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HUME : UNE SUCCESSION DE PERCEPTIONS

HUME : UNE SUCCESSION DE PERCEPTIONS

On envisage souvent le temps comme une réalité en soi, une sorte d'avancée constante, à l'intérieure de laquelle se produisent les événements du monde. Mais le temps peut-il réellement exister par lui-même, indépendamment de tout phénomène ? Newton le pensait, qui fit du temps, comme de l'espace, une réalité absolue. Hume, en revanche, s'élève contre une telle vue.

« De même que nous recevons l’idée d’espace de la disposition des objets visibles et tangibles, de même nous formons l’idée de temps de la succession des idées et des impressions ; et il est impossible que le temps puisse jamais se présenter ou que l’esprit le perçoive isolément. Un homme profondément endormi, ou puissamment occupé d'une pensée, n’a pas conscience du temps ; et, suivant que ses perceptions se succèdent plus ou moins rapidement, la même durée apparaît plus longue ou plus brève à son imagination. [...] Si vous faites tourner avec rapidité un charbon ardent, c'est l'image d’un cercle de feu qui se présentera au sens ; et il ne semblera y avoir aucun intervalle de temps entre ses révolutions ; uniquement parce que nos perceptions ne peuvent se succéder avec la même rapidité que le mouvement peut se communiquer aux objets extérieurs. Toutes les fois que nous n’avons pas de perceptions successives, nous n'avons pas notion du temps, même si, dans les objets, il y a réellement succession. De ces phénomènes, aussi bien que de beaucoup d'autres, nous pouvons conclure que le temps ne peut se présenter à l'esprit soit isolément, soit accompagné d’un objet fixe et immuable, mais qu'on le découvre toujours dans une succession perceptible d'objets changeants. »

HumeTraité de la nature humaine, I, 2e p., s. III.

ordre des idées

1) Une thèse centrale : le temps est une succession de perceptions (celles d'objets sensibles ou d'idées).

— Conséquence : nous ne pouvons concevoir le temps sans objets qui changent, (« soit isolément soit accompagné d’un objet fixe et immuable »).

2) Arguments.

a) Nous n'avons pas conscience du temps : — quand nous ne percevons pas (par ex. lorsque nous sommes profondément endormis) ; — quand nous ne percevons pas de changement, en percevant soit un même objet qui ne change pas (par ex. quand nous sommes concentrés sur une idée), soit un objet qui change mais en qui nous ne percevons pas la succession des changements (les révolutions d'un charbon ardent). b) Le temps nous paraît s'écouler plus ou moins vite en fonction de la succession plus ou moins rapide de nos perceptions (quand rien ne se passe, nous avons le sentiment que le temps se traîne).

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