FREUD : LA RELIGION, RÉALISATION DE DÉSIRS INCONSCIENTS
FREUD : LA RELIGION, RÉALISATION DE DÉSIRS INCONSCIENTS
Avec l'art, la religion est un lieu privilégié de l'investigation psychanalytique, dans la mesure où elle est moins le produit d'une pensée réfléchie que de désirs inconscients auxquels elle apporte une forme de satisfaction.
« Ces idées, qui professent d’être des dogmes, ne sont pas le résidu de l’expérience ou le résultat final de la réflexion : elles sont des illusions, la réalisation des désirs les plus anciens, les plus forts, les plus pressants de l’humanité ; le secret de leur force est la force de ces désirs. Nous le savons déjà : l’impression terrifiante de la détresse infantile avait éveillé le besoin d’être protégé — protégé en étant aimé — besoin auquel le père a satisfait ; la reconnaissance du fait que cette détresse dure toute la vie a fait que l’homme s’est cramponné à un père, à un père cette fois plus puissant. L’angoisse humaine en face des dangers de la vie s’apaise à la pensée du règne bienveillant de la Providence divine, l'institution d'un ordre moral de l'univers assure la réalisation des exigences de la justice, si souvent demeurées irréalisées dans les civilisations humaines, et la prolongation de l'existence terrestre par une vie future fournit les cadres de temps et de lieu où ces désirs se réaliseront. Des réponses aux questions que se pose la curiosité humaine touchant ces énigmes : la genèse de l'univers, le rapport entre le corporel et le spirituel, s’élaborent suivant les prémisses du système religieux, et c'est un formidable allègement pour l'âme individuelle que de voir les conflits de l'enfance émanés du complexe paternel—conflits jamais entièrement résolus— lui être pour ainsi dire enlevés et recevoir une solution acceptée de tous. » Freud (Orléans, B, 79)
ordre des idées
1) Thèse centrale : Les doctrines religieuses (les dogmes) ne sont pas produites par l'expérience ni par la réflexion, mais constituent des formes de satisfaction de désirs inconscients. 2) Explication : a) Ce que sont ces désirs : ils se ramènent essentiellement au désir d'être protégé. — Origine de ce désir : la détresse infantile, c'est-à-dire l'état du nourrisson qui dépend entièrement d'autrui pour satisfaire ses besoins vitaux, état générateur de terreur et d'angoisse. Or le traumatisme de cet état de détresse poursuit l'homme toute sa vie. b) Comment la religion y répond : elle fournit à l'homme adulte — un Père bienveillant (Dieu), substitut tout-puissant du père du nourrisson ; — des réponses à toutes les questions angoissantes auxquelles l'homme ne peut pas répondre et par rapport auxquelles il se retrouve dans un état de détresse (la mort, l'origine de l'univers, etc.)