GONCOURT Edmond Louis Antoine, et Jules Alfred, Huot de. Ecrivains français
GONCOURT Edmond Louis Antoine, et Jules Alfred, Huot de. Ecrivains français. Edmond de Concourt est né à Nancy (Meurthe-et-Moselle) le 26 mai 1822 et il est mort à Champigny (Seine-et-Marne) le 16 juillet 1896; son frère Jules est né et mort à Paris (17 décembre 1830-20 juin 1870). Fils d'un officier supérieur de la Grande-Armée, ils firent l'un après l'autre d'assez bonnes études en montrant pour les lettres un penchant des plus marqués. De huit ans plus âgé que son frère, Edmond eut le premier le désir d'écrire. Mais en raison de la conformité de leurs goûts, ils s'associèrent bientôt dans cette entreprise. Quant au tempérament, c'était une autre affaire : autant Edmond était d'une humeur taciturne et encline à se concentrer, autant Jules apparaissait comme l'enthousiasme en personne. Ce contraste fit que l'on se partagea la besogne : Edmond, avec minutie, dressait le plan de chaque ouvrage; Jules, que passionnait l'art d'écrire, s'attachait surtout au style. Il serait pourtant absurde de parler de chacun d'eux en particulier. Bien qu'Edmond ait survécu à son frère tout un quart de siècle, il n'en demeure pas moins son compagnon, parce leurs oeuvres maîtresses ont été toutes achevées, ou du moins conçues pendant leur collaboration. Les frères Goncourt offrent donc le spectacle de deux esprits qui ont su se fondre en un seul pour atteindre au même idéal. Quel était donc cet idéal ? Se consacrer d'abord à la peinture de la vie vraie : « De même que l'histoire se fait avec des documents écrits, le roman actuel doit se faire avec des documents relevés d'après nature. » Ce point de vue doit englober tous les types d'humanité, depuis l'aristocratie jusqu'au menu peuple. Ensuite, être résolument « moderne », c'est-à-dire analyser jusqu'à l'exhaustion toute la complexité de l'époque où l'on vit. Pour finir, le problème du « style » : se forger un vocabulaire original, apte à traduire l'univers ainsi mis à jour ce qui implique l'abandon de la syntaxe traditionnelle. Cet instrument neuf, ils l'appelèrent l'écriture artiste. De là, ce style papillotant et plein de fièvre auquel manque tout naturel et qui devait bientôt vieillir. S'étant voués de bonne heure à ce roman réaliste dont Zola fut le plus illustre représentant, après Stendhal, Balzac et Flaubert, les Goncourt lui sont toujours restés fidèles. Travailleurs infatigables, ils furent si bien possédés du démon de l'expression que leur vie entière peut passer pour un long martyre. Comme romanciers, ils débutèrent par Charles Demailly (1860). Puis vinrent Soeur Philomène (1861), Renée Mauperin (1864), Germinie Lacerteux (1865), Manette Salomon (1867), Madame Ger-vaisais (1849). Si Renée Mauperin est le plus populaire de leurs romans, Manette Salomon demeure leur chef-d'oeuvre. D'Edmond seul, nous avons trois récits : La Fille Ëlisa (1877), les Frères Zemganno (1879) et La Faustin (1882). Même dans le domaine de l'histoire, les Concourt ont eu l'ambition de faire avant tout oeuvre d'art. On sait que leur époque favorite fut le XVIIIe siècle français, y compris la Révolution. Il faut citer : Histoire de la Société française pendant la Révolution (1854), Portraits intimes du XVIIIe siècle (1856), Madame du Barry (1860), La Femme au XVIIIe siècle (1862), Madame de Pom-padour (1878), sans oublier L'Art du XVIIIe siècle (1859-1875). Ouvrages curieux où revit surtout l'anecdote, documentés à merveille et parfois exaspérants par leur minutie. Féru de peinture comme son frère, Edmond s'est consacré en outre à l'étude de l'art japonais comme peuvent en témoigner les études qu'il publia sur ses vieux jours : Outamaro (1891), Hokousai (1896), etc. S'il faut en venir au Journal des Concourt (1851-1896), que plus d'un