GOMBROWICZ Witold. Écrivain polonais
GOMBROWICZ Witold. Écrivain polonais. Né le 4 août 1904 à Maloszyce, mort à Vence (Alpes-Maritimes) le 26 juillet 1969. La paradoxale carrière littéraire de Witold Gombrowicz commence en 1933. C'est cette année-là que le jeune juriste stagiaire à la Cour d'Appel de Varsovie publie un premier volume de récits : Mémoires de la période de maturation, diversement accueilli par la critique, mais dont on parle beaucoup. Quelques mois plus tard. Gombrowicz démissionne de ses fonctions pour se consacrer à la seule littérature. Il appartient à une famille de noblesse terrienne et a reçu l'éducation traditionnelle dans ce milieu : droit, économie, voyage d'études en France; rien d'astreignant ni qui puisse passer pour une insupportable brimade. Or, c'est contre les méfaits de l'éducation que part en campagne le premier roman de Gombrowicz, Ferdydurke (1938). Reprenant le thème de l'« immaturité », l'auteur proteste contre l'école, et tout ce qui refoule l'homme dans l'enfance, éducation, ordre social, arts, sciences ou techniques. Il s'agit déjà d'une révolte contre tout ce qui empêche l'individu d'être lui-même. Pour Gombrowicz, comme pour Sartre, qui commence au même moment à écrire, l'enfer, c'est les autres, c'est-à-dire la société. On retrouve la même révolte dans les oeuvres suivantes : Yvonne, princesse de Bourgogne drame également publié en 1938, Le Mariage, drame, et dans Le Transatlantique roman, tous deux parus en 1953. Gombrowicz est alors en Argentine, où la guerre l'a surpris en 1939. Il a formellement refusé de revenir en Europe participer au combat pour la défense de la patrie. L'homme est en proie aux conventions, aux attitudes. Asphyxiés que nous sommes par l'étroite conception que les autres ont de nous, nous n'avons plus rien qui soit à nous, pas même notre être. Si Gombrowicz pose au « déserteur », c'est que, plutôt que de défendre la « patrie », c'est-à-dire les autres, il a préféré se battre pour la « filie », c'est-à-dire pour lui-même. Le Journal publié dans Kultura de 1953 à 1957, ne fait que redire sous une forme plus personnelle cette lutte contre l'absurdité et les conventions, que les drames et les romans exprimaient de façon métaphorique. Nous y gagnons des jugements à l'emporte-pièce sur les hommes et sur l'histoire, mais aussi une réflexion constante de l'auteur sur lui-même. L'accusateur s'observe, et se voit ridicule au moment même où il atteint la sincérité : le devoir d'être soi-même ne va pas sans risques. La Pornographie (1960) et Cosmos (1961) vont dans le même sens : lorsque quelque tragédie la guerre, par exemple fait craquer les conventions, et que disparaît l'armature morale de l'homme, l'individu se désintègre en même temps que l'être social; il ne reste que le déchaînement des instincts, la bêtise, la veulerie, la pornographie, ou la banalité et la mesquinerie, seules réactions de l'homme en face de l'aveugle puissance des choses. La vie humaine est un drame, parfois aussi une Opérette [Operetka, 1963]. La critique n'a pas manqué de souligner cette sorte d'existentialisme destructeur qui se dégage de l'oeuvre de Gombrowicz. Le fait que la plus grande partie de ses livres aient été écrits en émigration, qu'ils furent très vite traduits, et soient restés longtemps quasiment interdits en Pologne, a sans doute masqué le caractère foncièrement polonais de cette oeuvre. Or, l'individualisme quelle professe, le mépris de la foule, le goût d'être autre, le plaisir de choquer ont un nom dans les moeurs et dans les lettres polonaises : le « sarmatisme ». Gombrowicz, hobereau (« szlachcic ») polonais, né au pays du « liberum veto » et de l'anarchie nobiliaire, est aussi un authentique réactionnaire, imbu de sa supériorité. Son égotisme masque mal un certain égoïsme de classe. Le style même de ses oeuvres et le relâchement de leur structure rappellent moins les recherches des écoles littéraires modernes que la « gaweda szlachecka », libre causerie sans ordre de la littérature nobiliaire polonaise des siècles passés. Ce n'est pas là son moindre charme.
Liens utiles
- Zu?awski Jerzy , 1874-1915, né à Lipowiec, écrivain polonais.
- comment l’écrivain peut-il montrer la valeur de la parole poétique ?
- « Le journaliste s'occupe du temps qui passe, l'écrivain du temps qui dure. Le journaliste s'intéresse à l'urgent et l'écrivain à l'essentiel, et il est bien rare que l'urgent et l'essentiel se recoupent ». Commentez et discutez, en vous appuyant sur des exemples précis, ce propos de Jean d'Ormesson.
- Le critique Andrea del Lungo définit l'incipit comme « le lieu stratégique du texte ». En quoi l'ouverture d'un roman est-elle révélatrice du regard de l'écrivain sur l'homme et le monde ?
- Si le roman est capable de peindre le réel, dans quelle mesure cette réalité est-elle objective ou historique ? L'auteur parvient-il toujours à dissocier le réel du fictif ? Enfin, le roman représente-t-il seulement une vision édulcorée et fantasmée des événements ou plutôt une vérité propre à l'écrivain?