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HÉRACLÈS

HÉRACLÈS. Il est le plus célèbre et le plus populaire des héros grecs; il est le fils de Zeus et d’Alcmène. Le nom d’Héraclès, littéralement «la gloire d’Héra», signifiait plus probablement, à l’origine, «le don glorieux d’Héra», et évoquait Argos, la patrie du héros, où Héra était vénérée. Mais cette association semble contredite, dans les faits mythologiques, par la persécution implacable que la déesse exerça sur Héraclès, jalouse de la liaison de Zeus avec Alcmène. Une autre cité, Thèbes, entra d’ailleurs en rivalité avec Argos. et revendiqua le héros comme le sien propre, de très bonne heure; Thèbes est d’ailleurs sa ville natale, selon la seule version qui nous est connue. Les informations que nous pouvons tirer des sources grecques les plus anciennes, sur Héraclès, sont limitées et nous avons dû nous contenter de quelques légendes plus récentes et de moindre intérêt pour présenter un récit complet (les références de ce type abondent, en plus de la tragédie d’Euripide, Héraclès, qui retrace sa folie). En tout cas, le personnage qui émerge des traditions qui nous sont parvenues est dessiné avec netteté. On l’a doté des qualités les plus nobles, la vigueur, l’endurance, la bonne humeur, la pitié envers les faibles, la générosité et un tempérament audacieux. Ses défauts sont aussi nettement marqués : caractère violent (tout particulièrement à l’égard de ceux qui commettent une injustice), concupiscence, gloutonnerie. Pour l’histoire du mariage d’Amphitryon et de sa mère, Alcmène. Pour la conception et la naissance d’Héraclès à Thèbes, voir ALCMÈNE. Zeus destinait à Héraclès le royaume d’Argos, ou au moins Mycènes et Tirynthe, auxquels il avait droit de par sa naissance, mais il fut berné par les machinations d’Héra. En définitive, au lieu de devenir un grand roi, Héraclès devint l’esclave d’Eurysthée, de beaucoup inférieur à lui. Toutefois, aguerri par une vie d’abnégation, il fut destiné à porter secours aux dieux eux-mêmes et remporta la victoire sur leurs ennemis, les Géants. Il ne mit pas longtemps à prouver qu’il était le fils de Zeus. Agé de huit mois, il dormait, en compagnie de son demi-frère jumeau Iphiclès, dans un bouclier faisant office de lit d’enfant, dans leur chambre. Au milieu de la nuit, Héra fit entrer deux serpents pour tuer le petit Héraclès. Iphiclès les vit le premier et se mit à crier, mais Héraclès en saisit un de chaque main et les étouffa. Les parents se précipitèrent, et Amphitryon comprit sur-le-champ lequel des deux enfants était celui de Zeus. Selon une variante, il avait lui-même introduit les deux serpents dans le berceau, afin de savoir lequel des deux enfants était le sien. Beaucoup de maîtres contribuèrent à l’éducation d’Héraclès; Amphitryon lui enseigna à maîtriser un cheval et à conduire un char. Eurytos, le roi d’Œchalie, fit de lui un archer habile. Autolycos lui donna des leçons de lutte, et Pollux lui enseigna le maniement des armes. Linos, frère du musicien Orphée, lui apprit à jouer de la lyre. Mais Héraclès n’était pas un élève appliqué dans cet art, et Linos dut punir l’adolescent; là-dessus, Héraclès, de fureur, saisit son instrument de musique et en défonça le crâne de Linos. Malgré son jeune âge, il fut accusé de meurtre, mais il persuada la cour de l’acquitter, citant une sentence de Rhadamanthe justifiant le cas de légitime défense. Après cela, Amphitryon envoya Héraclès garder ses troupeaux sur le mont Cithéron, près de Thèbes, et l’adolescent devint rapidement un homme fort et puissant, quoique d’une taille moyenne (d’après Pindare; mais des auteurs plus récents le dotent aussi d’une belle stature). Son arme favorite était l’arc, mais il excellait aussi dans l’art de la lutte et du lancer de javelot. A l’âge de dix-sept ans environ, il combattit et tua seul (bien que d’autres traditions attribuent cet exploit au père d’Amphitryon, Alcée) un lion qui ravageait les troupeaux non seulement d’Amphitryon, mais aussi de Thespios, qui régnait sur la ville voisine, Thespis. Avant de réussir ce tour de force, le jeune homme logeait dans la maison de Thespios, qui le laissa courtiser sa fille; ou bien, il le garda pendant cinquante nuits et mit chaque soir dans son lit une de ses filles ; ou encore, d’après Pausanias, il les envoya toutes en une seule nuit, où Héraclès avait le cerveau tellement brouillé par le vin qu’il crut s’unir avec la même cinquante fois. Chacune des filles donna naissance, le temps écoulé, à un fils. Après avoir tué le lion du Cithéron, il rencontra, en revenant à Thèbes, les envoyés d’Erginos, le rois des Minyens d’Orchomène ; ces derniers se rendaient à Thèbes pour collecter le tribut annuel imposé par le roi à la mort de son père Clyménos, tué à Thèbes. Erginos avait battu les Thébains, les avait dépouillés de leurs armes et leur avait ordonné de payer ce tribut chaque année. Héraclès fut saisi de colère devant l’humiliation subie par sa ville natale; il s’empara des envoyés, leur coupa le nez et les oreilles (qu’il leur attacha autour du cou) et il les renvoya vers leur maître. Puis, armé par Athéna, il mit en déroute Erginos, qu’il battit à un col dans la montagne, avec l’aide des Thébains; ceux-ci avaient pris des armes que leurs ancêtres avaient consacrées, dans les temples, quoique Créon, à ce moment-là roi de Thèbes, eût proposé de remettre Héraclès aux mains d’Erginos. Héraclès mit le siège devant Orchomène, escalada les murailles de la ville pendant la nuit, et, sans l’aide de personne incendia le palais d’Erginos. Enfin, il imposa à la ville un tribut double de celui que les Thébains avaient dû payer. Pour le remercier, Créon lui donna en mariage sa fille Mégara. Celle-ci donna au héros trois fils : Thersimaclos, Créontidas et Déicoon. Iphi-clès avait déjà engendré lolaos, qui devait devenir le compagnon et l’écuyer d’Héraclès, uni à Automéduse, la fille d’Al-cathoos. Pendant qu’Héraclès se trouvait à Argos, Créon mourut, et Lycos, un usurpateur venu d’Eubée, s’empara du pouvoir. Lycos, qui passait pour le meurtrier de Créon, était gêné par la présence des filles et des petits-fils du mort dans la ville, et il se préparait à les faire mettre à mort quand Héraclès revint à l’improviste et tua l’usurpateur. Mais, pendant les réjouissances qui suivirent, Héraclès fut soudain frappé d’un accès de folie par Héra, au cours duquel il prit son arc et tua à coups de flèches ses trois fils ainsi que Mégara qui avait tenté de protéger l’un d’eux de son corps. Il était sur le point de tuer Amphitryon lorsque Athéna l’assomma d’un coup de pierre. On disait aussi qu’il avait brûlé les enfants d’Iphiclès, excepté lolaos (d’après la version du mythographe Apollodore, cependant, Mégara survécut et épousa lolaos). Euripide, dans sa pièce Héraclès, adopte une chronologie différente des faits. Il place les douze Travaux d’Héraclès (voir plus loin) entre le moment où le héros quitte Thèbes et l’époque où il revient trouver sa famille. Après avoir tué Lycos, il fut frappé de folie par Héra et tua sa propre femme ainsi que leurs fils (les prenant pour la famille d’Eurysthée) ; puis, il fut emmené à Athènes par Thésée qu’Héraclès avait délivré du royaume d’Hadès. Cette version rend compte des années pendant lesquelles Créon mourut et les enfants d’Héraclès atteignirent l’adolescence, mais elle ne tient pas compte de la raison, traditionnellement acceptée, pour laquelle il dut servir Eurysthée, c’est-à-dire l’expiation du meurtre de sa femme et de ses enfants. Selon la version la plus connue de l’histoire d’Héraclès, ce fut à cause de cette série de meurtres qu’il dut entreprendre ses Travaux. Quittant Thèbes (l’exil était obligatoire en cas d’homicide) il se réfugia chez son vieil ami Thespios, le roi de Thespies, qui le purifia selon les rites. Mais Héraclès, incapable de trouver le repos, alla consulter l’oracle de Delphes. Celui-ci lui dit de se rendre à Tirynthe, l’une des villes du royaume d’Eurysthée, et d’accomplir un certain nombre d’épreuves que lui imposerait le roi. Les Travaux sont généralement au nombre de douze, mais les auteurs les plus anciens s’accordent à dire que, parmi les douze, deux furent rejetés par Eurysthée comme imparfaits. C’est pourquoi on admet généralement qu’Héraclès reçut, à l’origine, l’ordre de n’accomplir que dix Travaux. (Ou bien encore, Héraclès dut passer douze ans au service d’Eurysthée.) D’après une source précise, ce fut seulement alors qu’il reçut le nom d’Héraclès; la Pythie l’aurait ainsi nommé, peut-être pour apaiser la colère d’Héra. Jusqu’à ce jour, son seul nom avait été Alcide, d’après le nom du père d’Amphitryon, Alcée. La prêtresse lui prédit aussi qu’il obtiendrait l’immortalité s’il surmontait les épreuves. Mais celles-ci constituèrent néanmoins un terrible esclavage pour le fier héros, car Eurysthée était un pleutre et aurait pu passer aux yeux d’Héraclès pour l’usurpateur d’un trône auquel lui avait droit par naissance. Selon certains, ce fut seulement après avoir pris connaissance de l’oracle que la folie s’empara de lui et qu’il tua sa famille. L’ordre des Travaux d’Héraclès semble avoir été fixé par les scènes que décrivent les métopes du temple de Zeus, à Olympie (datant de 460 av. J.-C. environ). Euripide, cependant, présente une succession différente dans son Héraclès, et remplace même certaines épreuves par d’autres. Par exemple, il compte au nombre des Travaux le combat contre Cycnos, l’expédition contre les pirates dont il débarrassa la mer et l’épisode où il porta la voûte céleste pour Atlas (distinct ici des pommes des Hespérides, voir plus loin au n° XI). Même dans le «canon» établi, les onzième et douzième Travaux (ajoutés par la suite, puisque deux Travaux avaient été jugés imparfaits) sont souvent intervertis. L’ordre donné dans l’énumération qui va suivre est celui le plus communément accepté; la descente aux Enfers (XII) en constitue le point culminant. Les six premiers ont pour théâtre le Péloponnèse ; les deux suivants des endroits plus reculés du monde grec, et les quatre derniers des lieux mythiques, parmi lesquels le séjour des Ombres. Durant ces épreuves, Athéna lui accorda généralement son aide.
