grotesque/sublime
grotesque/sublime
Le grotesque désigne ce qui est laid, difforme, horrible et par conséquent comique et bouffon. Le sublime s'intéresse au beau, au grand, à l'ordre parfait qui élève l'âme.
Commentaire À l'origine, le grotesque ne s'oppose pas au sublime : il est proche du burlesque, pratique la dérision, exprime la critique. Le sublime, lui, tient autant de l'esthétique que de la morale : il célèbre le triomphe de l'art et de la nature, alliés à la beauté, à la démesure de l'homme qui accepte le dépassement. Avec les romantiques, « grotesque » et « sublime » s'opposent, l'art se devant de les mélanger dans son souci de peindre toute la réalité. Bien plus, le grotesque devient expression de l'infini, d'un sérieux que son masque révèle : le sérieux du bouffon, du fou. A notre époque, le grotesque a revêtu un habit triste : il renvoie à l'absurde de l'existence.
Citation La muse moderne [...] sentira que tout dans la création n’est pas humainement beau, que le laid y existe à côté du beau... Elle se mettra à faire comme la nature, à mêler dans ses créations, sans pourtant les confondre, l’ombre à la lumière, le grotesque au sublime, en d’autres termes, le corps à l’âme, la bête à l’esprit. (Victor Hugo, Préface de « Cromwell ».)
GROTESQUE nom fém. pl. - Art. Nom donné à des œuvres d’art se caractérisant par leur aspect fantastique et caricatural. Nom masc. - Littérature. Ce qui déclenche le rire par son aspect contrefait ou ridicule à l’excès. Adj. - Langue courante. D’un ridicule achevé. ÉTYM. : le mot vient de l’italien grotta = « grotte ». En effet, à l’origine, le terme s’appliquait à des motifs décoratifs d’inspiration fantastique - sphynx, végétation ou rochers - qui ornaient les ruines (appelées « grotta ») de certains monuments antiques. Le mot fut repris par Théophile Gautier qui en fit le titre d’une étude consacrée à des poètes comme Villon ou Théophile de Viau : Les Grotesques (1844). Victor Hugo, dans sa Préface de Cromwell (1827), fait du grotesque l’un des éléments clés de son esthétique théâtrale, affirmant que la présence du grotesque est nécessaire à la vérité du drame romantique. De ce grotesque, deux personnages empruntés aux romans de Hugo - Quasimodo et « l’homme qui rit » - sont sans doute les meilleurs exemples.
Grotesque. Forme de comique provoqué par le spectacle de la déformation significative d’une forme perçue comme la norme. Le nom est donné à l’origine aux peintures dotées de motifs fantastiques (animaux étranges, chimères, etc.) découvertes à la Renaissance dans les monuments antiques ensevelis.
Hugo, dans la Préface de Cromwell, en 1827, définit le grotesque comme un mode d’expression spontané, populaire, qui n’est jamais soumis aux codes sociaux ou littéraires. Il le voit surgir dans les fêtes carnavalesques antiques et médiévales, tout comme dans la littérature antique (Pétrone, Juvénal, Apulée...) à partir du moment où l’unité tragique et épique de l’homme et de son destin commence à être entamée. C’est à la Renaissance surtout que le grotesque fait irruption. Le grotesque, dans lequel entrent pour une bonne part le burlesque et le bizarre, déclenche le rire sous toutes ses formes, du rire gras à l’ironie la plus fine. Le grotesque médiéval engendre un rire salubre, libérant le corps des interdits qui pèsent sur lui; en revanche, le grotesque romantique, proche du tragi-comique, suscite un rire grinçant. Il exclut le comique léger.