: La philosophie comme unité du savoir
L'émancipation des sciences par rapport à la philosophie a certes abouti à une efficacité incontestable. Mais elle a aussi eu pour conséquence le morcellement du savoir et un relatif déclin de la raison philosophique, qui se trouve pourtant confrontée à des problèmes nouveaux. La crise des sciences européennes, c'est le constat de leur incapacité à penser certains problèmes, du fait même de leurs a priori méthodologiques.
Problématique
Le positivisme, qui entérine la victoire des sciences particulières et spécialisées, n'est qu'une étape intermédiaire et passagère. La pensée contemporaine devra nécessairement revenir à un questionnement global, tant scientifique qu'éthique, sous l'égide de la raison philosophique.
Enjeux
Le questionnement philosophique repose sur l'exercice de la raison, qui fixe à la fois les critères de la connaissance et l'axe des valeurs morales. La science moderne, en excluant de son questionnement le domaine métaphysique et en privilégiant les faits, constitue une grave menace sur l'avenir de la culture. La conséquence de cet état de fait pourrait se traduire par la mort de la culture européenne.
La philosophie comme unité du savoir
Il n'a pas toujours été vrai que la science comprenne son exigence de vérité rigoureusement fondée au sens de cette objectivité qui domine méthodologiquement nos sciences positives et qui, déployant son action largement au-delà d'elles, procure à un positivisme philosophique, un positivisme en tant que vision du monde, sa ressource et les moyens de s'étendre partout. Il n'a pas toujours été vrai que les questions spécifiquement humaines se voient bannies du domaine de la science et que la relation intrinsèque qu'elles entretiennent avec toutes les sciences, y compris celles dans lesquelles ce n'est pas l'homme qui fournit le thème (par exemple les sciences de la nature), ait été placée en dehors de toute considération. Tant que les choses ne se passèrent pas ainsi, la science put revendiquer une signification pour cette humanité européenne qui depuis la Renaissance se donne une forme entièrement nouvelle, et même, comme nous le savons, elle put revendiquer la direction de cette entreprise. [...] Le concept positiviste de la science à notre époque est par conséquent, historiquement considéré, un concept résiduel. Il a laissé tomber toutes les questions que l'on avait incluses dans le concept de métaphysique, entendu tantôt de façon plus stricte tantôt de façon plus large, et parmi elles toutes ces questions que l'on appelle avec assez d'obscurité les questions "ultimes et les plus bâtîtes”. Considérées de plus près, ces questions et toutes celles que le positivisme a exclues, possèdent leur unité en ceci, qu'elles contiennent soit implicitement soit explicitement dans leur sens les problèmes de la raison, de la raison dans toutes ses figures particulières. C'est la raison en effet qui fournit expressément leur thème aux disciplines de la connaissance (c'est-à-dire de la connaissance vraie et authentique : de la connaissance rationnelle), à une axiologie vraie et authentique (les véritables valeurs en tant que valeurs de la raison), au comportement éthique (le bien-agir véritable, c'est-à-dire l'agir à partir de la raison pratique). Dans tout ceci la raison est un titre pour des idées et des idéaux "absolus", "éternels", "supra-temporels", "inconditionnellement valables".
- positivisme : doctrine philosophique selon laquelle la connaissance vraie repose sur l'expérimentation.
- crise : étape dans un processus évolutif pendant laquelle les difficultés et les contradictions se manifestent clairement.
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