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FRANCK César Auguste Jean Guillaume Hubert

FRANCK César Auguste Jean Guillaume Hubert. Musicien français d'origine belge. Né à Liège le 10 décembre 1822, mort à Paris le 8 novembre 1890. Le principal inspirateur de la résurrection de l'école musicale française après la guerre de 1870 était d'ascendance belge ou, plus exactement, rhénane, puisque sa mère était originaire d'Aix-la-Chapelle et son père du territoire, alors prussien, d'Eupen et Malmédy. Il semble avoir porté toute sa vie le poids de son enfance assez malheureuse : fils d'un petit banquier, dur, autoritaire, cupide, impatient de faire de lui un jeune prodige à la Mozart ou à la Liszt, il effectua des l'âge de onze ans des tournées de virtuose à travers la Belgique. En 1835, lorsque César Franck eut terminé ses premières études à l'Ecole de Musique de Liège, son père l'emmena à Paris, où sa vie ne changea guère : son éducation générale et surtout littéraire fut des plus négligées, et l'adolescent fut contraint de gagner déjà sa vie en donnant des leçons particulières de piano. Cependant, admis au Conservatoire, il prit avec Reicha ses premières leçons de composition, travailla dans les classes de Leborne et de Zimmermann, et, à la même époque, découvrit les oeuvres de Beethoven dans les exécutions fameuses de la Société des Concerts du Conservatoire dirigée par Habeneck; élève exceptionnel, il obtint en 1838, à l'âge de seize ans, un « grand prix d'honneur de piano », distinction exceptionnelle créée spécialement pour lui. Premier prix de, fugue en 1840, d'orgue en 1841, il allait préparer le concours du Prix de Rome, lorsqu'il reçut de son père l'ordre de rentrer en Belgique pour y reprendre sa carrière de pianiste virtuose (1841). De cette époque datent ses premières compositions, la majorité de ses oeuvres pour piano seul et également les trois Trios (1841), pour piano, violon et violoncelle, pièces sans grande originalité d'ailleurs. Les tournées en Belgique s'étant révélées assez peu fructueuses, César Franck, en 1843, revint s'installer à Paris avec sa famille qu'il dut faire vivre avec les cachets de ses leçons. Ce ne fut qu'en 1848 qu'il parvint à s'affranchir de la tutelle paternelle, en se mariant avec une de ses élèves : il continua toutefois à vivre dans la gêne, en dépit de son labeur incessant de professeur et d'organiste, qui, durant toute sa vie, ne lui laissa jamais plus de deux heures chaque jour à consacrer à la composition. Sa personnalité commença de s'affirmer avec l'oratorio biblique Ruth, exécuté le 4 janvier 1846; l'oeuvre n'eut pourtant aucun succès, le public n'y voyant qu'une imitation du Désert de Félicien David. Après avoir tenu, l'orgue de Notre-Dame-de-Lorette et de Saint-Jean-Saint-François, César Franck eut la joie de se voir confier le clavier de Sainte-Clotilde, qu'il tiendra pendant trente ans et où il fera admirer son génie d'improvisateur que Liszt rapprochait de celui de J.-S. Bach. En 1872, naturalisé français, il obtint le poste de professeur d'orgue au Conservatoire, succédant ainsi à son maître, Benoist; mais il ne fut jamais très estimé de son directeur, Ambroise Thomas, et lors d'une vacance de la classe de composition, il se vit préférer Ernest Guiraud. On ne lui accordait guère que des talents de virtuose et de professeur : ce fut à ce seul titre, et à l'âge de cinquante-six ans seulement, qu'on lui décerna la Légion d'honneur. Les pouvoirs officiels se souciaient si peu de lui qu'à ses obsèques ni le Ministre, ni l'Administration des Beaux-Arts, ni même le Conservatoire ne se firent représenter. L'obscurité dans laquelle resta Franck pendant toute sa carrière est due en partie a ce qu'il fut un compositeur exceptionnellement tardif : aux approches de la cinquantaine, il n'avait encore rien produit d'important, si ce n'est ses premières Mélodies (1846-48), son Prélude, fugue et variation (1860-62), une Messe à trois voix (1860), théâtrale et trop proche encore de Gounod, et des oeuvres de musique religieuse (Six pièces pour grand orgue, 1860-62), assez conventionnelle et fade imagerie pieuse, comme d'ailleurs les célèbres Psaume CL et Partis angelicus où l'on aurait tort de chercher des traits de sa personnalité profonde. Isolé de la vie mondaine, Franck a pris lentement conscience de son génie, sans aide extérieure. C'est avec Rédemption (1873) et Les Béatitudes , écrites de 1869 à 1879, que débute la série des oeuvres maîtresses comprenant le Prélude, choral et fugue (1885) ;les oeuvres de musique de chambre : le Quintette pour piano et cordes écrit en 1877-78, la Sonate pour violon et piano (1886), le Quatuor (1889); les poèmes symphoniques : Les Eolides (1876), Le Chasseur maudit (1882), Les Djinns (1884), Psyché (1887-88); les oeuvres pour orgue : Trois chorals (1890); enfin les Variations symphoniques (1885) pour piano et la grande Symphonie en ré mineur (1886-88). Professeur timide, à la large face un peu fade, prématurément flasque, à la redingote noire mal soignée, aux pantalons étriqués, César-Auguste Franck est de cette race de musiciens exclusivement musiciens qui semblent, hors leurs portées, n'avoir ni curiosités ni passions d'aucune sorte. Composer, créer, solitaire et vivifié par les voix intérieures, il semble bien que cela, finalement, lui suffise, et d'être aimé par un petit groupe d'artistes fervents qu'il estime. On dirait qu'il ne sent pas, autour de lui, l'indifférence, la mauvaise volonté officielles; pourtant, en 1879, lorsqu'il envoie aux personnalités du monde musical des invitations pour une audition privée des Béatitudes, personne ne se dérange; après l'audition de sa Symphonie, Gounod proclame que cette oeuvre est « l'affirmation de l'impuissance poussée jusqu'au dogme»; seul le Quatuor sera accueilli avec enthousiasme à la Société Nationale, mais quelques mois seulement avant la mort du musicien. La nature débonnaire de Franck, sa modestie candide, sa douceur chrétienne ont fait de lui une sorte de personnage légendaire. Et sans doute est-ce la solitude de sa vie laborieuse qui lui permit de réaliser sa mission propre, loin des courants de son temps. En effet, à un moment où les italianisants régnent encore sur Paris, Franck restaure le goût d'un art grave et méditatif, conçu comme un sacerdoce; à un moment où le théâtre a tout envahi, même la musique d'église, il impose la musique pure, la musique symphonique, et acclimate en France la tradition beetho-vénienne. Toutefois les ruptures radicales ne sont pas dans la manière de Franck, et il n'a pas manqué à l'occasion de cultiver les genres honorés de ses contemporains, que ce soit le poème symphonique ou même l'opéra, avec Le Valet de ferme (1851-53), Hulda (1885) et Ghisèle (1890), représentés au théâtre de Monte-Carlo en 1894 et 1896. D'autre part, Franck a subi de nombreuses et fortes influences : celle de Bach (goût de l'écriture contrapuntique, des thèmes lents très longs), celle de Wagner (complication polyphonique, chromatisme), celle de Beethoven, qui lui donna le sentiment des grandes constructions architecturales et surtout l'esquisse de cette « forme cyclique » par laquelle Franck renouvela complètement les oeuvres de la musique de chambre en en faisant des touts homogènes, par l'emploi, dans les différents mouvements, de mêmes idées essentielles — ce qui d'ailleurs rejoint manifestement le leitmotiv wagnérien et donne à la musique de Franck sa pathétique expression humaine. Son influence a été très grande; mais ce ne fut pas celle d'un doctrinaire. Franck n'a pas imposé des méthodes, il a donné à toute une génération l'exemple entraînant de sa vie, de son respect religieux de la musique, de son mépris des succès faciles, de sa prédilection pour les grandes formes instrumentales, si dédaignées en France dans la première moitié du XIXe siècle. Il a été le modèle de tous les symphonistes français, de ceux particulièrement qui composèrent la fameuse « bande à Franck », les Duparc, Chausson, Arthur Coquard, A. de Castillon, Lekeu, P. de Bréville, Guy Ropartz. ? « Musicien qui peut s'attendre aux plus dures épreuves, d'abord parce qu'il a le mauvais goût de se prénommer César, ensuite parce qu'il est exceptionnellement doué. » Liszt. ? « Berlioz était plus artiste que musicien; Franck était plus musicien qu'artiste. Ce n'était pas un poète... le sens du pittoresque paraît absent de sa musique. » Saint-Saëns. ? « L'ennuyeux maître de chapelle. » Debussy. ? « Génial continuateur de Wagner, le plus grand créateur de formes musicales avec Beethoven et Wagner. » Vincent d'indy. ? « Depuis Beethoven, rien d'aussi riche, d'aussi profond, d'aussi émouvant n'avait été écrit dans le domaine de la musique de chambre et de la musique symphonique. » Paul Landormy.

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