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DIALOGUE

DIALOGUE
Discours à plusieurs voix cherchant la vérité universelle, et présupposant, entre ceux qui parlent et se répondent, une raison commune.
(du grec "dialegein", « discourir l'un avec l'autre »). Chez Platon, forme de recherche philosophique de la vérité. Dans la pensée contemporaine, communication des consciences. En politique, effort de conciliation par la discussion. Dans tous les cas, respect de l'autre.

DIALOGUES DE PLATON, titre sous lequel on englobe l'ensemble de l'œuvre de Platon, excepté quelques « Lettres ». La beauté littéraire des Dialogues, qui mettent tous en œuvre la personnalité de Socrate (ainsi que celles de ses disciples comme Phédon, Théétète, de soldats comme Lachés, de sophistes tel Gorgias et même de grands philosophes, dont Parménide, Zénon, etc.), s'allie avec une réflexion philosophique contraignante, dans la mesure où la méthode des questions
et des réponses est la seule méthode qui puisse entraîner réellement un individu dans une réflexion. L'interrogatoire permet d'accoucher spirituellement les hommes (c'est la « maïeutique »), et l'opposition des opinions suscite l'intérêt pour la vérité (c'est la « dialectique »). Les travaux de Lewis Campbell, Lutoslawski, Diltenberger, etc., ont permis de classer les Dialogues en trois grandes périodes : 1° les dialogues de jeunesse, qui cherchent à définir une notion ; le courage (Lachés), la piété (Euthyphron), la tempérance (Charmide); 2° les dialogues de la maturité, où apparaît la célèbre « théorie des Idées » de Platon : le Phédon traite de l'immortalité de l'âme, le Banquet et le Phèdre sont consacrés à l'amour, la République à l'organisation de la cité idéale; 3° les dialogues de la vieillesse, beaucoup plus difficiles et abstraits, qui s'élèvent à une métaphysique de la connaissance : le Théétète, le Sophiste, le Parménide, le Politique. Son dernier dialogue : les Lois, est resté inachevé.


dialogue. Genre littéraire d’origine grecque dont les personnages, habituellement réels mais parfois imaginaires, tiennent une conversation, sur un thème unique mais qui admet les digressions et les incohérences d’une conversation normale. Les mimes de Sophron de Syracuse (Ve s. av. J.-C.) en sont un exemple, que Platon aurait admiré ; la forme de ses dialogues socratiques s’inspirent peut-être de ces mimes, tandis que leur contenu était fondé sur des conversations réelles de Socrate. Xénophon et Aristote ont eux aussi écrit des dialogues ; ceux d’Aristote ne subsistent qu’à l’état de fragments. Ce genre littéraire réapparut au IIe siècle apr. J.-C. avec Plutarque et Lucien. Ils étaient calqués sur ceux de Platon, mais avaient, dans le cas de Lucien, un but satirique plutôt que philosophique et constituaient une forme de distraction pleine d’esprit et de mordant. Dans ses Deipnosophistes en quinze livres, Athénée rapporte les conversations d’érudits qui se rencontrent à dîner et parlent de la nourriture sous tous ses aspects.
Dans la littérature latine, le dialogue est principalement représenté par les traités politiques, rhétoriques et philosophiques de Cicéron et par le Dialogue des orateurs de Tacite. On y retrouve le schéma habituel où l’interlocuteur principal (parfois l’auteur en personne) expose longuement ses opinions tandis que les autres personnages jouent un rôle visiblement moins important. Dans les dialogues de Sénèque, l’élément dramatique est réduit au minimum. Les Nuits attiques d’Aulu-Gelle sont une compilation érudite, dont certaines parties prétendent rapporter des conversations passées.


[…] bien, le vrai, le beau, par-delà toutes les opinions subjectives et les appétits matériels. Le dialogue, c’est-à-dire l’art de confronter les arguments, en est la méthode; l’ironie, […]

[…] Cette intersubjectivité donne au monde son épaisseur, l’enrichissant du dialogue de chacun avec tout autre, discussion entre sujets où s’exprime une exigence […]

Dialogue. Jeu de questions-réponses entre deux personnages de théâtre qui s’établit dans un rapport de réciprocité. Selon les conventions de la scène occidentale, les acteurs sont censés converser devant les spectateurs, sauf lorsque certaines catégories du langage dramatique, monologue, aparté, adresse au public, soulignent l’artifice de cette convention. Le système des répliques qui caractérise le langage dramatique a été créé par Eschyle lorsqu’il introduisit le deuxième acteur. Avant lui, un seul acteur s’entretenait avec le chœur (l’échange entre le protagoniste et le chœur est dépourvu de réciprocité, la voix collective du chœur répondant à la voix personnelle du héros). Lorsque les répliques sont longues, on les appelle des tirades. Elles sont très fréquentes dans le théâtre classique. La stichomythie est un échange de courtes répliques de même longueur, (un vers, un demi-vers, un distique, exceptionnellement quatre vers). Le procédé, hérité du théâtre grec par l’intermédiaire de Sénèque, marque une rupture, soulignant au cœur du dialogue un contraste entre l’ampleur des tirades et la vivacité de ces répliques. Ce changement de rythme indique une modification momentanée dans la relation entre deux personnages. Dans la grande scène d’amour où Rodrigue et Chimène se sont violemment affrontés, la stichomythie marque un bref moment de paix :
RODRIGUE O miracle d ’ amour ! CHIMÈNE O comble de misères ! RODRIGUE Que de maux et de pleurs nous coûteront nos pères ! CHIMÈNE Rodrigue, qui l’eût cru? RODRIGUE Chimène, qui l’eût dit? (Corneille, Le Cid, III, 4)
La stichomythie se prête aux scènes de dépit amoureux que Molière a si souvent reproduites. Aucun des deux amants, piqué dans son amour-propre, ne veut faire les premiers pas. Chacun met son point d’honneur à ne pas dire un mot de plus que son partenaire et à relancer le discours en reprenant une formule identique à celle de la réplique précédente (ex. : Le Bourgeois gentilhomme, III, 10).

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