HITLER Adolf. Homme politique et dictateur allemand
HITLER Adolf. Homme politique et dictateur allemand. Né le 20 avril 1889 à Braunau-am-Inn (Autriche), mort le 30 avril 1945 à Berlin. Le « Führer » du IIIe Reich fut l'auteur à succès de Mon Combat [Mein Kampf 1925-1926], « bible » du national-socialisme allemand. Hitler verra dans sa naissance à Braunau, petite ville à la frontière de l'Allemagne et de l'Autriche, « une heureuse prédestination » : il en rendra grâce à Dieu en annexant l'Autriche et en supprimant du même coup la frontière, « le même sang appartenant au même Reich ». Fils de douanier signe supplémentaire du Destin , il est éleve de la Realschule de Linz qu'il quitte, sans le baccalauréat, pour Vienne, où il pense réaliser son rêve d'artiste : mais ni la peinture ni l'architecture ne veulent de lui. Après son séjour viennois (1908-1913), durant lequel il fréquente les soupes populaires, bien qu'il ne se sente pas « peuple », tout en ingérant aussi les matériaux constitutifs de ce qu'il faut bien appeler sa pensée, il se rend à Munich, et découvre enfin « une ville allemande ». La guerre l'y trouve, qu'il fait comme volontaire de l'armée bavaroise, et la guerre finie il y revient muni d'une décoration. La Reichswehr désirant reprendre en main une situation qui tend à lui échapper, Hitler sera son homme et ce sera sa chance. En 1919, il prend contact, commandité par ses maîtres, avec un minuscule « Parti ouvrier allemand » qui se transforme en 1920 en « Parti national-socialiste des travailleurs allemands ». Hitler en devient le chef autocratique, le Führer. Après le putsch manqué de 1923, il est arrêté, jugé avec compréhension, incarcéré avec égard et bientôt libéré. Alors commence, à la faveur de la crise et grâce à la complicité des classes dirigeantes, l'ascension qui le conduit au pouvoir en 1933, le rend maître de la « Grande Allemagne » en 1938, de l'Europe en 1941 et à laquelle seul le sacrifice de millions de résistants au fascisme met un terme. On a parlé de fin « wagnérienne » : elle prend la forme, somme toute vulgaire, d'une balle dans la tête. Que la propagande nazie ait, Hitler au pouvoir, encensé et vendu à des millions d'exemplaires « le livre saint du national-socialisme et de la nouvelle Allemagne » ne saurait faire oublier que le futur « Évangile » a été d'abord le laboratoire de cette même propagande, le lieu où elle se met au point. Ni traité politique, comme on le considère trop souvent, ni confession politique, comme le titre le donnerait à penser, Mein Kampf, écrit en partie dans la prison dorée de Landsberg, est le lieu où la propagande est mise en pratique, bien plus qu'elle n'y est théorisée. Essentiellement pragmatique et soumettant les thèmes idéologiques eux-mêmes au dessein politique, Mein Kampf est la continuation de l'agitation par d'autres moyens. Certes, il est possible d'en dégager une doctrine : la lutte du plus fort contre le plus faible est une donnée fondamentale de la vie humaine; la race « aryenne » est par nature supérieure aux autres; l'État est l'instrument destiné à maintenir l'unité et la pureté du peuple allemand, défini comme communauté de sang et de sol, et à lui conquérir à l'Est l'espace vital; la démocratie et toutes, les idéologies voisines, mais fondamentalement le marxisme, sont à anéantir, comme inventions de la « juiverie internationale » ; le Führer est l'Élu, incarnation du peuple et de l'État; il est investi d'une mission sacrée. Rien d'original : il est facile de nommer les ancêtres et les proches compagnons, depuis le romantisme allemand jusqu'aux géopoliticiens, en passant par Schopenhauer, Wagner, Gobineau, Chamberlain et quelques autres. Mein Kampf se présente comme une combinaison hétéroclite de mythes puisés à de multiples sources et constitutifs de l'idéologie de l'extrême-droite allemande de l'époque. A ne voir ici que fatras et plagiat, on néglige pourtant l'essentiel : que les thèmes, y compris le racisme, sont choisis uniquement en