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GREEN Julien. Écrivain français d'origine américaine

GREEN Julien. Écrivain français d'origine américaine. Né le 6 septembre 1900 à Paris. Banquier, son père était originaire de Géorgie aux États-Unis et sa mère de Vir-ginie. De nationalité américaine, Julien reen est élevé selon une éducation à la fois puritaine et protestante dont, adolescent, il sort profondément marqué, si profondément même qu'il tente de la conjurer en abjurant le protestantisme et en se convertissant au catholicisme en 1916. Mais Julien Green apprend par l'expérience de la souffrance morale et spirituelle qu'il est difficile de s'engager sur le chemin de la foi authentique et il subit à plusieurs époques de sa vie, avant la Seconde Guerre mondiale, des crises religieuses et des crises de conscience dont il ressort à chaque fois plus fort et aussi Elus lucide, donc plus souvent pessimiste. Des crises, son Journal (1928-1972) porte le témoignage pathétique, et parfois insoutenable, tant l'art de Julien Green pour traquer les desseins de l'âme est à la fois subtil et impitoyable. Au cours de ces années difficiles, Julien Green sombrera soit dans l'agnosticisme, soit dans les effusions mystiques, et il manifestera même de l'intérêt pour le bouddhisme, avant de trouver une sorte de paix — qu'il sait précaire, mais qui est solide et finalement durable — dans le havre de la foi chrétienne et de la conviction catholique. Ce n'est pas un hasard si son premier ouvrage, Pamphlet contre les catholiques de France (1924), publié sous le pseudonyme de Théophile Laporte, reflète, à mi-parcours, ce cheminement d'une foi qui cherche sa lumière, et d'une âme qui dans sa violence soupire après Dieu, qui doute sans cesse, à la manière des vrais mystiques auxquels, par de nombreux côtés, Julien Green peut s'apparenter; ce que nous montrent aussi bien ses romans que ses pièces de théâtre. Après des études au lycée Janson de Sailly à Paris, et à l'université de Virginie aux États-Unis, le futur écrivain se fixe en France dès 1922. Il retournera certes plusieurs fois aux États-Unis où il séjournera pendant toute la durée de la Seconde Guerre mondiale, mais il n'y fera plus que de courts voyages après 1945. En 1926, il publie son premier roman, Mont-Cinère , qui sera suivi d'Adrienne Mesurat (1927) et de Léviathan (1929). Dans ces trois romans, Julien Green exprime déjà ses thèmes privilégiés, qui mettent en scène la passion toujours coupable du péché, le plaisir toujours sanctionné, le désir qui est contraire à la pureté. Mais Julien Green demeurera toujours un écrivain secret, et, avant la guerre, il ne se découvrira que lentement, au fur et à mesure que paraissent de nouveaux romans comme L'Autre Sommeil (1931), Epaves (1932), Le Visionnaire (1934), Minuit (1936). Julien Green y affirme son art, qui s'attache à exprimer, dans un lyrisme sourd et une analyse psychologique très intérieure et très fouillée, l'angoisse d'âmes brisées par la misère morale où les a souvent plongées une sexualité envahissante et diabolique; il inscrit aussi dans ces oeuvres le sentiment de la faute qui ne s'efface pas, qui marque à jamais celui qui l'a commise. D'autres romans, comme Varouna (1940), Si j'êtais vous (1947) et surtout Moïra (1950) développent, en les approfondissant jusqu'au vertige de la mort et de l'anéantissement, ces thèmes de la souillure dont on a pu dire qu'ils se situent entre ceux de Baudelaire et ceux de François Mauriac. Comme ces deux écrivains, Julien Green est saisi par la hantise et même par l'obsession du Mal. A ce Mal, dans ses derniers romans, Julien Green répond par une sorte de refuge dans le pessimisme, face au monde inquiétant et salissant, afin que celui-ci lui devienne étranger. Le Malfaiteur (1956), Chaque homme dans sa nuit (1960), L'Autre (1971) marquent fortement cette tendance à lancer une