1. Le Lion de Némée. Le premier monstre qu’Héraclès dut tuer et ramener à Eurysthée était le lion de Némée, créature invulnérable qu’avaient engendrée Orthos et Echidna. Héra l’avait placé dans la région de Némée, en Argolide, pour servir d’épreuve à Héraclès. A son arrivée à Cléonae, il s’arrêta dans la hutte d’un laboureur, nommé Molorchos, qui voulut lui offrir un sacrifice, comme à un dieu. Refusant pareil honneur, Héraclès lui demanda d’attendre un mois ; ce mois écoulé, ou bien il mériterait un sacrifice au titre de héros mort, ou bien il aurait tué la bête, auquel cas Molorchos pourrait alors offrir le sacrifice à Zeus sauveur. Un soir, Héraclès surprit le lion sur le versant d’une colline, après le repas de la bête; dissimulé, il tira sur lui à coups de flèches. Mais il s’aperçut rapidement que le monstre était invulnérable, car ses flèches, offertes pourtant par Apollon, rebondissaient sur son cuir. Le lion chargea, mais Héraclès évita l’assaut ; il combattait les mains nues, armé de sa massue en bois d’olivier. Il en frappa le lion, puis l’étouffa, brisant sa massue dans la mêlée, puis il l’écorcha en utilisant les propres griffes du monstre pour entamer la peau coriace. Il nettoya la peau et s’en revêtit. Zeus mit le lion dans le firmament, au nombre des constellations. Molorchos était en train de sacrifier au héros lorsque, soudain, Héraclès arriva à Cléonae. A son retour à Tirynthe, le héros lança la peau aux pieds d’Eurysthée, qui en fut si terrifié qu’il sauta dans une jarre pour s’y cacher. Il ordonna à Héraclès de déposer dorénavant ses trophées à l’extérieur de la ville et de ne communiquer avec lui que par l’intermédiaire de son héraut, Coprée.
II. L'Hydre de Lerne. Le monstre, serpent d’eau au corps de chien, était un parent de la première victime d’Héraclès, car il était aussi un fils d’Echidna; il avait pour père Typhon. Il vivait à la source Amymoné, dans les marais de Lerne, près d’Argos. Il possédait plusieurs têtes, dont le nombre varie de cinq à cent; l’une d’elles, selon les mythographes les plus récents, était immortelle. Héra semble avoir délibérément placé là l’hydre, pour servir d’épreuve à Héraclès; elle lui avait donné pour allié un crabe géant, qui devait faire diversion pendant la bataille. Héraclès tenta de tuer l’hydre avec son épée, mais, bientôt, il dut appeler à son aide son neveu lolaos ; il lui demanda de cautériser avec un brandon les cous du monstre tronçonnés, car dès qu’il coupait une tête, deux autres repoussaient immédiatement. Héraclès écrasa le crabe d’un coup de talon, et Héra (qui le contrecarrait aussi vigoureusement qu’Athéna l’aidait), pour récompenser la bête, en fit la constellation du Cancer. Après s’être débarrassé des têtes mortelles, le héros trancha celle qui était immortelle, et l’enterra sous un rocher, sur la route qui va de Lerne à Elaeos. Puis il ouvrit le corps du serpent et recueillit son venin et (ce qui causera sa perte) le garda pour empoisonner ses flèches. Lorsqu’il revint à la cour d’Eurysthée, il apprit que le roi refusait de compter cet exploit au nombre des Travaux, sous prétexte qu’il avait bénéficié d’une aide extérieure.
III. La Biche de Cérynie. On ne sait si Héraclès reçut l’ordre de rapporter la biche vivante ou morte à Eurysthée. Euripide raconte que l’animal était un fléau, qu’Héraclès la tua et la consacra à Artémis. D’autres auteurs disent qu’il la poursuivit pendant un an et la captura vivante. Cette biche avait des bois dorés et était consacrée à Artémis, étant l’une des quatre biches de l’attelage de la déesse. D’après Pindare, il s’agissait en réalité d’une Pléiade, Taygèté, que la déesse avait ainsi métamorphosée pour la soustraire aux assiduités de Zeus. Selon lui, Héraclès poursuivit l’animal jusqu’au pays des Hyperboréens. Certains autres affirment qu’elle vivait dans les bois d’Œnoé, en Argolide. Son association à la ville d’Achaïe, Cérynie, est obscure. Héraclès la rejoignit en Arcadie, sur les rives du Ladon, et l’attrapa à l’aide d’un filet, alors qu’elle dormait. Mais comme il ramenait l’animal, il rencontra Apollon et Artémis qui lui firent des reproches et réclamèrent la biche ; mais Héraclès rejeta la responsabilité sur Eurysthée, si bien que la déesse l’autorisa à ramener l’animal à Tirynthe, à condition de le relâcher ensuite sans lui faire de mal.
