Droits de l'homme à l'ONU: une marge étroite
Droits de l'homme à l'ONU: une marge étroite
A Genève, à l'ONU, la Commission, la Sous-Commission et le Comité des droits de l'homme, constituent une plate-forme unique, où se rencontrent les représentants des États et des ONG. On peut juger de l'importance croissante qu'accordent les gouvernements à ces droits au nombre de ministres qu'ils délèguent. Un véritable défilé de VIP... pour rehausser leur image en matière de droits de l'homme. Cela, en retour, contribue au prestige de la Commission. Mais l'effet n'est pas le même selon que l'on reçoit le Premier ministre français Michel Rocard (en 1989) ou un émissaire zaïrois du maréchal Mobutu.
La Commission tend ainsi à devenir une sorte de petite Assemblée générale où les droits de l'homme seraient traités sous l'angle politique. Les résolutions sont négociées et marchandées mais les intérêts économico-politiques prévalent - et de loin - sur l'aspect humanitaire. La Commission ne fait pas, en effet, toujours honneur à son nom. Par exemple, en 1989, elle a omis de se pencher sur des situations dont la gravité aurait pourtant exigé un examen approfondi: Irak, Tibet, Colombie.
Déjà, lors de l'élection du bureau, la règle excluant les membres du Conseil de sécurité a été enfreinte, puisque la Chine a été invitée. Sans doute pour mieux réfuter les accusations concernant la répression au Tibet et les actes de racisme dont ont souffert des étudiants africains.
Par ailleurs, cette même année, il a été impossible de faire prendre en compte des situations comme celle du Burundi (massacres en août 1988) ou celle de la guerre de libération érythréenne: toute allusion aux questions africaines, à l'exception de l'Afrique du Sud, rencontre l'opposition véhémente des délégués gouvernementaux concernés. Il est vrai que, généralement, les États se respectent mutuellement, liés qu'ils sont par des intérêts et obligations économiques et politiques réciproques. Chacun n'a-t-il pas généralement quelque chose à se reprocher? Et le jeu des alliances et des blocs ne facilite pas l'examen serein des dossiers.
Autre problème: lorsque des représentants de mouvements de libération, non reconnus comme tels par l'ONU souhaitent participer, ils sont souvent harcelés et intimidés par les délégations gouvernementales, directement ou par la police de sécurité du Palais interposée ; cela a été le cas des représentants du FPLE (Front populaire de libération de l'Érythrée), mais aussi d'un ressortissant du Kosovo (Yougoslavie), ancien prisonnier patronné par Amnesty International.
La Commission des droits de l'homme, créée en 1946 sous l'autorité du Conseil économique et social (ECOSOC), est composée de représentants de 43 États-membres, élus pour une durée de trois ans, sur une base géographique, bien que les cinq membres permanents du Conseil de sécurité (France, États-Unis, URSS, Chine et Royaume-Uni) y disposent automatiquement d'une place. La Commission siège six semaines par an, de février à mi-mars.
Le mandat étendu de la Commission lui permet d'examiner toutes les questions qui se rapportent aux droits de l'homme. En ce domaine, elle a la compétence pour rédiger et adopter des conventions et des déclarations internationales, pour décider des procédures à suivre dans le cadre des Nations unies et pour formuler des recommandations particulières. Ses conclusions (résolutions et décisions) sont souvent transmises à l'ECOSOC et à l'Assemblée générale, qui leur donnent les suites nécessaires. La Commission peut aussi recourir à une action directe lorsqu'elle est saisie de violations généralisées des droits de l'homme: par exemple, nommer un rapporteur ou un représentant spécial (pour les cas de torture, d'exécutions sommaires, d'intolérance religieuse ou à propos de mercenaires ou de situations nationales comme le Salvador, le Chili, l'Iran, etc.).
Les ONG, conscience de la Commission
Aux sessions de la Commission et de la Sous-Commission participent les États-membres et les experts-membres respectivement des États observateurs, des organisations inter-gouvernementales (UNESCO, FAO, OIT, etc.), des mouvements de libération (SWAPO, pour la Namibie, ANC et PAC of Azania pour l'Afrique du Sud) et des ONG (organisations non gouvernementales).
En 1946 fut créée, toujours sous l'autorité de l'ECOSOC, la Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, en tant qu'organe de la Commission. Elle est composée de vingt-six experts, siégeant à titre personnel et indépendant (ils ne représentent pas leurs pays mais cela ne garantit toutefois pas leur indépendance. Diplomates, juristes ou académiciens, ceux-ci ne sont pas toujours des experts en matière de droits de l'homme. La Sous-Commission se réunit tous les ans, en été, pendant un mois. Ses tâches lui sont confiées par la Commission: étude technique, rédaction de projets normatifs (disparitions forcées, protection des minorités, internement administratif, etc.).
Les sessions de la Sous-Commission sont précédées par les réunions de ses trois groupes de travail: sur les communications (procédure confidentielle 1 503), sur l'esclavage et sur les populations autochtones. Ce dernier groupe, siégeant en 1988 pour la sixième fois, a connu un essor grandissant avec ses trois cents délégués venus principalement des Amériques et du Pacifique.
Les ONG, dont la participation est d'ailleurs en croissance constante, sont la conscience et le moteur de la Commission, les porte-parole des sans-voix. Elles sont l'instance intermédiaire entre les principaux intéressés (mouvements, associations, peuples, minorités, exilés, etc.) et les États qui constituent l'ONU. Au début et à la fin des sessions, elles sont encouragées et remerciées pour "leur apport valable dans les débats" même si parfois, pendant la session, elles sont à peine tolérées, si ce n'est censurées et réprimandées quand elles apportent des témoignages gênants.
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