tiennent pour leur chef-d'oeuvre, on sait qu'Edmond n'en publia qu'une partie après la mort de son frère (entre 1887 et 1896). Tout le reste est encore inédit, du fait qu'il contenait mainte révélation gênante sur les vivants. Mais sa publication ne saurait tarder. Ce qu'on en possède (neuf volumes) ne laisse pourtant pas de nous éclairer sur l'espèce d'enfer que fut leur vie d'écrivain. Il importe, enfin, de faire état d'un point d'histoire littéraire : au second étage de son hôtel d'Auteuil (qu'il appelait « le grenier »), Edmond de Concourt avait l'habitude de réunir le dimanche un petit cénacle d'amis. C'est dans ce grenier que prit corps l'idée de fonder l'Académie des Concourt. Instituée par l'écrivain l'année même de sa mort (1896), elle fut reconnue d'utilité publique en 1903. Nul n'ignore qu'elle se compose de dix membres qui sont chargés de décerner chaque année un prix « au meilleur volume d'imagination en prose » (de préférence un roman). Les premiers membres en furent les écrivains suivants : Elémir Bourges, Léon Daudet, Lucien Descaves, Gaston Geoffroy, Léon Hennique, J.-K. Huysmans, Paul Margueritte, Octave Mirbeau, les frères Rosny. ? « MM. de Concourt sont des artistes aussi distingués que convaincus et sincères, un talent rare en deux personnes, de parfaits gentilshommes de lettres. Ce sont des modernes et de purs modernes; ils marchent hors rang, courageux et unis, à leurs risques et périls, se tenant par goût aux avant-postes de l'art; ils tentent constamment, ils cherchent sans cesse. Je les définirais encore comme deux hérétiques en littérature, des plus consciencieux et des plus aimables. Et qui est-ce qui n'est pas plus ou moins hérétique aujourd'hui?» Sainte-Beuve. ? « Les Concourt donnèrent de la solidité à l'art même en y introduisant la science sous la forme de document : le document humain... Zola, Flaubert gagnèrent leur salut dans la description; les Concourt s'attachèrent au fait. Voilà la trouvaille ! » J.-H. Rosny jeune. ? « Pour la première fois sans doute, un écrivain réalisa le rêve de travailler dans un décor de haut goût, et le petit hôtel du boulevard Montmorency pouvait faire songer, vers 1895, à la maison d 'un fermier général ami des peintres, de ces Messieurs de l'Encyclopédie, des imprimeurs, des graveurs, des relieurs et des tapissiers royaux. » Léo Larguier. ? « Je sais trop ce que je dois aux auteurs de Germinie Lacerteux et à celui de La fille Êlisa pour ne point leur garder, intacte, l'admiration que m'inspirèrent ces deux romans. » Francis Carco. ? « Il ne m 'est pas pénible, il ne me paraît nullement injurieux d'avouer que rien ne m'attache aux romans des frères Concourt. Germinie Lacerteux semble avoir reçu de Réjane, quand elle joua la pièce, sa plus large part de vie réelle. Je lus Renée Mauperin, La Faustin... J'avais l'impression, chaque fois, qu 'un malheur immérité disputait, à de probes et minutieux observateurs, à des écrivains désintéressés, leur chance d'avoir du génie. » Colette.
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- GONCOURT, Edmond Huot de (1822-1896)Ecrivain et historien, il collabore avec son frère Jules à de nombreuses activités : ils écrivent des romans réalistes (Renée Mauperin) et consacrent des études à des peintres comme Watteau.
- Commentez ces propos d'Edmond et de Jules de Goncourt : « Le grand talent en littérature et de créer, sur le papier, des êtres qui prennent place dans la mémoire du monde, comme des êtres crées par Dieu, et comme ayant une vraie vie sur la terre ».
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- Louis Antoine de Bougainville par Jules RouchDirecteur du Musée océanographique, Monaco De sa très longue vie - il est mort à quatre-vingt-deux ans - l'histoire aretenu surtout son titre de voyageur autour du monde.