IV. Le Sanglier d'Erymanthe. Héraclès reçut ensuite l’ordre de capturer un énorme sanglier qui vivait sur le mont Ery-manthe, en Arcadie, et qui ravageait la région de Psophis. C’est pendant qu’Héraclès était à sa recherche que le Centaure Pholos l’accueillit chez lui, avec de désastreuses conséquences pour ses congénères les Centaures, et lui-même. Ces êtres sauvages furent attirés vers la. grotte de Pholos par l’odeur du vin auquel ils n’étaient pas habitués, et, après avoir goûté ce vin, ils prirent à partie Héraclès dans une querelle d’ivrognes. Celui-ci se trouva forcé de se défendre avec ses flèches empoisonnées et tua la plupart de ses assaillants. L’un des Centaures qui échappèrent au massacre, Nessos, sera plus tard à l’origine de la mort du héros. Après cet incident, Héraclès, captura le sanglier en le forçant par ses cris à sortir de sa tanière et en le poussant dans une neige épaisse. Il l’emprisonna alors dans son filet et le rapporta à Eurysthée qui, selon certains, se réfugia de nouveau dans sa jarre de bronze. C’est à cette époque qu’Héraclès se joignit à l’expédition organisée par Jason pour ramener la Toison d’Or de Colchide. (Voir ARGONAUTES.) Il se sentait assez mal à l’aise parmi les Argonautes, car, bien que subordonné à Jason, il était, de loin, le héros le plus important à bord. Peut-être est-ce là la raison pour laquelle, pense-t-on, il quitta l’expédition bien avant son arrivée en Colchide; certains affirment d’ailleurs que le commandement lui fut offert, mais qu’il s’effaça devant Jason, qui l’avait précédé. Selon les versions, la part qu’il eut dans l’expédition est variable. D’après certaines traditions, il ne s’embarqua jamais, car la proue sculptée dans le chêne de Zeus, à Dodone, et qui avait le don de prophétie, avait déclaré qu’il serait trop lourd pour le navire. Apollonios de Rhodes, le poète des Argonautiques, rapporte qu’Héra-clès, accompagné du jeune Hylas, fils du roi des Dryopes Théodamas, que le héros avait tué dans une bataille, s’embarqua à Pagasae, sur VArgo. Les Argonautes s’attardèrent à Lemnos pendant toute une année auprès de ses habitantes sans maris, puis Héraclès les convainquit de lever l’ancre. Il tua aussi les Géants (Gegeneis) qui constituaient un fléau pour les Doliones du nord de la Mysie, en Asie Mineure. Mais il brisa son aviron au large de la côte de Bithynie, ce qui entraîna une autre catastrophe : pendant qu’il coupait du bois pour se faire un nouvel aviron, son compagnon, Hylas, que l’on avait chargé d’aller chercher de l’eau, fut enlevé par les nymphes de la source qui le précipitèrent dans l’eau. Les Argonautes le cherchèrent pendant toute la nuit, mais, sur le conseil de Calaïs et de Zétès, ils levèrent l’ancre au matin, laissant Héraclès derrière eux. Ce dernier finit aussi par abandonner les recherches, mais non sans avoir fait promettre aux gens du pays de continuer à chercher le jeune homme, ce qu’ils firent désormais chaque année. L’Argonaute Polyphème, qui avait entendu les cris de Hylas et avait prévenu Héraclès, avait lui aussi été abandonné à terre et, après avoir fondé la ville de Cios, il veilla à ce que les recherches fussent poursuivies. Héraclès surprit plus tard Calaïs et Zétès sur l’île de Ténos et les mit à mort, pour se venger de leur traîtrise.
V. Les Écuries d’Augias. Augias était un fils d’Hélios, le dieu du Soleil, et, de même que son père, il possédait de nombreux troupeaux qu’il faisait paître dans son royaume d’Elide. Eurysthée ordonna à Héraclès de se rendre aux écuries d’Augias, qui étaient encombrées par une telle épaisseur de fumier qu’elles étaient devenues inutilisables, et de les nettoyer en une seule journée. Quoiqu’il fût dans la situation d’un esclave, qui devait exécuter les ordres qu’il recevait, Héraclès chercha à convenir d’un salaire avec Eurysthée et s’engagea à effectuer le travail en échange d’un dixième du troupeau. Le fils d’Augias, Phylée, fut témoin de la promesse de son père. Héraclès ouvrit des brèches dans le mur d’enceinte des étables et, détournant le fleuve Alphée, il fit passer ses eaux au travers des écuries, puis il fit rentrer le fleuve dans son lit avant la nuit et reboucha les brèches. Les étables redevinrent ainsi propres et saines, mais Augias refusa de respecter sa promesse, prétextant que le héros travaillait sous les ordres d’Eurysthée. Phylée, qui désapprouvait la déloyauté de son père, fut banni pour avoir manifesté ses sentiments. En revenant à Tirynthe, Héraclès fut reçu par Déxaménos, roi d’Olénos, et délivra sa fille Mnésimachè du Centaure Eurytion qui voulait l’épouser de force, et mit son prétendant à mort. A son retour, Héraclès se trouva doublement trompé : non seulement il n’avait pas reçu le salaire convenu, mais Eurysthée refusait de compter cette épreuve parmi les Travaux, puisqu’il avait cherché à gagner une récompense. Héraclès revint plus tard à Elis et, après de considérables difficultés, il conquit le pays et tua Augias, le remplaçant par son fils Phylée.
VI. Les Oiseaux du lac Sîymphale. Le dernier Travail qu’Héraclès accomplit dans le Péloponnèse fut la destruction des oiseaux qui infestaient les rives boisées du lac Stymphale, en Arcadie; ils attaquaient les gens du pays en se servant, comme flèches, de leurs plumes aux pointes d’acier. De plus, ils dévastaient les récoltes par leurs souillures. Héraclès en débarrassa le pays en utilisant une crécelle de bronze fabriquée par Héphaïstos, et que lui donna Athéna. Le bruit de la crécelle les effraya et les fit sortir de leurs buissons, de sorte qu’Héraclès put en tuer un grand nombre de ses flèches.
VII. Le Taureau de Crète. Ensuite, Eurysthée envoya Héraclès plus loin et lui ordonna de ramener le taureau que Minos avait négligé de sacrifier à Poséidon et pour lequel Pasiphaé avait conçu un violent désir. Minos donna sa permission au héros, car le taureau lui avait déjà causé beaucoup d’ennuis et était dangereux. Héraclès le captura vivant et l’emmena à Tirynthe, puis il le relâcha. L’animal gagna Marathon et tua plus tard le fils de Minos, Androgée, roi de Paros, avant de tomber sous les coups de Thésée.
VIII. Les Juments de Diomède. Héraclès reçut l’ordre de se rendre en Thrace, d’où il devait ramener les juments mangeuses d’hommes qui appartenaient à Diomède, le roi des Bistones. Ce fut lors de son passage en Thessalie qu’Héraclès fut reçu par Admète, le roi de Phères, et qu’il secourut la femme de ce dernier, Alceste; elle s’apprêtait à prendre la place de son mari dans la tombe, et le héros lutta avec Thanatos (la Mort) lorsque celui-ci vint réclamer sa victime. De là, il se rendit en Thrace, s’empara des juments et les conduisit vers la côte pour les embarquer. Les Bistones, soulevés par Diomède qui avait découvert le vol, l’attaquèrent alors; mais Héraclès les mit en déroute et captura leur roi, qu’il donna à manger aux juments qui, dès ce moment, devinrent dociles. Mais, avant cela, elles avaient dévoré le jeune compagnon d’Héraclès, Abdéros, qui avait été chargé de les garder; Héraclès fonda la cité d’Abdère en souvenir de lui. Après avoir ramené par bateau les juments à Tirynthe, Héraclès les relâcha. Elles errèrent vers le nord, puis furent dévorées par des animaux sauvages sur le mont Olympe. (Certains auteurs affirment que c’est à ce moment qu’Héraclès se joignit aux Argonautes.)
IX. La Ceinture de l’Amazone. C’est pour contenter sa fille Admétè qui désirait un cadeau sortant de l’ordinaire qu’Eurysthée envoya ensuite Héraclès conquérir la ceinture d’Hippolyté, reine des Amazones. Celles-ci vivaient près du fleuve Thermodon, sur la côte nord de l’Asie Mineure. Héraclès réunit un groupe de compagnons, parmi lesquels Thésée et Télamon, et prit la mer, faisant escale sur sa route à l’île de Paros, l’une des Cyclades. Là, les habitants de l’île, dont le roi était Androgée, fils de Minos, le roi de Crète, tuèrent deux de ses hommes; Héraclès mit alors le siège devant leur ville jusqu’à ce qu’ils se rendissent, puis emmena avec lui deux des fils du roi comme otages, Alcée et Sthénélos. En Mysie, il fut l’allié du roi des Mariandynes, Lycos, qui combattait contre les Bébryces (Lycos fonda la ville d’Héraclée du Pont, dans le pays qu’ils conquirent). De là, il se rendit au pays des Amazones. La ceinture avait été donnée à Hippolyté par Arès, pour symboliser son pouvoir de reine sur son peuple ; pourtant, lorsque Héraclès la lui demanda, elle la lui offrit sans soulever d’objection. Héra fut furieuse de voir le héros obtenir la victoire si facilement et, prenant les traits d’une Amazone, elle souleva les autres contre Héraclès, déclarant qu’il avait l’intention d’enlever leur reine; là-dessus, Héraclès crut qu’Hippolyté n’avait pas de parole et la tua ; puis il enleva la ceinture de son corps et leva l’ancre. Une autre tradition raconte comment Héraclès captura Mélanippé et Thésée, Antiope, car toutes deux venaient immédiatement après Hippolyté. Mélanippé fut rendue à Hippolyte en échange de la ceinture, et Thésée ramena avec lui Antiope qui était amoureuse de lui. Pour cette raison, elle passait pour avoir trahi son peuple pour les Grecs. En rentrant du pays des Amazones, Héraclès accepta d’aider Laomédon, le roi de Troie, dont les terres étaient ravagées par un monstre marin envoyé par Poséidon; le dieu se vengeait ainsi sur Laomédon, qui avait refusé de lui payer le salaire convenu lorsque Apollon et lui-même avaient construit les murailles de Troie. Laomédon s’apprêtait à enchaîner sa fille, Hésioné, sur le rivage pour apaiser le monstre, mais Héraclès la délivra, convenant de tuer le dragon en échange des juments que Zeus avait données à Laomédon. C’est ce qu’il fit en combattant à l’abri d’un mur qu’Athéna avait construit pour le protéger; il fut cependant avalé par le monstre, qu’il réussit à tuer de l’intérieur. Mais Laomédon revint de nouveau sur sa parole. Héraclès jura de se venger. (Selon une version différente, cet épisode prend place au retour du voyage sur l'Argo.) Sur le chemin du retour, Héraclès s’arrêta à Aenos, en Thrace, où il tua Sarpédon, le frère du roi Poltys, bien que celui-ci l’eût reçu avec hospitalité. Il conquit aussi l’île de Thasos et lui donna comme rois Alcée et Sthénélos, originaires de Paros. Après l’arrivée du héros à Tirynthe, Eurysthée prit la ceinture de l’Amazone et la consacra à Héra, dans le temple de la déesse à Argos.
