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FAURÉ Gabriel-Urbain. Musicien français

FAURÉ Gabriel-Urbain. Musicien français. Né le 12 mai 1845 à Pamiers (Ariège), mort à Paris le 4 novembre 1924. Faure qui, autant que Debussy, a parfaitement illustré la réaction française du début du XXe siècle contre le romantisme wagnérien, offre une biographie aussi peu romantique que son oeuvre. La discrétion, voilà quelle fut la qualité essentielle de l'homme et de l'artiste. Dans sa vie, point de ruptures brutales, de polémiques passionnées, de longues périodes de misère comme dans celle de Wagner, point de luttes pour se délivrer des influences reçues comme celles qu'eut à mener Debussy, ni longue incompréhension du public comme celle dont fut victime un César Franck, ni attitudes théâtrales à la Berlioz. Sous son extérieur modeste et bonhomme, Fauré fut cependant un artiste très tôt sûr de lui et maître de son originalité; tolérant et même tendre dans les rapports humains, il sut toujours se montrer particulièrement intransigeant lorsqu'il s'agissait de son exigence esthétique. Il était issu d'un milieu populaire. Son grand-père était boucher, mais son père, instituteur, avait épousé la fille d'un officier en retraite. Gabriel fut le plus jeune de leurs six enfants. A l'âge de quatre ans, on l'emmena à Foix, où Toussaint-Honoré Fauré venait d'être nommé directeur de l'Ecole normale primaire. Il semble bien que la musique ne tenait aucune place dans la vie familiale; mais à l'Ecole normale, établie dans un couvent désaffecté, Gabriel découvrit un mauvais piano et un harmonium : c'est sur ces instruments qu'il fit ses premières improvisations, où s'exprimait la merveilleuse spontanéité de son génie musical. Niedermeyer, de passage à Foix, entendit l'enfant et décida aussitôt de le prendre comme boursier dans la célèbre école qu'il dirigeait à Paris. Fauré y entra à huit ans, en octobre 1853. Condisciple de Messager, il eut parmi ses maîtres le jeune Camille Saint-Saëns qui lui révéla les oeuvres de Schumann, de Liszt et aussi de Jean-Sébastien Bach. La stricte discipline de l'école Niedermeyer fut très profitable à cet adolescent sérieux et travailleur qui, lorsqu'il quitta l'établissement, ses études terminées, à la fin de 1865, emportait avec lui les premiers prix de piano, d'harmonie, d'orgue et de composition, ainsi que le manuscrit de sa grande page chorale intitulée Cantique de Racine. Devenu organiste de l'église Saint-Sauveur, à Rennes, il passa quatre ans en Bretagne (janvier 1866-début 1870), pendant lesquels il composa la plupart des Mélodies de son premier recueil. Sa liberté d'allures ayant déplu au curé de Saint-Sauveur, Fauré abandonna son emploi et, rentré à Paris, fut nommé organiste de Notre-Dame de Clignancourt. Il y remplit ses fonctions pendant quelques mois seulement : la guerre venant en effet d'éclater, il s'engagea en août 1870 dans le régiment des voltigeurs de la Garde impériale, participa à la bataille de Champigny, puis, sous la Commune, parvint à s'enfuir à Rambouillet grâce à un faux laissez-passer. La paix revenue, il se vit confier l'orgue de Saint-Honoré d'Eylau et fit également des suppléances de Saint-Saëns à la Madeleine et de Widor à Saint-Sulpice. En 1877, remplaçant Théodore Dubois qui venait de succéder à Saint-Saëns dans la charge d'organiste, Fauré devint maître de chapelle à la Madeleine. Son existence étant désormais modestement assurée, le musicien commença de paraître dans divers salons parisiens où des cantatrices mondaines chantaient ses mélodies, en particulier chez Mme Sigismond Bardac (la future Mme Debussy), à laquelle devait être dédiée La Bonne Chanson. Le jeune maître bénéficia de l'influente amitié de Saint-Saëns. Il fut également en relations avec Franck. Vincent d'Indy, Duparc, Messager. On le vit souvent aux réunions musicales organisées par la famille Viardot (il noua des fiançailles, rompues par la suite, avec Marianne, la fille de Pauline Viardot). La Société Nationale, dont il avait été l'un des fondateurs, le 25 février 1871, révéla au public la plupart de ses mélodies, ses Nocturnes et ses Barcarolles. Mais cet art d'intimité ne