fonction du dessein politique, qui recouvre celui de l'impérialisme allemand « Je sais parfaitement, dit Hitler ailleurs, que du point de vue scientifique une chose comme la race n'existe pas... Avec sa conception raciste, le national-socialisme est en mesure de réaliser sa Révolution et de renverser le monde. » Dans Mein Kampf le fatras est en quelque sorte voulu. L'indétermination, le brouillage idéologique qui permettent de faire de la démagogie antipatronale sans toucher à la propriété, de courtiser la petite bourgeoisie sans compromettre l'accord à venir avec la grande, de faire un clin d'oeil au prolétariat, pauvre victime des syndicats et des « partis juifs » ont une fonction politique concrète. La forme autobiographique n'est pas non plus innocente : c'est elle qui confère aux mythes la réalité du vécu, l'expérience personnelle sert de preuve et vaut mieux que tous les savoirs livresques, par nature suspects; c'est elle qui permet que s'établisse entre le Führer et le destinataire de son texte un lien privilégié, d'autant que ce texte est plus parlé qu'écrit répéter à satiété la même phrase n'est pas ici le défaut d'un inculte, mais la mise en oeuvre d'un principe. Car l'efficacité vient des mots : mots grandiloquents et boursouflés, quand il s'agit d'exalter la supériorité raciale; métaphores biologiques et médicales, quand il s'agit de remuer le vieux fond de terreur et de désigner le diable, le « judéo-marxiste » ; et par-dessus tout, langage de foi, quand il s'agit d'organiser son propre culte, celui des « martyrs » du « Mouvement » et, qu'il s'agit aussi de faire « ce que l'Église catholique fit, quand elle imposa sa foi aux païens : conserver ce qui est utilisable, en changeant le sens ». Ce qui compte ici, ce sont moins les thèmes que la manière élastique de les présenter et la rhétorique qui les parle. Type de discours qui démontrera sa redoutable efficacité.
Hitler, Adolf (Braunau 1889-Berlin 1945) ; Führer et chancelier du Reich allemand.
H. naît à Braunau sur l’Inn du troisième lit d’un petit douanier autrichien. Il grandit à Linz et perd son père en 1903. Il quitte l’école en 1905 et restera par la suite autodidacte et dilettante en tous domaines. Son séjour à Vienne de 1907 à 1913, où il échoue par deux fois au concours d’entrée à l'Académie des beaux-arts, est déterminant. Il y mène une vie de vagabondage, habite à partir de 1909 un foyer de sans-abri, puis une pension, et tente de gagner son existence en peignant et vendant des cartes postales. Le jeune homme, solitaire et rêveur, s’imprègne de la politique viennoise et autrichienne dans cet État multinational des Habsbourg en pleine agitation. H. devient partisan d’un nationalisme empreint de pangermanisme autrichien, il admire les succès du mouvement social-chrétien dirigé par Karl Lueger et nourrit un antisémitisme fanatique qui restera un élément constituant de sa conception du monde. Le départ pour Munich en 1913 est peu glorieux, H. échappant - depuis 1909 déjà -aux autorités militaires autrichiennes. Sa situation d’apatride s’améliore peu dans le Munich d’avant-guerre. Sans le sortir complètement de son isolement, son engagement volontaire dans le régiment d’infanterie de réserve List lui permet d’échapper à une existence désolée. Estafette de l’état-major du régiment, blessé et décoré plusieurs fois, le caporal H. fait preuve de courage au cours de la Première Guerre mondiale, même s’il ne réussit pas vraiment à s’intégrer dans la troupe. La défaite, qu’il apprend à l’hôpital militaire de Pasewalk où il se fait soigner les yeux, abîmés par des gaz, lui ouvre la voie de la politique. De retour à Munich au printemps 1919, il est nommé instructeur politique par le capitaine Röhm, qui dirigera plus tard la SA, et prend alors conscience de l’attraction, de sa propagande dirigée contre les « assassins de Novembre » et la « république juive ». H. se hisse rapidement au rang de principal dirigeant du parti des travailleurs allemands, fondé par un petit