X. Les Bœufs de Géryon. Pour réaliser les Travaux suivants, Héraclès dut se rendre aux confins de la terre, et même jusqu’aux Enfers, décrits dans L'Odyssée comme une région bordant l’Océan à l’ouest. Lors de ces expéditions, il accomplit par ailleurs un certain nombre d’exploits (parerga) qui vinrent s’ajouter aux Travaux. Les bœufs appartenaient à Géryon, géant à trois têtes (qui était peut-être à l’origine une autre représentation d’Hadès) et paissaient sur l’île mythique d’Erythie (l’île rouge) que l’on situait généralement dans l’Océan occidental, au-delà de l’Ibérie (Espagne). Héraclès devait les subtiliser et les ramener à Argos. Il commença par se rendre en Libye, puis marcha vers l’ouest en direction de l’Océan. Incommodé par la chaleur, il brandit son arc en direction d’Hélios. Mais au lieu d’en être offensé, Hélios lui prêta la grande coupe d’or dans laquelle il retournait chaque nuit à l’est. Héraclès traversa l’Océan dans la coupe, et atteignit Erythie ; en passant par le détroit de Gibraltar, il éleva les «Colonnes d’Hercule». Après avoir tué le chien Orthos d’un coup de massue, il fit subir le même sort au berger Eurytion, puis embarqua le troupeau sur la coupe d’or. Ménoétès, qui faisait paître les troupeaux d’Hadès non loin de là, informa Géryon du vol et le géant se lança à la poursuite d’Héraclès ; mais il ne tarda pas à être tué par les flèches du héros, sur les bords de la rivière Anthémos. Ensuite, Héraclès fit voile vers Tartessos (ville non identifiée dans le sud-ouest de l’Espagne), où il rendit la coupe à Hélios, et continua à pied, traversant l’Espagne et le sud de la France. Là, un grand nombre de Ligures essayèrent de lui prendre son troupeau et de tuer le héros, qui commençait à manquer de flèches. Mais Zeus fit providentiellement tomber sur les Ligures une pluie de pierres, dont Héraclès se servit aussitôt pour lapider ses ennemis. Depuis ce temps, des rochers jonchent la Provence (pays des Ligures). En arrivant dans une région boisée au nord de la mer Noire, Héraclès fut dépossédé de ses chevaux pendant qu’il dormait. En les recherchant, il trouva une étrange femme, pourvue d’une queue de serpent, qui vivait dans une caverne. C’était elle qui lui avait volé ses chevaux, et elle consentit à les lui rendre seulement s’il s’unissait d’amour avec elle. Elle était la reine du pays, et le héros resta auprès d’elle assez longtemps pour lui donner trois fils. Ceux-ci furent nommés Scythès, Gélonos, et Agathyrsos, et donnèrent leurs noms à trois puissantes nations. Plus tard, en lui rendant les chevaux, la femme serpent demanda à Héraclès ce qu’il adviendrait de leurs fils. Le héros lui laissa un arc et lui dit de transmettre le pouvoir à celui des trois qui serait capable de tendre l’arc. Seul Scythès put remplir cette condition, et ses descendants, les Scythes, devinrent le peuple le plus puissant du sud de la Russie. Ensuite, Héraclès fit passer le troupeau par le sud de l’Italie. Faisant une halte sur l’emplacement de Rome, il tua le monstrueux Cacus, puis il fut accueilli par le roi Evandre et fonda son propre cuite, celui de l'«Ara Maxima» (le Grand Autel). Près de la ville de Baies, en Campanie, il éleva une énorme digue le long de la côte. Lorsqu’il atteignit Rhegium en Italie du Sud, l’un de ses taureaux s’échappa et arriva à la nage jusqu’en Sicile; Héraclès dut partir à sa poursuite, laissant le reste du troupeau sous la garde d’Héphaïstos. Quand le taureau parvint au sud de la Sicile, le roi Eryx le joignit à^ ses propres troupeaux et refusa de le rendre à Héraclès qu’il défia à la lutte. Le héros gagna à la troisième reprise et le tua. Pendant qu’il faisait traverser l’isthme de Corinthe à son troupeau, le géant Alcyonée l’attaqua en lui lançant une pierre avec tant de vigueur qu’elle atteignit Héraclès, rebondit et tua son assaillant. Les mésaventures d’Héraclès n’étaient cependant pas terminées car pendant qu’il parcourait avec ses bêtes la dernière étape, celles-ci furent attaquées par un taon envoyé par Héra, et Héraclès eut le plus grand mal à les rassembler. Eurysthée fut ébahi de voir le héros dont l’absence avait duré si longtemps qu’il le considérait comme perdu. Les animaux furent sacrifiés à Héra.
XI. Les Pommes d’Or des Hespérides. Héraclès s’était maintenant acquitté des dix Travaux imposés à l’origine par l’oracle de Delphes. Mais, comme Eurysthée en avait refusé deux, il dut en accomplir deux supplémentaires. Tout d’abord (l’ordre de ces deux Travaux, comme il a été mentionné plus haut, est quelquefois inversé), Eurysthée lui donna l’ordre de lui apporter les pommes d’or des Hespérides («filles du couchant ») ; celles-ci passent parfois pour les filles du Titan Atlas qui vivait non loin de leur jardin, portant la voûte céleste sur son dos. Ces pommes, offertes en présent de noces par Gaia à Héra, poussaient dans un jardin situé aux confins du monde et où les Hespérides et le dragon Ladon (qui, selon la légende, possédait cent têtes) les gardaient. La première difficulté fut, pour Héraclès, de trouver le jardin. Il consulta tout d’abord les nymphes du fleuve Eridan qui lui conseillèrent d’obliger Nérée à le renseigner; la divinité marine avait coutume de prendre les formes les plus fantastiques lorsque l’on essayait de l’attraper. Héraclès le trouva, le tint solidement malgré toutes ses transformations, et, à force de flatteries, il réussit à savoir où se trouvait le jardin dans l’extrême Occident. Sur sa route, il eut un grand nombre d’aventures. Il tua l’aigle qui tourmentait Prométhée enchaîné, délivrant le prisonnier de ses chaînes; il mit à mort Busiris, le roi d’Egypte, qui voulait le sacrifier à Zeus; en Libye, il lutta contre le puissant Antée, fils de Gaia, et le tua en le soulevant au-dessus du sol; il battit à la lutte un fils d’Arès, Lycaon, qui l’avait défié. A Rhodes, il vola un bœuf, le sacrifia, puis le mangea sous les injures du propriétaire de l’animal; c’est pour cela que par la suite, à Rhodes, les sacrifices offerts à Héraclès furent toujours accompagnés de malédictions. Il existe deux versions différentes de la façon dont Héraclès se procura les pommes. La plus célèbre raconte comment, grâce au conseil que lui donna Prométhée, il persuada le Titan Atlas d’aller les lui cueillir pendant que lui-même, aidé d’Athéna, soutiendrait le ciel à la place du Titan.