pouvait immédiatement toucher les foules; parce quelle refusait résolument les recettes familières du romantisme, la musique de Fauré paraissait difficile. On lui reprochait d'être obscure. Les éditeurs s'en méfiaient et la renommée de Fauré ne dépassa guère, pendant longtemps, le cercle d'une élite raffinée qui devait toutefois s'étendre après le mariage du musicien, en 1883, avec Marie Frémiet, fille du sculpteur célèbre. En 1871, Fauré s'était rendu pour la première fois en Allemagne, à Weimar, où il avait assisté à la représentation de Samson et Dalila de Saint-Saëns, que Liszt venait de monter. L'année suivante, à Cologne, il avait entendu L'Or du Rhin et La Walkyrie, puis, en 1879, à Munich, avait assisté à une représentation intégrale de la Tétralogie; mais l'art de Wagner, en face duquel Gabriel Fauré n'éprouvait point les sentiments violents d'un Debussy ou d'un Saint-Saëns, ne laissa aucune trace dans son oeuvre. Ce fut à cette époque que Fauré composa son deuxième recueil de Mélodies (1880), sa Ballade (1875) pour piano et orchestre, ses premiers Impromptus, sa première Sonate pour piano et violon — v. Sonates pour piano et violon — qui fut exécutée lors de l'Exposition universelle de 1878, ses deux Quatuors pour piano (1879 et 1886), enfin son Requiem exécuté en 1887 à la Madeleine. Peu à peu le prestige de sa musique s'imposa aux pouvoirs officiels : en 1892, Fauré fut nommé inspecteur des Beaux-Arts et en 1896 professeur de composition, de fugue et de contrepoint au Conservatoire. La même année, au mois de juin, il prenait possession du grand orgue de la Madeleine et ses exécutions hebdomadaires dans cette église allaient rapidement devenir des rendez-vous où se retrouvaient les plus raffinés des mélomanes parisiens. Commença alors pour Fauré sa plus fécondé période de création . sur des poèmes de Verlaine, il composa La Bonne Chanson (1892), et en 1895 fit paraître son troisième recueil de Mélodies (1885-95); il donna également des oeuvres pour piano : Thème et variations (1897) et les six pièces à quatre mains de Dolly (1898); enfin des musiques de scène : Caligula (1888), Shylock (1889), Pelléas et Mélisande, oeuvre écrite en 1898 pour la représentation à Londres de la pièce de Maeterlinck, et Prométhée (1900), représenté aux arènes de Béziers. En 1905, la nomination de Fauré à la direction du Conservatoire, où il prenait la succession de Théodore Dubois, apparut comme un scandale à nombre de ses confrères. On lui reprochait d'avoir toujours montré un net dédain pour les consécrations officielles. Il n'avait jamais concouru pour le prix de Rome ! Il n'était même pas ancien élève du Conservatoire ! Enfin, parce que l'on jugeait le caractère de l'homme sur l'expression paterne de sa physionomie, on prétendait que Fauré n'aurait jamais l'énergie que réclamaient les terribles responsabilités de sa nouvelle charge. En fait, après quelques semaines seulement d'administration, Fauré avait montré une telle autorité que les cadres du Conservatoire lui donnaient le surnom de « Robespierre » et que plusieurs professeurs, obligés par lui à faire régulièrement leurs cours, préféraient remettre leur démission. Fauré les remplaça par des hommes de la valeur d'un Vincent d'Indy ou d'un Debussy. Le Conservatoire eut peu de directeurs aussi intransigeants sur la discipline et sur la qualité de l'enseignement; il n'en eut pas de moins dogmatique pour tout ce qui concernait la formation des élèves au nombre desquels figurèrent André Caplet, Roger Ducasse, Florent Schmitt, Louis Aubert, Georges Enesco, Maurice Ravel. Ses occupations administratives ralentirent naturellement le rythme de création du compositeur; de nouveaux honneurs, qui étaient aussi de nouvelles charges, s'étaient d'ailleurs ajoutés à la direction du Conservatoires : en 1903, Gabriel Fauré était devenu critique musical du Figaro., en 1909 il avait été élu membre de l'institut, au fauteuil de Reyer. Ce fut cependant au cours de ces années qu'il donna trois nouveaux recueils de mélodies : La Chanson d'Eve (1907-10), Le Jardin clos (1915-18), Mirages (1919) et le premier Quintette (1906) avec piano. Fauré qui, avec toute la génération