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DESCARTES : SÉPARÉ DES AUTRES, MAIS LIÉ À EUX

DESCARTES : SÉPARÉ DES AUTRES, MAIS LIÉ À EUX

Si le “Je pense donc je suis’’ est pour Descartes une première vérité indubitable et, pour cette raison, exemplaire, elle ne le conduit nullement à ignorer l'existence des autres consciences, capables, elles aussi, d'accéder à la vérité. Bien plus, dans une Lettre à la princesse Elisabeth, Descartes observe qu'en réalité nous dépendons des communautés auxquelles nous appartenons. Une analyse nuancée et attentive des liens entre elles et nous conduit à percevoir leur complexité. Celle-ci interdit aussi bien le sacrifice de la communauté à ses intérêts propres qu'une subordination aveugle à celle-ci.

« Il y a encore une vérité dont la connaissance me semble fort utile : qui est que, bien que chacun de nous soit une personne séparée des autres, et dont, par conséquent, les intérêts sont en quelque sorte distincts de ceux du reste du monde, on doit toutefois penser qu’on ne saurait subsister seul, et qu’on est, en effet, l’une des parties de l’univers, et plus particulièrement encore l’une des paries de cette terre, l’une des parties de cet Etat, de cette société, de cette famille, à laquelle on est joint par sa demeure, par son serment, par sa naissance. Et il faut toujours préférer les intérêts du tout, dont on est partie, à ceux de sa personne en particulier ; car on aurait tort de s’exposer à un grand mal, pour procurer seulement un petit bien à ses parents ou à son pays ; et si un homme vaut plus, lui seul, que tout le reste de sa ville, il n’aurait pas raison de se vouloir perdre pour la sauver. »

DescartesLettre à Elisabeth, 15 septembre 164.

ordre des idées

1) Thèse centrale : un individu ne peut vivre indépendamment des autres. — Une restriction à cette thèse : chaque être est un individu distinct des autres ; conséquence pratique de cette restriction : ce qui convient à un être ne convient pas nécessairement aux autres. —Justification de la thèse : chaque individu est un élément de communautés plus larges (humanité, Etat, société, famille) ; divers liens, qui résultent du hasard (“naissance”) ou du choix volontaire (“serment”) font qu’il dépend de ces communautés.

2) Règle pratique tirée de la thèse centrale : — Énoncé de la règle (“préférer toujours les intérêts du tout...”) : chacun doit considérer que ce qui est bon pour l'ensemble auquel il appartient doit être préféré par lui à ce qui n'est bon que pour lui. —Limites à cette règle : la préférence accordée au groupe ne doit pas conduire à se sacrifier sans réflexion, en particulier si sa propre perfection est supérieure à celle du groupe.

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