Atlas fut ravi de se reposer et n’eut aucune difficulté à obtenir les fruits de ses filles. A son retour, cependant, il refusa de reprendre son fardeau et décida de remettre les pommes lui-même à Eurysthée. Héraclès fit semblant d’accepter, mais demanda tout d’abord à Atlas de le soulager le temps de mettre un coussin sur sa nuque. Pendant qu’Atlas s’exécutait, Héraclès se baissa rapidement, saisit les pommes et s’enfuit avec les fruits en Grèce. Dans une tradition connue d’Euripide, Héraclès tua Ladon et cueillit lui-même les fruits sur l’arbre qui les portait; ayant soif, il fit jaillir une source en frappant le sol. (Cette source devait, plus tard, sauver les Argonautes.) Selon une variante, Emathion, fils d’Eos et de Tithonos, se trouvait dans les environs en même temps qu’Héraclès et il tenta d’empêcher ce dernier de s’emparer des pommes, mais il fut tué. Héra plaça Ladon dans le firmament où il devint la constellation du Serpent. Cette version tient compte du mythe selon lequel Atlas avait depuis longtemps été transformé en une chaîne de montagnes, après que Persée lui eut montré la tête de la Gorgone. Quand Eurysthée eut les pommes, il les rendit.tout de suite au héros, car il ne pouvait garder des objets aussi sacrés. Athéna les prit alors et les reporta dans leur jardin.

 
XII. La Descente aux Enfers. La dernière épreuve d’Héraclès (selon la classification habituelle) consista à ramener Cerbère, le chien de garde des Enfers, des portes du royaume d’Hadès. Eurysthée espérait, en lui imposant ce Travail, être débarrassé à tout jamais de son ennemi. Mais Héraclès eut l’avantage sur Hadès lui-même, remplissant l’ultime condition pour obtenir l’immortalité. Avant tout, il devait trouver le chemin qui conduisait aux Enfers : pour cela, il se fit initier aux Mystères d’Eleusis par Eumolpos (il dut se faire adopter par un citoyen d’Eleusis, Pylios, car il était étranger), et être, purifié du meurtre des Centaures. Enfin, fort des rites de Perséphone, il put se diriger vers le royaume d’Hadès. Selon certains, c’est alors qu’il délivra Alceste de la mort. Il se rendit au Ténare, dans le sud du Péloponnèse, où Hermès, le conducteur des âmes, et Athéna, sa protectrice, vinrent à sa rencontre et l’escortèrent jusqu’au séjour des Morts. Lorsqu’ils atteignirent le Styx, le passeur Charon eut tellement peur d’Héraclès qu’il le transporta sur l’autre rive sans perdre de temps (pour cette faiblesse, Hadès lui fit passer une année enchaîné). Héraclès dut ensuite lutter avec Hadès lui-même pour avoir accès aux Enfers, et il le blessa devant l’entrée, si bien que le dieu dut se rendre sur l’Olympe pour que Jason le guérisse à l’aide de ses baumes ; il permit ensuite à Héraclès d’emmener Cerbère; seulement, il devait s’emparer du monstre sans se servir de ses armes. Parmi les morts, Héraclès aperçut Thésée et Pirithoos, assis sur les «Chaises d’Oubli» sur lesquelles ils avaient été enchaînés pour avoir tenté d’enlever Perséphone. Hadès consentit à relâcher Thésée, car ce dernier n’avait été que le complice de son ami; mais le châtiment de Pirithoos fut maintenu. Le héros rencontra aussi l’ombre de la Gorgone Méduse et celle de Méléagre. Hermès lui dit de ne pas avoir peur de Méduse, qui ne pouvait lui faire de mal. Quant à Méléagre, il fit le récit de sa mort à Héraclès, et lorsque ce dernier, pris de compassion, lui offrit d’épouser sa sœur, le mort lui parla de la beauté de Déjanire. Héraclès tint plus tard sa promesse. Il libéra aussi Ascalaphos prisonnier sous un rocher (pour avoir révélé que Perséphone avait mangé des grains de grenade) et tua l’une des vaches d’Hadès pour nourrir les ombres. Perséphone le pria de s’en aller avant de causer quelque autre dommage; aussi, il attrapa Cerbère et rebroussa chemin avec sa prise, puis il émergea des Enfers, à l’air libre. Sur le chemin du retour à Tirynthe, l’apparition funeste du chien des Enfers causa un certain nombre de désastres : sa bave donna naissance à un poison mortel, l’aconit, et Eurysthée se trouvait déjà dans sa jarre de bronze bien avant leur arrivée. Héraclès renvoya le chien droit aux Enfers, ainsi qu’il en avait été convenu. Il avait désormais rempli les conditions pour obtenir l’immortalité, mais sa vie était loin d’être terminée; il dut même plusieurs fois servir comme esclave avant d’atteindre l’apothéose. Il commença par divorcer d’avec Mégara (qui avait survécu, selon certaines versions); il la maria à son neveu lolaos, se considérant lui-même comme indigne d’elle, après avoir tué leurs enfants. Puis il prit part à un concours de tir à l’arc organisé par Eurytos, roi d’Oechalie, et dont le prix était lolé, la fille de ce dernier. Héraclès fut vainqueur, mais, se souvenant de son mariage malheureux, Eurytos refusa de lui décerner le prix, malgré l’intervention de son fils Iphitos, qui avait beaucoup d’admiration pour Héraclès. Après le départ du héros furieux, quelques juments, ou têtes de bétail disparurent en même temps que lui (l’auteur du vol était en vérité Autolycos) ; Iphitos se rendit auprès d’Héraclès et lui demanda de rechercher le bétail avec lui. Héraclès emmena le jeune homme à Tirynthe, mais, brusquement, se sentant peut-être offensé par cette requête, il le précipita du haut du toit de sa maison, ou des murailles de Tirynthe.