symphoniste française des lendemains de la guerre de 1870, avait vivement réagi contre la tyrannie exercée par la musique de théâtre durant toute la période romantique, ne se décida à aborder la scène que presque septuagénaire : ce fut en 1913 qu'au Théâtre des Champs-Elysées il fit représenter Pénélope, composé sur un livret de René Fauchois. Il devenait sourd en vieillissant et avait même été obligé de cesser complètement de jouer du piano. On le pressa d'abandonner la direction du Conservatoire : il se retira en 1920, mais ses dernières années, passées à Annecy et sur les bords de la Méditerranée, furent très actives et marquées par de nombreuses oeuvres importantes : les deux Sonates pour piano et violoncelle (1917 et 1922), la deuxième Sonate pour piano et violon (1917), Masques et bergamasques, donné en 1920 à l'Opéra-Comique, le deuxième Quintette (1921), la Fantaisie pour piano et orchestre (1919), un dernier cycle de mélodies : L'Horizon chimérique (1922), le Trio pour piano et cordes (1923), enfin le Quatuor (1924), révélé seulement après la mort de l'artiste pour lequel ses amis, non sans peine, obtinrent les obsèques nationales. L'art de Fauré est le plus rebelle qui soit à toute tentative de définition : art de souplesse, de nuances, de suggestions, qui séduit d'abord par ses parfums d'intimité, ses voluptueuses imprécisions, et cache pourtant un souci rigoureux de construction. Fauré n'a pas été un théoricien. II n'a pas non plus bouleversé les formes musicales. Ses moyens sont habituellement ceux de l'harmonie classique (signalons cependant l'emploi fréquent des modes grégoriens avec lesquels il s'était familiarisé pendant ses études à l'école Niedermeyer). Son originalité révolutionnaire réside avant tout dans la qualité et l'intensité de son émotion. Il a voulu, disait-il, « aller aussi loin que possible dans ce qui était permis ». ? « On trouve dans cette sonate tout ce qui peut séduire, la nouveauté des formes, la recherche des modulations, des sonorités curieuses, l'emploi des rythmes les plus imprévus; sur tout cela plane un charme qui enveloppe l'oeuvre entière et fait accepter à la foule des auditeurs ordinaires, comme choses toutes naturelles, les hardiesses les plus imprévues. » Camille Saint-Saëns, sur la Sonate pour violon et piano, op. 13,1877. ? < Fauré se plaît à confondre la joie de composer avec la volupté de moduler.» Paul Dukas. L'exemple de Fauré conduit à l'évidence à ceci : on peut être nouveau par des moyens usuels. Seules importent la valeur de l'oeuvre, ta qualité de la musique et du sentiment. » Charles Koechlin. ? « Je sais que dans beaucoup de pays où l'on aime et cultive la musique, l'art de Fauré est encore incompris... J'ai moi-même mis un assez long temps à pénétrer le mystère de cette langue si subtile. Comme à beaucoup d'autres, l'admirable discrétion du discours me paraissait un manque de force, l'élégante nonchalanche de certaines lignes me laissait croire à l'usage de quelque facilité; jusqu'à l'ambiguïté de l'harmonie qui déroutait l'intransigeant beethovénien qui forme la base de mon éducation musicale. Depuis j'ai évolué, et toutes les vertus magiques de cette musique m'ont illuminé. Moins que toute autre, elles ne peuvent s'expliquer littérairement. Je ne connais pas une musique qui soit plus purement et plus uniquement musique, sauf peut-être celle de Mozart. » Arthur Honegger. ? « Il atteint avec une simple et hautaine grandeur à la suprême et harmonieuse perfection dorique. » Claude Rostand.

FAURÉ, Gabriel (Pamiers, Ariège, 1845-Paris, 1924). Compositeur français. Fils d'un instituteur, devenu excellent pianiste, il fit, assez tard, une remarquable carrière de pédagogue au conservatoire de Paris (1905-1920) et excella dans la mélodie, la musique pour piano et la musique de chambre. On peut citer, de ses oeuvres vocales, les trois recueils de Mélodies et particulièrement les Cinq Mélodies inspirées par des poèmes de Paul Verlaine ; sa musique de chambre (le très célèbre Quatuor à cordes - 1924), ses compositions pour piano (Impromptus, Nocturnes et Préludes) et des musiques de scène.

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