École française de proximité

Un groupe de chercheurs français (Pecqueur, Lung, Zimmermann, Gilly et Rallet, entre autres) organise et oriente ses travaux autour de la notion de « proximité ». Leur approche est fondée sur quatre éléments fondamentaux. D'abord, elle accorde une place majeure à l'histoire. Il s'agit donc d'une démarche dynamique qui s'attache à étudier les processus de changement structurel, le développement et les bifurcations des trajectoires des espaces locaux. Cette généalogie est à la fois le produit de mutations plus globales, qui impriment localement leurs traces, et les résultats du cheminement particulier des différents territoires. Les rapports de proximité participent à ce processus cumulatif et se construisent eux-mêmes dans le temps. Deuxièmement, cette approche met au centre de la réflexion la question de l'innovation. L'innovation est considérée comme l'expression achevée d'un processus d'émergence du nouveau et elle est un mouvement de rupture dans la généalogie des espaces. Il s'agit d'identifier les rapports qu'entretiennent le processus de création technologique et les effets de proximité (les relations entre proximités géographiques et proximités technologiques). Troisièmement, l'accent est mis sur l'apprentissage collectif. Il est interprété comme des interactions entre les activités et les agents. La proximité des agents est la condition préalable pour établir des relations durables, qui débouchent sur l'affirmation de la spécificité territoriale. La notion d'extemalité est de retour sous un autre angle. Finalement, le quatrième élément de l'analyse est « hors marché » aussi : il s'agit de la formation des institutions à travers l'apprentissage collectif. Le concept d'institution est interprété d'une part comme les structures organisationnelles privées ou publiques, ou des modes de comportements (règles, conventions, habitus, routines, etc.). Ces institutions sont à la base de la régulation des espaces locaux. La régulation locale a trois dimensions essentielles : - le mode de coordination de diverses activités ou de relations entre acteurs ; - l'allocation de ressources en lien avec ces activités ou ces acteurs ; - la structuration des conflits. La proximité est définie en trois dimensions : la proximité géographique (espace géo-économique) (également fonctionnelle), la proximité organisationnelle (l'expression de la séparation économique entre les agents, les individus, les organisations, etc., qui peut être appréhendée au plan technologique, industriel ou financier), et finalement la proximité territoriale, qui est l'interaction des deux formes de proximité. Cette famille de pensée renouvelle l'économie industrielle régionale et se positionne dans la suite logique des travaux des années 1980, sur les milieux innovateurs, systèmes industriels localisés et districts industriels. C'est un prolongement qui permet de redynamiser et d'élargir les travaux pionniers de la décennie précédente. Notons également que le terme de proximité est souvent évoqué depuis quelques années dans la recherche urbaine. La ville est l'expression par excellence d'une proximité organisée dans le but d'optimiser les interactions humaines. L'ouvrage dirigé par Jean-Marie Huriot (1998) analyse les différentes facettes de cette question, aussi bien au niveau théorique et méthodologique qu'empirique.