Que le héros eût été responsable de son acte, ou que le meurtre eût été le résultat d’une attaque de folie envoyée par Héra, Héraclès fut, à la suite de cela, de nouveau atteint de démence. Il fit appel à Nélée, le roi de Pylos, pour qu’il le purifiât, mais celui-ci était un ami d’Eurytos et refusa. Héraclès alla consulter l’oracle de Delphes, mais la Pythie, par répulsion pour sa folie, se détourna de lui. Héraclès alors se saisit de son trépied et menaça de détruire Delphes. Apollon survint, et la lutte s’engagea entre eux deux, si bien que Zeus dut envoyer sa foudre pour séparer ses fils. La Pythie lui rendit enfin l’oracle désiré : il devait de nouveau se soumettre à l’esclavage, mais cette fois pour trois ans. D’autre part, il devait donner à Eurytos l’argent de sa vente comme «prix du sang», pour payer la mort d’Iphitos; Eurytos refusa cet argent. Hermès vendit le héros à la reine Omphale, de Lydie, veuve de Tmolos. A son service, Héraclès accomplit de nombreux exploits, capturant les Cercopes et tuant Sylée, un Lydien qui obligeait les voyageurs à travailler à sa vigne; Héraclès le tua avec sa propre houe. Il vainquit aussi les ennemis d’Omphale, les Itones, et détruisit leur ville. Certains auteurs prétendent qu’Omphale lui fit porter des vêtements de femme et lui apprit à filer. D’autres affirment que, au contraire, elle devint sa femme et lui donna un fils, Lamos. Lorsqu’il la quitta, il redevint sain d’esprit. Héraclès, libre, entreprit une série d’expéditions pour se venger des différentes personnes qui avaient fait preuve d’injustice envers lui. Il commença par les ennemis qu’il avait à Troie, et réunit une armée et une flotte de dix-huit bateaux, qui fit voile vers Troie. Il prit comme lieutenant Télamon de Salamine. Il amarra ses navires et les confia à la garde d’Oe-clès, mais les Troyens tuèrent ce dernier et tentèrent d’incendier la flotte. Héraclès mit alors le siège devant la ville et, bientôt, Télamon ouvrit une brèche dans la muraille. Cet exploit mécontenta le jaloux Héraclès, mais il se calma quand Télamon prétendit élever un autel destiné au culte du héros. Héraclès tua Laomédon et tous ses fils, n’épargnant que Podarcès (qu’Hésioné racheta avec son voile) et Tithonos. Héraclès s’empara des juments que Laomédon lui devait et donna Hésioné en mariage à Télamon; celle-ci donna plus tard naissance à Teucer. Il laissa le trône de Troie à Podarcès, qui fut désormais appelé Priam; les étymologistes grecs ont pensé, à tort, que ce nom dérivait du verbe priamai (acheter), par allusion au rachat de Priam. Héraclès reprit la mer et s’éloigna de Troie, mais un vent violent envoyé par Héra le jeta plus au sud, sur l’île de Cos. Cette fois Zeus la punit pour sa cruauté envers son fils, et la suspendit par les poignets au sommet de l’Olympe, après avoir attaché une enclume à chacune de ses chevilles. A Cos, les Grecs furent attaqués par les Méropes dont le roi, Eurypy-los, fut tué par Héraclès. C’est sur cette île qu’Athéna vint chercher Héraclès pour aider les dieux dans leur lutte contre les géants, à Phlégrae. La présence d’Héraclès était indispensable dans ce combat, car seul un mortel pouvait achever les ennemis des dieux (voir GÉANTS). Ensuite, Héraclès livra bataille à Augias, le roi d’Elide qui avait refusé de lui payer le prix convenu pour débarrasser ses étables de leur fumier (voir, plus haut, la Ve épreuve). La première expédition fut sans succès, car Augias avait fait appel aux Molionides, les fils d’Actor, qui étaient d’excellents généraux. Héraclès fut banni de l’Argolide par Eurysthée et s’établit à Phénée, en Arcadie. Puis, comme les Molionides se rendaient aux jeux Isthmiques en qualité d’ambassadeurs, Héraclès les tua dans une embuscade. Il organisa alors une seconde expédition contre Augias, qu’il tua, et fit monter sur le trône le fils d’Augias, Phylée. Puis, d’après la légende, il fonda les jeux Olympiques, après avoir sacrifié à son père Zeus, à Olympie. Après cela, il se rendit à Pyios, où il avait d’anciens comptes à régler avec son roi, Nélée, qui avait refusé de le purifier du meurtre d’Iphitos. D’après certaines traditions, il avait déjà tué Nélée et ses fils à l’époque de la mort d’Iphitos, et la folie qui l’avait frappé — et qui eut pour conséquence sa servitude chez Omphale — était survenue après ces deux meurtres. En fin de compte, de tous les fils de Nélée, seul Nestor survécut : il était absent de Pylos, et vivait à Gérania. Puis Héraclès dirigea son attention vers Sparte et vers son roi Hippocoon. Ce dernier avait chassé son frère Tyndare et s’était allié avec Nélée contre Héraclès. De plus, ses fils avaient tué le cousin d’Héraclès, Oenos, sous prétexte que celui-ci avait lancé une pierre à leur chien. Aussi, aidé de Céphée, le roi de Tégée, il marcha sur Sparte. Au cœur de la bataille, Iphiclès, Céphée et la plupart de ses fils furent tués. Mais Héraclès tua ses ennemis et rendit le royaume de Sparte à Tyndare. Stéropé, la fille de Céphée, protégea Tégée de ses ennemis en brandissant une boucle de cheveux de la Gorgone, qu’Athéna avait donnée à son père. Héraclès en profita aussi pour séduire la sœur de Céphée, Augé, qui lui donna un fils, Télèphe. Enfin, Héraclès se souvint de la promesse qu’il avait faite à l’ombre de Méléagre et se rendit à Calydon, où Œnée était roi, pour épouser Déjanire. Il eut toutefois à lutter avec le dieu-fleuve Achéloos pour obtenir la main de la jeune fille; mais il obtint la victoire en brisant l’une des cornes du dieu et fit de Déjanire sa femme. Puis il aida les habitants de Calydon à combattre les Thesprotes et séduisit la fille du roi Phylas, Astyoché, qui lui donna un fils, Tlépolémos. Pendant ce temps, Déjanire donna naissance à un fils, Hyllos, et à une fille, Macaria. Mais bientôt, ils durent quitter Calydon, car Héraclès, dans un accès de colère, avait tué d’un coup un jeune garçon, Eunomos qui, en servant à table, avait renversé du vin sur lui. Bien qu’Œnée eût pardonné ce meurtre au héros, celui-ci fut obligé de respecter la coutume appliquée aux meurtriers, et s’exila; emmenant sa femme, il se mit en route vers Trachis. Alors qu’ils traversaient le fleuve Evénos, le Centaure Nessos essaya de violer Déjanire pendant qu’il la transportait de l’autre côté du fleuve en crue; Héraclès le transperça d’une de ses flèches, dont il avait trempé l’extrémité dans le venin de l’Hydre. Au moment de mourir, Nessos dit à Déjanire de recueillir son sang et de s’en servir comme philtre d’amour si jamais Héraclès cessait de l’aimer; et celle-ci, à l’insu de son mari, conserva le sang dans un flacon. Une fois arrivé à Trachis, Héraclès entreprit un certain nombre d’expéditions en faveur de Céyx, contre les Dryopes et les Lapithes, et donna une partie de leur territoire à Aegimios, le roi des Doriens. Lorsque, pour le remercier, Aegi-mios lui offrit une maison et une terre dans son royaume, le héros refusa ce don pour lui-même, mais l’accepta pour ses descendants qui, le moment venu, s’allièrent au peuple des Doriens. Héraclès se rendit ensuite en Thessalie où, à Itonos, il fut défié à la lutte par Cycnos, l’un des fils d’Arès, lequel construisait un temple pour son père en utilisant comme briques les crânes de ses victimes. Il tendait des embuscades aux pèlerins qui se rendaient à Delphes, les tuait, et s’emparait de leurs offrandes. Arès intervint en faveur de son fils, mais Héraclès tua Cycnos, et, avec l’aide d’Athèna, il lutta contre le dieu et le blessa. On dit que Zeus sépara les combattants en leur envoyant sa foudre. Selon une autre tradition, cet épisode eut pour théâtre la Macédoine, alors qu’Héraclès cherchait le chemin qui menait au jardin des Hespérides.