employé des chemins de fer du nom de Drexler, et dont il devient, après quelques hésitations, le 55e membre. De 1919 à 1923, il est tribun de la cellule bavaroise et élabore pour le parti, rebaptisé par l’ingénieur Gottfried Feder « Parti national-socialiste des travailleurs allemands », un programme en 25 points déclarés irrévocables et dont il aura vite fait d’ignorer lui-même les éléments sociaux et les aspects économiques. De 1922 à 1923, il décuple le nombre des adhérents (56 000) et croit pouvoir entraîner avec lui ses alliés, les forces bavaroises regroupées autour de Kahr et de Lossow, ainsi que les corps francs et les milices populaires autour de Ludendorff, lorsque Stresemann demande l’arrêt de la résistance passive des ouvriers dans la Ruhr. Lors du putsch de la brasserie Bürger, le 8 novembre 1923, il espère faire marcher ses amis sur Berlin. La débâcle humiliante du 9 novembre dans la Feldherrnhalle et l’année de détention, après un procès habilement mené, dans la forteresse de Landsberg - malgré l’évidence de la haute trahison -, ne lui sont pas inutiles. Dans sa prison, H. écrit Mein Kampf, un livre qu’il considérera plus tard en plusieurs points comme trop sincère, et il mûrit sa tactique politique ; jusqu’à la prise du pouvoir en 1933, il saura attendre et surtout, face à l’armée, cacher, sous un semblant de légalité formelle, la brutalité de ses objectifs. Le parti, reconstitué en 1925, est systématiquement débarrassé de tous les rivaux et dominé uniquement par H. et un groupe d’aventuriers acquis à sa cause, par foi et par opportunisme (Goering, Röhm, Himmler, Bormann, Goebbels). Pendant la crise de la démocratie de Weimar, il affirme de façon aussi opiniâtre que provocatrice l’ambivalence démagogique de sa politique, orientée constamment vers la prise du pouvoir. Grâce à la crise économique mondiale, sa propagande sans relâche se solde par un énorme succès qui brise ou désarme ses adversaires (élections de sept. 1930 ; élection présidentielle du printemps 1932 contre Hindenburg ; élections parlementaires du 31 juill. et - avec une perte de deux millions de voix - du 6 nov. 1932). Dans le cabinet de coalition du 30 janvier 1933, arraché à l’entourage de Hindenburg, H. détient dès le début des positions clés avec Frick, Goering, et Blomberg au ministère de la Défense. Dès lors, et malgré des crises occasionnelles, la transformation de l’Allemagne en un pays totalitaire est en marche ; elle passe par l’incendie du Reichstag, la loi d’urgence, la loi des pleins pouvoirs, la mise au pas des syndicats, des partis et des Lânder, par l’assassinat de Röhm (la Nuit des longs couteaux, 1934) et elle culmine dans le serment que l’armée doit prêter à H. après la mort de Hindenburg, ainsi que dans la réunion des fonctions de président et de chancelier du Reich. L’État totalitaire à parti unique triomphe, la police secrète d’État, la SS et les organisations de masse du parti enlacent la nation entière et étouffent systématiquement la moindre résistance, avant même qu’elle ait pu s’organiser. Les événements de la fin de l’année 1938 (la crise Blomberg et Fritsch et la succession de Ribbentrop à Neurath au ministère des Affaires étrangères) marquent la fin des restrictions qui limitaient encore le pouvoir personnel de H. et transforment le gouvernement du Reich en une assemblée docile. Ce système invulnérable, dans lequel se mêlent étrangement une extrême centralisation du pouvoir et, parmi ses représentants, une anarchie artificiellement entretenue par H., condamne à l’impuissance le mouvement d’opposition qui touche pourtant une partie non négligeable de la population. Nombreux sont ceux qui trop longtemps se bercent d’illusions sur la réalité du national-socialisme. Parallèlement à cette toute-puissance à l’intérieur, H. veut réaliser avec les mêmes moyens, à l’extérieur, son programme d’hégémonie sur l’Europe puis sur le monde. S’il parvient tant bien que mal, de 1933 à 1938, à cacher ce programme malgré des