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GOBINEAU Arthur de

GOBINEAU Arthur de
1816-1882
Romancier et nouvelliste, né à Ville-d’Avray. La famille du comte de Gobineau était de bonne « noblesse de robe », et son grand-père siégeait en qualité de conseiller au parlement de Guyenne. Venu à Paris sans fortune, il occupe de petits emplois à la Compagnie du gaz, puis aux Postes ; publie en feuilleton dans les journaux ses premiers récits et nouvelles (Scaramouche, 1843). De ces œuvres de jeunesse se détachent un roman Le Prisonnier chanceux (1846) et surtout la nouvelle Mademoiselle Irnois, un de ses chefs-d’œuvre (1847). C’est en 1849 que Tocqueville, nommé ministre des Affaires étrangères, le choisit comme chef de cabinet, et lui ouvre la carrière diplomatique. Il continue à publier des nouvelles (entre autres, l’étonnante Adélaïde, 1869) et des essais que pour sa part il rangerait plutôt sous la rubrique « scientifique » (Essai sur l’inégalité des races humaines, 1853-1855 ; Les Religions et tes philosophies de l’Asie centrale, 1865). Il finira, peu après 1870, ambassadeur à Stockholm. Mais d’ici là, que de petits postes sans gloire ! À Berne (qui l’accable par la vertu de sa démocratie), à Hanovre (qui, par contre, le ravit par la frivolité de sa cour), à Francfort, à Téhéran, à Terre-Neuve, à Athènes, à Rio de Janeiro... « Après avoir lu toute sa correspondance diplomatique (écrit son subtil exégète Jean Mistler), je suis obligé de reconnaître que cet homme de génie était assez dépourvu des qualités d’habileté et de souplesse qui font souvent la carrière des médiocres... » (À Rio de Janeiro, note encore Jean Mistler, « il étrangla, à moitié, au théâtre un certain docteur Saboia, qui était probablement un malotru, mais fort bien apparenté ».) Ce n’est qu’après 1870 qu’il peut se consacrer entièrement à ses œuvres littéraires et qu’il publie ; Les Pléiades, un des meilleurs romans du XIXe siècle (1874) et les Nouvelles asiatiques (1876). Enfin il se retire en Italie, où il mourra. Les héros du roman Les Pléiades sont trois voyageurs (l’Anglais Wilfrid Nore, le sculpteur allemand Conrad Lanze et un aimable désœuvré français, Louis de Landon) qui se sont rencontrés et aussitôt liés d’amitié, en découvrant leur commune vertu : ils appartiennent tous les trois à la race des êtres d’exception. Ils sont des « calenders », des « fils de roi ». Pour le reste, l’humanité se répartit en trois tribus; les imbéciles, les drôles et les brutes. Après que chacun des trois calenders a raconté l’histoire de sa vie, ils se séparent ; mais nous les retrouverons, dans la seconde partie du roman, à la cour du prince de Burbach. (Cette cour de Burbach ressemble fort, d’ailleurs, à celle de Hanovre, dont Gobineau énumérait les curieux mérites dans une lettre à sa sœur : Hanovre est charmant; une cour, une favorite, un maréchal du palais, des courtisans, des intrigues, un régiment des gardes... etc.) Nos trois « fils de roi » sont fort affairés à jouer savamment des interférences et des entrecroisements de leurs aventures amoureuses. Puis, devenus les confidents du prince de Burbach, Jean-Théodore, ils assistent au récit des amours féeriques et chastes du prince et de sa cousine Aurore. Et cette dernière partie est au demeurant la plus poétiquement étrange d’un roman qui ne ressemble à aucun autre dans notre littérature. Gobineau a visiblement pratiqué la littérature romanesque allemande du début du XIXe siècle ; en particulier le Titan (de Jean-Paul Richter) et Les Affinités électives de Goethe. En outre sa familiarité de longue date avec les petites cours princières et son expérience des voyages confèrent une vie intense a ce récit, rempli de détails visiblement «vécus », rapportés par un esprit tout ensemble ironique et fervent. Il est regrettable que de nos jours encore, une rancune aussi tenace que mal fondée s’attache au nom de Gobineau ; et ce, par la faute des déformations que les doctrinaires allemands du racisme ont fait subir à l’Essai sur l’inégalité des races humaines, qui fut longtemps seul à représenter son auteur aux yeux du public français. Gobineau lui-même s’est trompé, d’ailleurs, en n’attachant d’importance qu’à cette part « scientifique » de son œuvre; ne commettons pas la même erreur d’optique, et lisons Adélaïde et Mademoiselle Irnois. Lisons toutes ses nouvelles et surtout son roman, Les Pléiades.
Diplomate et philosophe français. D'une famille de petite noblesse sans fortune, il dut gagner sa vie en écrivant des romans-feuilletons tout en étudiant les langues et les civilisations orientales. Remarqué par Tocqueville, qui le prit comme chef de cabinet aux Affaires étrangères (1849), il commença alors une carrière diplomatique qui le mena dans plusieurs postes en Allemagne, puis en Perse (1855/58 et 1861/63), à Athènes (1864/68), au Brésil (1869/70) et à Stockholm (1872/77). Auteur de romans, d'ouvrages d'érudition, de récits de voyage, il se fit le théoricien de l'« aryanisme » dans son Essai sur l'inégalité des races humaines (1853/55). Il y affirmait, en illustrant sa thèse par de vastes connaissances historiques, que la race est le facteur essentiel de l'histoire humaine, qu'il existe une hiérarchie des races et que la race aryenne (indo-européenne) a été, du fait de sa supériorité intellectuelle et morale, à l'origine de toutes les grandes civilisations. Mais cette race, essentiellement créatrice de valeurs, a été conduite, de par son besoin d'expansion, à se mêler à des races inférieures, ce qui, aujourd'hui, entraîne inéluctablement sa perte. Les idées racistes de Gobineau rencontrèrent alors très peu d'audience en France ; mais elles eurent une influence certaine sur Richard Wagner et furent ensuite utilisées par des théoriciens pangermanistes, notamment H.S. Chamberlain. La pensée de Gobineau est une des sources du racisme hitlérien avec le darwinisme politique et les théories sur la sélection naturelle.