sorte de regard distant et lucide à l'encontre d'un monde pécheur et terrible : la paix et une certaine sérénité de l'âme sont ce prix. Cette sagesse, à la manière antique, qui donne à Julien Green un équilibre moral, religieux et psychologique fondamental après les années 60, s'exprime même par la joie diffuse qui transparaît dans son premier récit autobiographique, Partir avant le jour (1963). Dans ce livre, Julien Green raconte son enfance heureuse. Il sera suivi de trois autres confessions autobiographiques : Mille chemins ouverts (1964), dans lequel Julien Green, évoquant son adolescence pendant la guerre 1914-1918, étudie les différentes voies qui s'ouvraient à un jeune homme de cette époque, Terre lointaine (1966), qui clôt les années d'apprentissage et enfin Jeunesse et Liberté (1974) qui traite du commencement de l'âge adulte. Ces cinq ouvrages forment un contrepoint plus linéaire à son Journal qui se divise en 9 volumes : Les Années faciles (1928-1934), Les Derniers Beaux Jours (1935-1939), Devant la porte sombre (1940-1943), L'oeil de l'ouragan (1943-1945), Le Revenant (1946-1950), Le Miroir intérieur (1950-1954), Le Bel Aujourd'hui (1955-1962), Vers l'invisible (1958-1966), Ce qui reste de jour (1967-1972). Ce Journal dont les titres sont à eux seuls révélateurs des thèmes de l'obscurité et du secret qui habitent Julien Green n'entend aucunement être le reflet de l'actualité politique — que Julien Green a en horreur comme il le dit lui-même — mais il tente d'être le miroir d'une âme qui, dans le quotidien de l'intimité, de l'amitié — l'amitié tient une grande place dans ce Journal —, dans les réflexions, les méditations, les prises de conscience, les renoncements, les reniements, les espérances, les désirs et les plaisirs tourmentants et tourmentés, les joies pures et impures, cherche son cheminement, son rythme, et qui, aveugle ou lucide, ressent le monde et la vie comme une épreuve nécessaire. Comme François Mauriac, auquel Julien Green peut être comparé, parce qu'héritier d'un protestantisme assez janséniste et d'un catholicisme inquiet (il se sent concerné par le premier sur le plan de la grâce et par le second sur le plan du péché), Julien Green a pensé qu'il pourrait aussi donner le meilleur de lui-même au théâtre. Sud est représenté en 1953 : dans le décor du fameux « Sud profond » aux États-Unis dont il garde le souvenir nostalgique encore vif, Julien Green met en scène un lieutenant tenté, à la veille de la Guerre de Sécession, par l'homosexualité, et préférant une sorte de mort provoquée au déshonneur que lui réserve une société qui ne le comprendrait pas. Avec L'Ennemi (1954), c'est à la Révolution française que Julien Green emprunte son cadre historique, mais il s'agit surtout de l'ennemi intérieur, le Diable qui provoque les passions pour asservir les âmes. Enfin, L'Ombre (1956) montre combien la mémoire peut causer de ravages dans des âmes sensibles. Dans ces pièces l'éclairage cru, trop brutal de la scène, la nécessité d'une peinture rapide des personnages et de leurs dimensions existentielles nuisent à la confidence, aux analyses subtiles, lentes et pénétrantes, des tumultes de l'amour et du trouble des âmes qui font tout l'art subtil de Julien Green, plus à l'aise dans l'épaisseur romanesque. Comme François Mauriac l'avait lui-même souhaité, c'est Julien Green qui occupe son fauteuil à l'Académie française depuis 1971. ? « Green romancier... cherche seulement, quand le don de double vue l'habite, à découvrir ce qui se cache derrière les apparences, et à nourir de sa chair le personnage qui s'est imposé et se comporte à son égard en véritable vampire. » Robert de Saint-Jean. ? « Tout roman greenien est aventure d'un être brutalement jeté hors de ses habitudes et contraint à la difficile, tragique, découverte de soi » Jacques Petit.

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