La dernière expédition entreprise par Héraclès fut la guerre contre Eurytos dont le héros voulait se venger car, bien qu’il eût remporté le prix dans un concours de tir à l’arc dont l’enjeu était lolé, la fille d’Eurytos, ce dernier avait refusé de lui remettre la jeune fille. Héraclès laissa Déjanire à Trachis et se mit en marche vers Oechalie (en Thessalie, ou bien en Eubée), à la tête d’une armée d’alliés. Un violent combat s’engagea, dans lequel deux des fils de Céyx furent tués; mais Héraclès finit par remporter la victoire et tua Eurytos ainsi que tous ses fils. lolé essaya de s'enfuir en sautant du haut des remparts, mais ses vêtements se gonflèrent et freinèrent sa chute, de sorte qu’elle conserva la vie sauve. Héraclès fit d’elle sa concubine et l’envoya à Trachis avec d’autres prisonniers. Il donna également des ordres pour que Déjanire lui envoyât une tunique neuve, car il voulait offrir à Zeus un sacrifice d’action de grâces au cap Ténare, en Eubée. Lichas fut envoyé, mais Déjanire, craignant qu’Héraclès ne la délaissât pour lolé, trempa la tunique dans le sang de Nessos avant de la remettre à Lichas. Celui-ci remit le vêtement à Héraclès qui le revêtit. Dès le début du sacrifice, le sang empoisonné commença à dévorer la chair d’Héraclès. Dans sa douleur, le héros saisit Lichas et le lança au loin dans la mer. Lorsqu’il essayait d’enlever le vêtement, il arrachait sa peau en même temps. Il fut transporté par bateau à Trachis, où Déjanire, comprenant comment Nessos s’était joué d’elle, se pendit de désespoir. Héraclès comprit ainsi ce qui s’était passé et se souvint, à ce moment, d’une prophétie selon laquelle il devait mourir non pas de la main de vivants, mais de celle d’un mort. Il envoya une ambassade à Delphes et reçut l’ordre d’ériger un bûcher sur le mont Oeta, en Thessalie, et d’y monter, puis de s’en remettre à Zeus. Prenant avec lui son fils Hyllos, il obéit à l’oracle. Cependant, après que Hyllos eut dressé le bûcher et que le héros y fut monté, personne n’eut le courage d’y mettre le feu; seul Poeas, le roi des Moliens, qui faisait paître ses moutons non loin de là, accepta de le faire, après qu’Héraclès lui eut offert son arc et ses flèches lesquelles, selon la légende, ne manquaient jamais leur but. Et, tandis que les flammes dépouillaient Héraclès de ses éléments mortels, un éclair déchira le ciel, et le héros disparut. Selon la tradition il avait été enlevé sur l’Olympe, où il séjourna désormais parmi les dieux. Il se réconcilia avec Héra et épousa sa fille Hébé. Zeus le plaça parmi les constellations. Après sa déification, Héraclès réapparut sur la terre à plusieurs occasions, pour aider ses amis. Il persuada sa nouvelle femme, Hébé (la personnification de la jeunesse), de rajeunir Iolaos afin qu’il pût venir en aide aux Héraclides, en Attique, qu’Eurysthée, le viel ennemi du héros, s’apprêtait à attaquer ; Héraclès et Hébé accompagnèrent lolaos dans la bataille, sous la forme de deux étoiles qui brillaient sur le timon du char d’Iolaos. Héraclès apparut plus tard à Philoctète, à Lem-nos, et lui donna l’ordre de se rendre à Troie et d’aider les Grecs en utilisant l’arc qu’il avait autrefois donné à son père, Poeas; il promit à Philoctète que la blessure suppurante qui l’affligeait serait ainsi guérie. Héraclès devint un dieu très populaire et fut identifié, un peu partout en Méditerranée, à des dieux locaux qui possédaient certaines de ses caractéristiques; de ce fait, sa mythologie fut surchargée d’un nombre considérable de légendes annexes. Aucun des poèmes épiques retraçant ses exploits n’est parvenu jusqu’à nous, mais il est le héros de plusieurs pièces, notamment des Trachiniennes de Sophocle, de l'Alceste et de l’Héraclès d’Euripide. La légende d’Hercule connut un grand succès à Rome et en Etrurie, en partie sous l’influence des marchands phéniciens qui importèrent en Italie Melqart, leur dieu, qu’ils identifièrent à Héraclès. Reprenant les attributs de Melqart, le dieu italique devint le protecteur des marchands et des négociations ; l’exclusion des femmes de son culte du Grand Autel (Ara Maxima) est en accord avec une telle identification, car celles-ci ne figuraient pas dans le culte phénicien. Chez les Etrusques, Héraclès (sous le nom d’Herclé) était un dieu de la guerre et aussi des eaux douces et salées; d’autre part, la paternité de Tyrrhénos, héros éponyme des Etrusques, lui fut attribuée, de façon à relier l’Etrurie à la Grèce. En outre, probablement parce qu’il avait ramené Cerbère des Enfers, il était considéré comme un dieu important du royaume des Morts. Certains Etrusques affirmaient, par fierté nationale, que si Rome s’était libérée du tribut imposé par l’Etrurie, elle le devait au dieu Herclé et non aux Romains. C’est ce même dieu (nommé Hercule par les Romains) qui, lors de son passage sur le site de la future Rome, aurait vaincu le monstrueux Cacus, et qui, par la suite, aurait épousé la fille d’Evandre, Lavinia. Celle-ci donna naissance à deux garçons, Pallas (nom que porte souvent le fils d’Evandre) et Latinus (qui est en général père de Lavinia). Il enseigna l’art d’écrire aux colons arcadiens d’Evandre et établit sur le mont Palatin quelques-uns des Grecs qu’il avait emmenés avec lui. Une tradition raconte que, pendant qu’il était dans la région, il joua aux dés avec le gardien d’un temple qui lui était consacré. Le gardien perdit, et comme convenu, il procura à son maître un repas, un lit et une femme, qui se trouva être Fabula, une prostituée du pays. Une variante de la légende de Cacus montre ce dernier sous les traits d’un maraudeur étrusque qui pillait la Campanie et fut tué par Héraclès, lequel protégeait les colons grecs établis dans la région.
Héraclès (gr. Héraklès, lat. Hercules). Fils de Zeus (sous les traits d’Amphitryon) et d’Alcmène, il est le plus célèbre des héros grecs; ses exploits étaient connus et son culte observé d’un bout à l’autre du monde grec. Il descendait de Persée et, par Danaé, mère de Persée, de Danaos. Célèbre pour sa force, son courage, son endurance, sa bonté et sa compassion, il était également connu pour ses appétits, sa gloutonnerie et sa luxure. Considéré comme d’un secours universel face au danger, il était invoqué en toute occasion, et on l’appelait communément Alexikakos, « le détourneur de maux». Ultérieurement il symbolisa un idéal de comportement humain : noble dirigeant, il avait agi pour le bien de l’humanité et se trouvait finalement élevé au rang des dieux (Alexandre le Grand fit frapper sa monnaie au portrait d’Héraclès) ; mortel ordinaire, il pouvait espérer, à la fin d’une vie d’épreuves, rejoindre la cohorte des dieux après sa mort. Les stoïciens et les cyniques ont vu en lui un exemple de courage au détriment de ses autres qualités. Il a inspiré l’imagination populaire de tout temps, et des mythes, autrefois attribués à d’autres héros moins connus, ont été transférés sur sa personne, notamment le cycle des Travaux. Pour ce qui est de l’histoire de sa naissance à Thèbes. Au berceau, Héraclès étrangla deux serpents qu’Héra avait envoyés pour le tuer, car, toujours poussée à la jalousie par l’union de Zeus avec d’autres femmes, qu’elles fussent de nature humaine ou divine, elle le poursuivait d’une haine implacable (l’une des significations de son nom pourrait cependant être «gloire d’Héra»). Les plus grands experts l’instruisirent dans les différents arts: Eurytos, petit-fils d’Apollon, lui enseigna le tir à l’arc ; Autolycos lui enseigna la lutte, Pollux (voir dioscures) l’usage des armes, Rhadamanthe la sagesse et la vertu, Linos lui enseigna la musique. Quand ce dernier essaya de le corriger, Héraclès, dans un accès de colère, le tua avec son propre luth. Amphitryon envoya alors Héraclès garder ses moutons sur le mont Cithéron, le lieu du «choix d’Héraclès»: alors qu’il s’interrogeait sur le cours à donner à sa vie, deux femmes lui apparurent, le Plaisir et la Vertu, l’une offrant une vie de délectation, l’autre une vie de labeur et de gloire. C’est cette dernière qu’il choisit. À son retour à Thèbes, il soulagea la cité d’un tribut qu’elle avait été contrainte de payer à Orchomène, et Créon, roi de Thèbes, par gratitude, lui donna pour épouse sa fille Mégara. La fille cadette de Créon épousa Iphiclès (frère jumeau d’Héraclès), qui avait déjà un fils, lolos. Cedernier devint le fidèle compagnon et conducteur de char d’Héraclès. Quelques années plus tard, Héraclès, aveuglé par un accès de démence envoyé par Héra, tua Mégara et ses enfants, s’imaginant qu’ils étaient ceux de son ennemi Eurysthée. Après cette calamité, il s’exila et demanda à l’oracle de Delphes comment se purifier. Il lui fut répondu de se rendre dans la cité de Tirynthe, de servir son roi Eurysthée pendant douze ans, et de gagner l’immortalité en exécutant les travaux qu’Eurysthée lui imposerait. Il existe de nombreuses versions différentes des événements de la vie d’Héraclès : ainsi, la version que donne Euripide de sa folie situe celle-ci après l’exécution des Travaux; les