provocations répétées (retrait de la Société des Nations en oct. 1933 ; assassinat de Dollfuss en 1934 ; service militaire obligatoire en 1935 ; entrée des troupes en Rhénanie et intervention en Espagne en 1936), c’est que les pays étrangers, particulièrement conciliants dans leur politique « d’apaisement », ne peuvent ni ne veulent percevoir la logique brutale de ses avancées. Quatre ans après l’assassinat du chancelier Dollfuss par les nazis autrichiens, H. réalise avec l’accord de Mussolini l’annexion (Anschluss) de l’Autriche au Reich allemand et entre triomphalement à Vienne le 14 mars 1938. Toutes ces années durant (protocole Hossbach en nov. 1937), H. tient fermement à son projet d’expansion vers l’Est pour conquérir l’espace vital qui lui semble nécessaire. Il envahit la Tchécoslovaquie à l’automne 1938 en s’appuyant sur la minorité allemande des Sudètes et négocie avec succès le démembrement du pays lors de la conférence de Munich (sept. 1938) qui réunit Allemands, Italiens, Français et Britanniques. Même son rapprochement avec l’URSS, qui culmine dans le pacte germano-soviétique d’août 1939, n’est à ses yeux qu’un moyen d’attaquer la Pologne, pour s’opposer finalement au bolchevisme. Il lance alors l’Allemagne dans la Seconde Guerre mondiale (1er sept. 1939) et envahit successivement la Pologne, la Norvège, la Belgique, la Hollande, la France, la Yougoslavie et la Grèce, puis enfin l’Union soviétique. Mais il se méprend complètement en escomptant trouver de solides alliés dans le conflit qu’il fait sciemment éclater. L’espoir de gagner à sa cause « l’île germanique », qu’il nourrit jusqu’à la fin malgré l’aversion de Ribbentrop pour l’Angleterre, s’avère être en 1939 une grossière erreur. Il surestime longtemps les possibilités du fascisme et de Mussolini, puis, cachant de moins en moins ses ambitions, il fait subir de tels affronts à l’Italie, que l’alliance des deux pays, même durant la guerre, devient incertaine. De semblables erreurs d’appréciations apparaissent dans les rapports avec le Japon qui, s’il se décide finalement à attaquer les Etats-Unis en 1941, conserve jusqu’à la fin de la guerre, au grand désespoir de H., sa neutralité vis-à-vis de l’Union soviétique en Extrême-Orient. Dès le départ, H. joue donc à quitte ou double dans la Deuxième Guerre mondiale. Jamais il ne sera prêt à conclure la paix dans des conditions acceptables par ses adversaires, qu’il s’agisse de la France, de l’Angleterre, ou de l’Union soviétique après 1941. Du sommet de sa puissance, il lance son programme d’expansion en attaquant l’URSS le 22 juin 1941 ; offensive lourde de conséquences, qu’il justifie par la nécessité d’isoler complètement l’Angleterre du Continent, mais qui cache surtout sa volonté de commencer enfin la colonisation de l’Est, censée résoudre d’un coup toutes les questions insolubles. Cette nouvelle bataille s’accompagne d’une terreur accrue qui vient frapper sans réserve les Allemands comme les autres, les « sous-hommes », Russes et Polonais en premier lieu, toutes les formes de résistance et atteint son paroxysme dans la « solution finale » de la question juive, qui coûte la vie à près de cinq millions de personnes. Ses qualités de chef de guerre sont discutées. Le 20 juillet 1944, il échappe à l’attentat de Stauffenberg. Admirateur de Wagner, H. prend enfin la décision d’entraîner le peuple allemand dans le « crépuscule des dieux » plutôt que de lui pardonner la défaite. Il se suicide, avec Eva Braun qu’il vient d’épouser, le 30 avril 1945 à la Chancellerie, dans un Berlin déjà occupé par l’armée russe.
Bibliographie : A. Hitler, Mein Kampf (1925), trad. fr. 1934 ; H.R. Trevor Roper, Les Derniers Jours de Hitler, 1964 ; E. Haufstaengl, Hitler. Les années obscures, 1967 ; H. Picker, Hitler, cet inconnu, 1969 ; J.U. Lang, Visages d’un dictateur : Adolf Hitler, Lausanne, 1969 ; M. Steinert, Hitler, 1991 ; P. Masson, Histoire de l’armée allemande 1940-1945, 1994.
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