GIONO Jean
GIONO Jean
1895-1970
Poète et romancier, né à Manosque. De très modeste origine, il est encore employé de banque dans sa ville natale lorsque paraît Accompagnés de la flûte, un recueil de vers (1924) qui sera suivi d’une longue série de poèmes romanesques. Influencés d’abord dans une large mesure par ceux de Ramuz, ses romans (la première série dite de « Pan », de 1928 à 1930 : Pan I, II et III, c’est-à-dire Colline, Un de Beaumugnes, Regain) seront très vite dégagés de toute emprise, si ce n’est celle de sa terre provençale et, au-delà, de philosophies antiques, qui se résolvent en une sorte de panthéisme très personnel, dont le prodigieux lyrisme cosmique enthousiasmait l’« élémentiste » Gaston Bachelard : Le Chant du monde (1934), Que ma joie demeure (1935), chef-d’œuvre à coup sûr immortel (et devenu déjà « matière d’enseignement » ; cf. les Petits Classiques en usage dans les lycées) ; Batailles dans la montagne (1937), etc. L’accueil enthousiaste que réserva la jeunesse à cette littérature « aérée », et plus encore à l’anarchisme bucolique, très audacieusement pacifiste, qui la complétait dans le pamphlet lyrique des Vraies richesses (1936) et dans Refus d’obéissance (1937), devait se transformer en rancune lorsque Giono - trois ans plus tard à peine - sembla sympathiser avec le régime de Vichy : Pétain n’avait-il pas eu la bonne idée de prêcher le retour à la terre? (Triomphe de la vie, 1942).
Depuis la fin de la guerre, Giono, après un léger temps d’arrêt, a trouvé une nouvelle voie. Et du même coup, un regain d’attention de la part du public ; qui n’est peut-être pas, tout à fait, le même. Au surplus, la vivacité du tempo - et c’est là signe de jeunesse - n’a fait chez lui que s’accentuer ; du petit trot de son Voyage en calèche (1947, destiné à la scène) il en est arrivé bientôt au galop des Grands chemins (1951), de la série des «Angelo» (quatre titres de 1951 à 1958) et des Deux cavaliers de l’orage (1965). Au fond, pour avoir déçu les admirateurs de « l’homme Giono », le romancier n’a pas changé quant à l’essentiel, tout au long de sa vie. Mêmes défauts mélange de malice rustique et de naïveté profonde (fondamentale). Mêmes vertus : génie verbal et faculté d’étonnement, sans cesse renouvelé, devant chaque jour que le ciel veut bien étaler pour la joie de ses yeux.