raisons pour lesquelles Héraclès servit Eurysthée sont également expliquées de façons variées. On représente parfois Eurysthée comme un lâche se réfugiant dans un vaisseau d’airain quand Héraclès revenait avec quelque monstre. Par la suite, Héraclès épousa Déjanire, fille d’Oenée de Calydon, obtenant sa main en battant à la lutte le dieu-fleuve Achéloos. Quand Déjanire et lui s’en allèrent, ils arrivèrent au fleuve Éve-nos, en Étolie, qui était en crue. Un centaure, Nessus, fit traverser Déjanire et essaya de la violer, sur quoi Héraclès le perça d’une flèche empoisonnée. Alors qu’il agonisait, le centaure conseilla à Déjanire, apparemment avec une intention amicale, de conserver un peu de son sang qui, étalé sur un vêtement, lui ramènerait l’amour d’Héraclès si jamais il lui était infidèle ; c’est ce que fit Déjanire. Les aventures attribuées à Héraclès sont trop nombreuses pour qu’on les relate toutes. Il accompagna les Argonautes (voir également hylas) pendant la première partie de leur voyage. Il sauva de Thanatos, la Mort, Alceste, femme d’Admète. Il tomba amoureux d’Iole, fille d’Eurytos, roi d’Oechalia, mais son père et ses frères ne voulurent point la lui donner. L’un de ses frères, Iphitos, qui était venu à Tirynthe à la recherche de quelque bétail égaré de son père, fut précipité du haut des fortifications de la cité par Héraclès au cours d’une crise de folie. Pour ce meurtre, l’oracle de Delphes l’envoya en esclavage pour un an, et il fut vendu à Omphale, reine de Lydie. Là, il fut installé à un travail de femme, en habits féminins, tandis qu’Omphale revêtait sa peau de lion et portait sa massue. Quand sa période de servitude fut achevée, il conduisit une expédition contre Laomédon, roi de Troie. À une époque antérieure, Poséidon avait envoyé un serpent de mer contre Troie, et Laomédon avait promis ses célèbres chevaux à Héraclès s’il le tuait; mais quand l’exploit eut été accompli, il lui en avait refusé la récompense. Héraclès avait alors réuni une armée dans laquelle se trouvaient Télamon (père d’Ajax) et Pelée (père d’Achille), avait attaqué la cité et s’en était emparé. Héraclès donna à Télamon Hésione, fille de Laomédon, qui devint la mère de Teucros. Héraclès finit par attaquer Oechalia et enleva lole. Pour le faire revenir à elle, Déjanire suivit le conseil de Nessus et envoya à Héraclès une robe souillée du sang du centaure. Mais ce sang avait été empoisonné par le sang de l’hydre dans lequel Héraclès avait trempé ses flèches. La robe s’attacha à la chair d’Héraclès et lui causa de terribles souffrances. Pour y échapper il se fit transporter sur le sommet du mont Oeta et installer sur un bûcher funéraire. Il donna Iole à son fils Hyllos et persuada Poias, père de Philoctète, d’allumer le bûcher. Il fut alors transporté dans l'Olympe, se réconcilia avec Héra et épousa sa fille Hébé. Parmi les nombreux adversaires que rencontra successivement Héraclès, il y eut Cycnos, un fils d’Arès, qui déroba à Apollon les hécatombes qui devaient lui être sacrifiées à Delphes (sujet du poème Le Bouclier d’Héraclès attribué à Hésiode); Busiris, roi d’Égypte, qui , afin d’éviter une période de sécheresse, sacrifiait les étrangers se rendant dans son pays ; il tenta ainsi de sacrifier Héraclès alors qu’il se rendait chez les Hespérides ; et Eryx, le roi légendaire de la montagne du même nom en Sicile, contre qui Héraclès lutta et qu’il tua alors qu’il était à la recherche du bétail de Géryon, égaré dans son territoire.
Les légendes d’Héraclès ont établi un lien entre lui et les villes de Thèbes et de Tirynthe. Quant aux prétentions de ses descendants sur cette dernière ville (étendues à l’ensemble du Péloponnèse).
 

HÉRACLÈS Héros grec divinisé au terme d’une série d’épreuves mythiques destinées à racheter son affreux crime de sang (le meurtre de son épouse, la Princesse de Thèbes Mégara, et de leurs trois enfants, commis dans un élan de folie suscité par la jalouse Héra), Héraclès était le fils de Zeus et de la prude Alcmène, femme d’Amphitryon. Doté d’une force colossale, adoré par son père naturel qui mettait beaucoup d’espoir en sa naissance, il avait dû, dès son plus jeune âge, affronter la perfidie d’Héra en étouffant dans son berceau les serpents venimeux que celle-ci y avait délicatement déposés. Se distinguant dès l’adolescence par des exploits extraordinaires (en premier lieu son combat victorieux à dix-huit ans contre le lion de Cythéron), Héraclès, coupable malgré-lui d’un triple infanticide, allait pourtant être réduit à l’état de servitude après l’assassinat de sa famille. Imposés par le roi de Mycènes, Eurysthée son veule cousin, douze travaux de longue haleine lui permirent de se racheter en démontrant les belles qualités de cœur et de vaillance grâce auxquelles il allait gagner de juste droit son passeport pour l’Olympe des dieux. La liste de ses exploits comporte dans l’ordre chronologique le plus couramment admis : un combat victorieux à mains nues contre le lion de Némée la décapitation définitive de l’Hydre de Leme, monstre aux têtes multiples repoussant sans cesse ; la capture délicate du sanglier géant du mont d’Érymanthe et celle de Cérynée, la biche d’Artémis ; l’extermination des nuisibles oiseaux du lac Stymphale; le nettoyage en une journée seulement des crasseuses écuries d’Augias ; la capture du taureau sacré de Crète ; celle des juments mangeuses d’hommes du barbare Diomède, lui-même transformé, en représailles, en pâtée pour chevaux ; le vol de la ceinture de la reine des sauvages Amazones ; la conduite jusqu’en Grèce du troupeau de bœufs de Géryon ; la cueillette des pommes d’or du jardin des Hespérides ; et enfin la descente aux Enfers où il négocia après un valeureux combat avec Hadès le prêt du vilain dogue Cerbère. Notons au passage que, pendant ces douze aimées, Héraclès se paya le luxe de commettre d’autres bienfaits, en particulier celui qui consista à abattre l’aigle qui rongeait le foie de Prométhée. Au terme d’une longue vie bien remplie qui le vit encore à deux reprises tomber sous le joug de l’esclavage puis céder une nouvelle fois à la folie inspirée par Héra, le héros le plus prestigieux de l’Antiquité grecque (et romaine sous le nom latinisé d’Hercule) allait enfin jouir d’un repos mérité sur l’Olympe. Il se réconcilia définitivement avec sa cruelle belle-mère, et convola en troisième noces (après Mégara et Déjanire, sa seconde épouse) — cette fois pour le meilleur — avec la divine Hébé.

Fils d’une mortelle, Alcmène, et de Zeus qui, pour l’occasion de sa conception, avait pris les traits d’Am-phitryon, Héraclès dut subir de la naissance à la mort le courroux d’Héra. Mais, doué d’une force prodigieuse, il accomplit avec succès un nombre considérable d’exploits fabuleux dont le récit détaillé enchantait particulièrement les Grecs. Si le premier d’entre eux fut d’étrangler au berceau les serpents qu’Héra lui avait expédiés, celui par lequel le héros entra vraiment dans la légende fut de devenir, à 18 ans, l’amant des cinquante filles du roi Thespios. Héraclès épouse la fille du roi de Thèbes, le célèbre Créon, et conçoit avec elle de nombreux enfants qu’il massacrera, après qu’Héra l’eut frappé de folie. Il reçoit pour châtiment de se plier aux ordres de son cousin, le roi Eurysthée, dont il devient alors l’esclave, le temps des douze travaux. Le lion de Némée, l’hydre de Leme, le sanglier du mont Érymanthe, la biche de Cérynie, les oiseaux du lac Stymphale, les écuries d’Augias, le taureau de Crète, les chevaux de Diomède, la ceinture de la reine des Amazones, les bœufs de Géryon, Cerbère et enfin, les pommes d’or du jardin des Hespérides sont autant d’épreuves grâce auxquelles Héraclès transforme sa violence naturelle en véritable force. Les épisodes s’enchaînent, qui associent toujours au héros trois éléments intéressants, pour qui cherche une valeur de symbole dans le mythe : la force, bien sûr, mais aussi la servitude - Héraclès est l’esclave d’Héra, son jouet, le serviteur d’Eurysthée, mais encore celui d’Omphale dont il doit être la suivante soumise ! -, et enfin le désir. Héraclès est constamment entouré de femmes et ce sont elles qui vont causer sa perte. Après avoir épousé Déjanire, il apprend que celle-ci a été violée par le centaure Nessos. Il exécute Nessos mais celui-ci a le temps de confier à Déjanire un peu de son sang, qu’il lui présente comme un philtre d’amour pour ranimer le désir de son mari. Quand Héraclès s’éprend de la jeune Iole, Déjanire trempe la tunique qu’elle lui donne pour se changer dans ce sang, qui s’avérera empoisonné. La tunique colle alors au corps du héros et lui consume la peau. Héraclès préfère se tuer plutôt que d’endurer pareille souffrance. Dans le monde grec, Héraclès est lié à la civilisation dorienne (les soixante fils d’Héraclès - les Héraclides -vont envahir le Péloponnèse et y établir, selon la légende, la domination dorienne), il renvoie donc à une origine brutale et très ancienne, destructrice, mais aussi fascinante pour l’énergie qu’elle met en œuvre.