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définition

La définition est un des paramètres de l’état de la cause ; elle est donc essentiellement en jeu dans le genre judiciaire, mais elle compte aussi dans les deux autres, surtout dans le délibératif. L’analyse la plus précise de la définition, et la plus fondamentale dans la tradition rhétorique, est donnée dans les Topiques d’Aristote (traduction de J. Tricot, éd. Vrin). La définition fait partie des éléments constitutifs des raisonnements dialectiques. La définition est un discours qui exprime l’essence de la chose. Or, on peut la rendre soit dans la forme d’un discours qui tient la place du terme, soit d’un discours qui tient la place de tout un discours à définir. Mais si, de quelque façon que ce soit, on rend la chose à définir par un seul terme, il est évident que ce n’est pas là donner la définition de la chose, attendu qu’une définition est toujours un discours d’une certaine espèce. Dans les définitions, c’est surtout d’une question d’identité ou de différence qu’on s’occupe. Si nous sommes capables d’établir dans la discussion que deux choses sont identiques ou différentes, nous serons aussi capables de trouver en abondance des arguments en vue des définitions : c’est ainsi que, une fois que nous aurons montré que les choses ne sont pas identiques, nous aurons détruit la définition. Mais il n’y a pas réciprocité pour cette règle, car il ne suffit pas, pour constituer la définition, de démontrer l’identité de deux choses, tandis que, pour détruire la définition, il suffit de démontrer que cette identité n ’est pas. Ainsi, manteau pour vêtement, ou animal-pédestre-bipède pour homme. Voisine de la définition, en topique, est la notion du propre. C’est ce qui, tout en n’exprimant pas l’essence de la chose, appartient pourtant exclusivement à cette chose et entretient avec elle une relation réciproque. Par exemple, c’est une propriété de l’homme d’être susceptible d’apprendre la grammaire : car si A est homme, il est capable d’apprendre la grammaire, et s’il est capable d’apprendre la grammaire, il est homme. C’est sur cette base théorique qu’il convient de situer les commentaires plus pratiques de Quintilien. Le recours à la définition s’impose à partir du moment où il n’y a pas contestation ni discussion sur le fait, mais où, pour soutenir ou pour contredire une proposition, le seul moyen restant est l’examen de la dénomination du fait : dans le cas d’une défense par exemple, celui qui ne peut pas dire qu’il n’a rien fait de mal n’a pas d’autre excuse à produire que de dire que ce qu’il a fait n’est pas le crime dont on l’accuse. La définition est donc une explication exclusive, claire et brève de la chose dont il est question; elle est essentiellement fondée sur des considérations touchant les propriétés fondamentales, le genre, et les différences spécifiques. Il faut s’en tenir à des approches définitoires qui soient à la fois suffisamment exactes pour les besoins de la cause (et surtout point contradictoires ni seulement gênantes pour le cours de son propos), et globalement acceptables et compréhensibles par les auditeurs (sans pointillisme terminologique excessif). Un des exemples traditionnels intéressants concerne l’adultère. Dans un état de droit où l’adultère est punissable par la justice parce qu’interdit par la loi, donc où il constitue un crime ou, à tout le moins, un délit, à partir du moment où est établi le fait de relation sexuelle entre un homme et une femme, il faut s’entendre sur une définition plus précise : dans une société de ce type nettement phallocratique, on dira que le crime est constitué dans le cas où la femme est mariée avec un autre homme. Mais cette définition est-elle complète ? Peut-on véritablement accuser d’adultère un homme qui a couché avec la femme d’autrui rencontrée dans un bordel, c’est-à-dire avec une prostituée mariée ? Toute la discussion roulera sur la définition le plus précisément possible circonstanciée de l’adultère. Concrètement, la tâche à ce sujet s’applique à plusieurs points. Il faut veiller à ce que la définition ne soit ni fausse ni incomplète. Il faut confirmer la sienne et réfuter celle de la partie adverse. Il faut établir la définition du fait général rangé sous la dénomination en cause. Il faut établir la définition du fait particulier en question, pour voir si c’est ou non vraiment la même que celle de la catégorie proposée.

=> Éloquence, oratoire; genre, judiciaire, délibératif, démonstratif; cause, preuve, dialectique; proposition.

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