DESCARTES : LA RAISON DOIT MAÎTRISER LES PASSIONS
DESCARTES : LA RAISON DOIT MAÎTRISER LES PASSIONS
Dès lors que l'on conçoit l'homme comme un être essentiellement raisonnable et responsable, il ne peut y avoir pour lui de liberté et de sagesse que dans et par l'exercice de la raison : celle-ci doit donc contrôler et triompher des passions.
«[...] il me semble que la différence qui est entre les plus grandes âmes et celles qui sont basses et vulgaires, consiste, principalement, en ce que les âmes vulgaires se laissent aller à leurs passions, et ne sont heureuses ou malheureuses que selon que les choses qui leur surviennent sont agréables ou déplaisantes ; au lieu que les autres ont des raisonnements si forts et si puissants que, bien qu’elles aient aussi des passions, et même souvent de plus violentes que celles du commun, leur raison demeure néanmoins toujours la maîtresse, et fait que les afflictions même leur servent et contribuent à la parfaite félicité dont elles jouissent dès cette vie. [...] Ainsi, ressentant de la douleur en leur corps, elles s’exercent à la supporter patiemment, et cette épreuve qu’elles font de leur force, leur est agréable ; ainsi, voyant leurs amis en quelque grande affliction, elles compatissent à leur mal et font tout leur possible pour les en délivrer et ne craignent pas même de s’exposer à la mort pour ce sujet, s’il en est besoin. Mais, cependant, le témoignage que leur donne leur conscience, de ce qu’elles s’acquittent en cela de leur devoir, et font une action louable et vertueuse, les rend plus heureuses, que toute la tristesse, que leur donne la compassion, ne les afflige. Et enfin, comme les plus grandes prospérités de la fortune ne les enivrent jamais et ne les rendent point plus insolentes, aussi les plus grandes adversités ne les peuvent abattre ni rendre si tristes, que le corps, auquel elles sont jointes, en devienne malade. »
Descartes, Lettre à Elisabeth. 18 mai 1645.
ordre des idées
1) Une première observation : le bonheur et le malheur de ceux qui « se laissent aller à leurs passions » ne dépendent pas d’eux, mais de ce qui leur arrive.
2) Une seconde observation : ceux qui maîtrisent leurs passions par l'usage de leur raison sont parfaitement heureux.
3) Explication de ce second fait : la maîtrise des passions transforme le désagréable en agréable, le douloureux en plaisir. Ainsi :
— en supportant les douleurs du corps, on est heureux de pouvoir les supporter ; — en souffrant pour autrui, on est heureux d'accomplir son devoir ; — de manière générale, on ne souffre pas des malheurs qui nous arrivent, lesquels ne nous rendent donc ni tristes ni malades.