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HUME : LA RAISON NE PEUT COMBATTRE UNE PASSION

HUME : LA RAISON NE PEUT COMBATTRE UNE PASSION

Contre l'opinion commune et la tradition philosophique classique qui s'accordent pour opposer la raison aux passions et préconiser la soumission de celles-ci à celle-là, Hume fait observer qu'une telle vue se fonde en réalité sur une fausse analyse et une fausse opposition. En effet, faculté de combiner logiquement des concepts et des propositions (ou jugements), la raison ne peut se prononcer que sur la cohérence de ces combinaisons (vérité formelle, comme en mathématique) ou sur la correspondance entre des propositions et la réalité des faits (vérité d’expérience, comme en physique) ; or les passions étant des faits et non pas des jugements, la raison ne peut rien dire sur elles, mais seulement sur les jugements qui les concernent. En toute rigueur, la raison ne saurait donc s’opposer à une passion ni la combattre.

« Une passion est une existence primitive, ou, si vous le voulez, un mode primitif d’existence et elle ne contient aucune qualité représentative qui en fasse une copie d’une autre existence ou d’un autre mode. Quand je suis en colère, je suis actuellement dominé par cette passion et, dans cette émotion, je n’ai pas plus de référence à un autre objet que lorsque je suis assoiffé, malade ou haut de plus de cinq pieds. Il est donc impossible que cette passion puisse être combattue par la vérité et la raison ou qu’elle puisse les contredire ; caria contradiction consiste dans le désaccord des idées, considérées comme des copies, avec les objets qu’elles représentent. » HumeTraité de la nature humaine, II, 3e p., s.III

ordre des idées

1) Un constat : la passion est une « existence primitive », un « mode primitif d’existence » (c’est-à-dire qu’elle est un fait qui ne constitue pas par lui-même une représentation : ce fait est ce qu’il est, et non une « copie d’un autre fait », comme le sont les idées et les images).

2) Des exemples explicatifs : une passion comme la colère est un fait qui par lui-même ne « réfère » à rien d’autre qu’à lui-même, tout comme le fait d’être malade ou de mesurer cinq pieds : ces faits sont seulement des faits, non des « représentations », des images, des idées ou des jugements. (Je puis, bien sûr, avoir en plus des idées de ces faits, de ma colère, de mesurer cinq pieds, mais ces idées ne sont pas ces faits.)

3) Une conclusion : La raison ne peut donc contredire et par conséquent combattre une passion, puisqu’elle ne peut se prononcer que sur des relations entre des idées et des faits, mais non sur les faits eux-mêmes. (La raison ne peut contredire le fait que je sois en colère pas plus que le fait que je mesure cinq pieds).

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